> A gauche, une superbe scène dans l'embouchure de la Tamise, avec le palais royal au loin...Maltraités ? mais nous sommes en 1199 et si le débarquement de Philippe Auguste (quel miroir avec le débarquement de 1945, ne serait-ce que ces barges presque identiques, mais en bois) se solde par un échec sur les plages anglaises, c'est à cause de la trahison d'un félon. Or, on ne réécrit pas l'histoire. D'ailleurs, il est bon de se voir de l'autre côté, pas toujours celui des bons ou des vainqueurs.
...Une trahison française donc, (ou franco-anglaise, mais c'était un peu compliqué à l'époque il faut dire...), mais aussi une trêve anglaise. En effet, les barons en rebellion contre le roi Jean sans terre ont mis leur vélléités de putsh de côté, afin de faire face à l'ennemi commun. C'est là justement qu'intervient Robin Longstride (Robin hood, et pas "Wood"), dont la véritable existence et histoire fait, elle, polémique sur les sites documentaires.
Ce qui par contre ne fait pas polémique et rend ce film particulièrement intéressant, (beaucoup d'adultes aux séances d'ailleurs, car la bande annonce est suffisamment évocatrice pour donner un bel aperçu de cet énième adaptation de la "légende") c'est la superbe reconstitution historique de l'angleterre du XIIeme siècle : paysans, travail , paysages, armements, batailles... Le réalisme du traitement nous donne à voir la guerre dans toute sa rudesse et sa violence. Qui voudrait être sur le champ de bataille à ce moment là ?
On est loin, très loin des coups de pieds (karaté) faciles et des déchaînement de balles à la mitrailleuse (sans recevoir en échange, et en détruisant à coup sûr) dont nous abreuvent moult films aujourd'hui qui jouent le jeu de l'apologie de la violence au lieu de la dénoncer.
Ici, les flèches pleuvent du ciel ou atteignent leurs cible en tir tendu, de façon dur, avec un bruit de heurt qui ne laisse pas indifférent. Les massues cognent, les corps sautent sous les coups... les râles se font entendre... Et chacun doit s'encourager pour aller en avant.
> Ci à droite : mieux vaut se garer lors d'une charge de cavalier !
Mais en dehors de cette représentation de la guerre, et des injustices aussi (le clergé en prend pour son grade, on est en effet à l'époque où celui-ci se détourne des valeurs humanistes de l'église chrétienne, pour s'enrichir sur le dos des petites gens), Robin des bois a pour atout de resituer l'histoire de Richard coeur de lion (Richard 1er d'angleterre) dans son contexte historique, même si on ne nous montre pas la troisième croisade dont il revient. "Kingdom of heaven" du même réalisateur s'en est par contre déjà chargé avec brio, en ce qui concerne la chute de Jérusalem (entre la deuxième et la troisième croisade), et on peut cependant si l'on reste pour le générique de fin apercevoir sous forme d'images redessinées quelques scène (coupées ?) des croisades. On les verra peut-être en bonus dans le DVD ?
> Ci à gauche : Richard coeur de lion
Et c'est là que le film de
Ridley Scott assure sa mission : il ne nous montre rien d'autre que la dure vie des anglais à cette époque, paysans, orphelins et barons, face à un pouvoir à mille lieux de la réalité. Les représentations de décors et les détails sont aussi saisissants : Petites bourgades, encerclées de leur remparts, où subsistent ça et là des vestiges runiques, fermes fortifiées, palais royal, non loin de l'embouchure de la Tamise, coupé avec sa cour du reste du pays. Détail d'une côte de maille que l'on ne peut enlever soi-même; paille et animaux dans les logis...grenier à grains... on sentirait presque ces odeurs que l'on a oublié aujourd'hui, dans notre société si aseptisée. (sauf à la campagne ?)Et le casting rend service à cet effort. Russell Crowe et Cate Blanchett : superbes, mais une palme particulière est décernée à Max Von Sydow, (Walter Loxley), vieux baron aveugle qui essaie d'assurer sa lignée en invitant un inconnu à remplacer son fils disparu. Magnifique !Bref, lorsque les armées françaises et anglaise coalisées se rencontrent et s'affrontent, deux heures se sont écoulées pour nous spectateurs, et l'histoire banalisée de Robin du bois que l'on connaissait jusqu'à présent s'apprête juste à commencer. En effet Jean sans terre (et sans coeur), qui a pris la place vacante de son frère Richard coeur de lion* se dédie de sa parole et renforce les injustices.
Comme le précise le dernier panneau du film : "Ainsi commence la légende".
On est donc ravi de ne pas avoir à subir à nouveau une histoire romancée mille fois racontée.
(*) Mort suite au mauvais traitement de ses blessures provoquées par un carreau d'arbalète dans le coup lors d'un dernier assaut au château de Châlus Chabrol, en Mars de l'année 1199.
Ps : Finalement, si l'on prend un film comme "V pour vendetta" (Alan Moore), rediffusé la semaine dernière sur France 4, ou un roman graphique comme "Berlin" (de Jason Lutès), dont le tome 2 a paru cette année, ce n'est qu'une nouvelle manière de raconter l'opposition politique nécessaire à toute dictature de façon à peine détournée.
...On en aurait donc autant besoin ?
Allez voir ce grand film de cinéma. Les bonnes raisons sont nombreuses.