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Tout est banal et étouffant. C’est en quelques mots l’univers où nous entraîne le nouveau talent littéraire qu’est Raphaële Moussafir dans son second roman. Et pendant ce temps les araignées tricotent des pulls autour des bilboquets est le récit d’une fille de six ans.
Rachel ne supporte plus le regard porté sur elle par les adultes. Elle estime qu’elle passe pour « une dinde » dans un milieu familial hostile à son épanouissement. La routine quotidienne hante l’histoire à travers l’insistance des répétitions : « Ailleurs, dans le hameau il y a des amis de mon âge… Comme moi ils sont en vacances dans des hameaux où il y a des amis de leur âge. » La transcription de la banalité trouve son aboutissement dans des phrases descriptives expéditives constituant chacune un paragraphe comme « Grand-père n’est ni vieux, ni sourd. » Et de préciser à nouveau : « Il est turc mais il n’a pas l’accent. » Mais la jeune fille décide de satisfaire tout le monde. Et tant pis si elle passe pour une cruche! Sous ses airs angéliques, Rachel développe un comportement sadique à l’égard de son environnement. Elle tire des lignes avec ses crottes de nez sur les murs et allume un feu pour brûler le père Noël qu’elle attend impatiemment. Ainsi, elle tire partie des idées reçues des adultes sur les enfants dont elle profite pour accomplir ses frasques et réaliser ses projets. La corps fragile est subitement très malade quand il faut éviter l’école. Ce sont finalement les adultes qui passent pour des « dindes ».
Outre la légèreté de son style, le plus important dans cet ouvrage de Raphaële Moussafir, c’est sa générosité. L’auteur n’hésite pas à partager avec son lecteur son plan et à insérer une critique de son œuvre en train de se faire. On est ainsi éclairés par des interprétations offertes pour évincer toute probable incompréhension. Il suffit, pour s’en convaincre, de considérer un moment les explications fournies à des termes ou à des phrases employés par Rachel : « Grand maître à bord : chef de famille despotique, détenteur universel de la télécommande. » Le désir de partage de Raphaëlle Moussafir ne s’arrête pas là. Chaque chapitre s’ouvre sur l’énumération des grandes idées qui y seront développées ou sur des passages en italique pour restituant le contexte de l’événement narré.
À la lecture de ce roman qui cache mal son ambition littéraire, on ne peut que sortir enrichis et souriants.
Article original écrit et publié par Ali CHIBANI