Prix de l’Association des médias écrits communautaires
Le bénévolat de Louise Gagné
Préparé en cachette, la remise des prix du bénévole de l’année.
Valérie R. Carbonnneau Dossier Bénévolat, Communautaire
«Es-tu libre le 1er mai? J’aimerais que tu viennes souper avec nous», demandait Raymond Viger à Louise Gagné, vers la fin avril. Ce qu’elle ignorait c’est qu’on avait déposé sa candidature à titre de bénévole de l’année pour un média communautaire, dans le cadre du congrès annuel de l’Association des médias écrits communautaires du Québec (AMECQ).
Surprise qu’on ait pensé à elle, elle remportait l’honneur quelques jours plus tard, dans un hôtel d’Orford. Ses premiers engagements bénévoles remontent certes à loin. De cheftaine chez les Guides à membre du chœur Montjoie, d’hier à aujourd’hui, les exemples sont nombreux et notables.
Génération action
Issue d’une génération qui descendait manifester dans la rue, Louise Gagné n’a pas assez de doigts pour compter les causes qu’elle a défendues. «C’était la Révolution tranquille. La première fois qu’une génération de jeunes était plus instruite que leurs parents», souligne-t-elle. La mise sur pied de l’Union générale des étudiants (UGEQ), les manifs pour les prêts et bourses ou contre la guerre au Vietnam… «On expérimentait tout ça, ce n’était pas théorique! L’implication d’une personne dans la société s’inscrit dans l’histoire.» Une heure d’entrevue ne lui suffit pas pour raconter la sienne de long en large…
Pionnière parmi une centaine de jeunes membres de Bureau de concertation Jeunesse, elle a ainsi participé à l’élaboration d’un programme jeunesse avant la loi de 1975 qui allait reconnaître, pour la première fois, l’existence des droits des mineurs. À la même époque, elle était très impliquée au pavillon Jeunesse d’Expo 67. «J’étais consciente de faire partie de ce phénomène nouveau de la participation des jeunes à la société…»
Un parcours riche, chargé de détours
Sociologue de formation, Louise Gagné avait auparavant tenté sa chance en sciences mais en vain. «On était en 1963», se souvient-elle comme si c’était hier. On lui a refusé l’accès au département de mathématiques «parce qu’elle était une fille». Stupéfaite, elle a demandé au doyen de la faculté et au directeur du département: «Que dois-je faire?… Habille-toi comme un garçon», lui a-t-on répondu.
Pendant plus de 30 ans, elle s’est surtout portée à la défense des droits humains. Notamment auprès des jeunes, des femmes et des réfugiés. Elle a travaillé avec Jacques Couture, important ministre de l’Immigration après avoir été animateur social dans le quartier de Saint-Henri (Montréal) et à Madagascar. Dernièrement, elle briguait les suffrages comme conseillère dans Joseph-Beaubien, un district d’Outremont, dans l’équipe de Louise Harel de Vision Montréal.
Après avoir participé tout au long de ses années de militance à la création d’une trentaine d’organismes communautaires dont certains ont même rayonné à l’international, Louise Gagné a finalement adopté le Journal de la Rue.
«Vers 1992, alors que Raymond Viger et son collègue publiaient le Journal de la Rue avec une dizaine de jeunes, j’ai tout de suite été très sensible à cette idée de présenter le point de vue jeune.» Ainsi, elle a vu le magazine passer de 5000 à 10 000 abonnés, pour atteindre jusqu’à 85 000 abonnés et près de 500 000 lecteurs ici et à l’étranger.
Depuis 1994, elle a été tour à tour administratrice, conseillère, présidente de l’organisme et membre du comité de lecture de Reflet de Société. «La revue stimule l’économie locale à Montréal et dans les autres régions. Les sujets qu’on traite en témoignent.» Elle s’y associe aussi parce qu’on parle de phénomènes sociaux du point de vue des jeunes. «Plusieurs thèmes donnent rarement une réflexion aussi profonde dans les médias», admet celle qui dit se sentir à l’aise parmi les gens engagés au sein de l’organisme.
Au cours des dernières décennies, Louise Gagné travaillait au sein de la fonction publique. «Dans un ministère, il y a des postes que je n’ai jamais obtenus puisqu’on m’identifiait au communautaire», précise-t-elle. Sa fierté est d’avoir toujours défendu l’intérêt de la population.
«Je travaille pour le monde et le meilleur endroit pour le faire, c’est dans le communautaire…» Le message qu’elle veut léguer: «continuer à faire reconnaître l’expertise de la société civile pour un meilleur équilibre entre les jeunes et les moins jeunes, entre les experts et ceux qui vivent les problèmes.»
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