Plénière du SDB le 16 décembre 2010 au matin. Crédits photos TN pour le SJBM
Le jeudi 16 décembre 2010, Jour de la victoire de la France devant la CJCE, à laquelle il a puissamment contribué, le Président Jean Benoît a cédé ses fonctions.
C’est un départ en pleine gloire, reflet de l’homme exceptionnel qu’il est.
Dans l’immense salle de conférence, emplie de monde, l’émotion était palpable. Une page d’histoire se tournait pour la Biologie Médicale Française.
Environné par un silence profond, Jean Benoit a évoqué l’action menée par le Syndicat des Biologistes sous son impulsion et avec l’aide constante et fidèle de Jean Bégué, nourri avec humour l’assistance d’anecdotes, formulé des conseils avisés pour les années à venir.
Puis l’écho de son adieu s’est éteint et a laissé la place à un tonnerre d’applaudissements, une standing ovation, nourrie, longue, sincère.
On peut être d’accord ou non avec son action, on peut discuter la stratégie, trouver qu’il en a fait trop ou trop peu : le débat d’idée est au fondement de l’acte de confiance que représente une démocratie, il n’en reste pas moins que Jean Benoit était, et est, un très grand Président.
Lorsqu’il est devenu Président des biologistes médicaux, nous rentrions en sixième. Une belle année, pleine d’insouciance pour nous avec notre cartable neuf et nos rêves d’indépendance, déjà des mois de combats syndicaux pour lui. De ses hauts faits, avec son alter ego fidèle Jean Bégué, nous ne connaissons que la légende. Eux connaissent la fatigue, le doute, la solitude et les sueurs froides qui précédèrent chacune de leurs victoires conquises au nom de la collectivité. C’est pour nous peut-être la seule chose qui nous fasse regretter d’être jeunes: ne pas avoir eu la chance de vivre leurs combats.
Mais nous avons eu une autre chance. Alors que tous jeunes nous découvrions notre spécialité et les enjeux dont elle était l’objet, nous avons pris la mesure des ombres qui menaçaient les jeunes biologistes. À ce moment nous aussi avons ressenti le doute, nous aussi avons questionné notre avenir. Mais nous avons alors découvert les grands hommes de la Biologie Française, et parmi eux Jean Benoît, qui nous ont prodigué conseils et encouragements, nous ont permis d’affiner notre pensée, de développer notre action, nous ont également crédité de la confiance et de la bienveillance nécessaire pour nous permettre de mûrir notre pensée syndicale et acquérir notre autonomie politique. C’était une chance rare, et pour cela ils méritent notre gratitude.
Jean Benoît
C’est pourquoi aujourd’hui, au moment de son départ, nous tenons à remercier le Président Jean Benoît, au nom de la jeune génération pour ce qu’il a fait pour notre spécialité médicale en général, et pour les jeunes qu’il a toujours défendus en particulier. Pour le temps, l’énergie, la santé qu’il a investis en endossant avec ses pairs le rôle de guide de la profession.
Pour son courage aussi, car le courage véritable c’est de chercher la vérité et de la dire, et de ne pas subir la loi du mensonge triomphant.
Il aurait pu le faire prospérer, et construire un empire. Il aurait pu aussi privilégier sa vie personnelle et professionnelle et ne pas connaître la lassitude harassante de celui qui lutte pour rompre le cercle de fatalité, le cercle de fer, le cercle de mensonge où les revendications même justes provoquent des représailles qui se flattent de l’être. Il a choisi de rester intègre et de se battre pour ses convictions, avec toujours à l’esprit le souci du bien des patients Français, et la défense de l’indépendance des professionnels de santé, garante de notre éthique.
C’est un choix que peu d’hommes et de femmes font, et pour cela il mérite notre respect.
Et il l’a fait avec un sens de la diplomatie et une maîtrise à la fois de la haute technicité et des conditions d’exercice de notre profession, de même que de la communication, qui ont permis les victoires qu’il a remportées au nom des biologistes médicaux français.
Une main de fer dans un gant de velours, un homme humble, affable, fin d’esprit, empathique, un homme hors norme et hors cadre, un homme libre: voilà l’homme qu’est Jean Benoit.
Il serait plaisant de croire que les ombres qui nous menacent peuvent être dissipées définitivement par une illumination soudaine et totale. C’est, comme ces dernières semaines nous l’ont montré, parfois le cas, mais bien souvent les forces vertueuses, les forces de sagesse, de lumière, de justice ne peuvent se passer du secours du temps, et l’ombre est atténuée seulement par une lente succession d’aurores diaphanes.
Les hommes qui ont confiance en l’Homme savent cela et l’acceptent.
Ils se félicitent des victoires patiemment acquises, et affirment avec une certitude qui jamais ne fléchit qu’il vaut la peine de penser et d’agir; que l’effort humain vers la clarté et la justice n’est jamais perdu.
L’Histoire enseigne aux hommes la rémore des grandes tâches et la lenteur des accomplissements, mais elle justifie incontestablement l’invincible espoir.
C’est cet espoir que portait Jean Benoît, et qu’il nous a transmis.