Certains pensent que Nicolas Sarkozy, au moment de prendre sa décision à l'automne 2011 comme il l'a annoncé, pourrait
finalement refuser de se présenter à sa propre réélection en 2012. L'argument vise sans doute à entretenir un faux suspense. Officiellement, Sarkozy se désintéresse du jeu politique quotidien,
tout occupé à travailler sur les « grands » sujets du monde et de la France : la dépendance, la régulation économique mondiale dans le cadre de la présidence française du G20, etc. Mais
en coulisses, Sarkozy s'active.
1. L'UMP a décidé de renoncer à ses primaires.
En 2006, le président du parti, un certain Sarkozy, avait bataillé pour la
création de primaires à droite, et éviter le scenario de 1995. Depuis, on argumente, à l'Elysée comme auprès de Jean-François Copé, qu'il s'agit de suivre l'exemple de François Mitterrand en 1988
et Jacques Chirac en 2002. L'intention est claire. L'UMP a également retiré de son site internet l'abécédaire des promesses du candidat Sarkozy en
2007. On est jamais trop prudent.
2. Sarkozy a reçu Rachida Dati. Ce réchauffement des relations entre l'ancienne garde des Sceaux et son mentor n'est pas déterminant.
Rachida Dati ne représente qu'elle-même, elle a des visées sur Paris, ses propositions politiques sont toujours aussi confuses.
Mais Dati fait entendre depuis des mois une musique désagréable car pseudo-contestataire contre la politique migratoire et sécuritaire du gouvernement. Rama Yade, autre starlette déchue du
sarkozysme, ne dit pas autre chose en accusant l'UMP de s'aligner sur
le Front National. Mais Yade a quitté l'UMP pour le Parti radical de Borloo, et Sarkozy a choisi sa jument.
3. Sarkozy laisse ses proches réclamer sa candidature. Il veut se faire désirer. Après le remaniement, il
avait pourtant demandé à ses ministres d'éviter les prises de paroles intempestives sur les sujets qui ne concernent pas leur périmètre. On entend pourtant régulièrement Eric Besson s'épancher dès qu'il le peut sur le formidable potentiel de la candidature
de Sarkozy en 2012. A l'UMP, Jean-François Copé, désormais rentré dans le rang sarkozyen, excelle à cette langue de bois également. Même François Fillon y est allé de son couplet. Il laisse même
son épouse Carla Bruni-Sarkozy confier qu'il réfléchit beaucoup à sa
candidature: « je pense qu'il y réfléchit beaucoup mais ce n'est pas moi qui vais me mêler de ça. C'est une charge trop importante. C'est trop difficile, trop personnel pour que
j'intervienne. Mais je le suivrai, quoi qu'il fasse. »
4. Depuis le remaniement, Sarkozy ne ménage pas ses efforts pour rassembler sa famille politique : il a
sagement écouté Christine Boutin lui expliquer combien il pouvait être le « Robert Schuman » de la régulation économique mondiale grâce à la présidence française du G20, lors de la
remise de son inutile rapport intermédiaire sur la dimension sociale de la mondialisation. Il a reçu un à un les déchus et déçus du gouvernement : Jean-Louis Borloo, Jean-Marie Bockel,
Christian Estrosi et même Patrick Devedjian, amer de s'être fait éjecté de la présidence de la fédération UMP des Hauts-de-Seine au profit d'un obscur maire local. Regardez Borloo, vrai déçu mais
faux rebelle, s'est comporté depuis un mois : de retour à l'Assemblée mardi dernier, il s'est empressé de rester dans le groupe UMP... Quelle indépendance centriste !
5. Sarkozy a bien neutralisé Fillon. Nous l'écrivions dès le remaniement
connu. François Fillon reconduit à Matignon est contraint au silence. « Si Fillon était dehors, il serait en train de faire le beau » aurait confié Sarkozy à un proche d'après le
Figaro. Fillon vise la mairie de Paris en 2014.
6. Sarkozy tient à distance Dominique de Villepin. Le nouveau procès Clearstream est pour bientôt. L'ancien
premier ministre s'est finalement calmé. On a pu le
constater quand il a été auditionné par le juge Marc Trévidic dans l'affaire de Karachi.
7. Depuis janvier, Sarkozy multiplie les déplacements auprès de certaines cibles électorales déterminantes (agriculteurs,
médecins, etc). Ce « tri sélectif » des thèmes évoqués n'a aucun rapport avec l'actualité du pays. Sarkozy n'a prévu ni réalisé aucun déplacement thématique sur le chômage, pourtant
toujours de masse et en augmentation régulière malgré les proclamations officielles. Pas davantage ne s'est-il penché sur la précarité, la justice ou le mal-logement. Son unique intervention,
fracassante, sur l'insécurité, date de juillet dernier, à Grenoble. L'opération fut un fiasco total. Pour janvier prochain, l'Elysée prépare une nouvelle tournée des voeux en province.
Au final, qui peut encore croire à une quelconque hésitation de Nicolas Sarkozy à se représenter ?
Sarkofrance