Le président de la République a annoncé, mardi 16 novembre dernier, son souhait de créer des jurys populaires auprès des juges de l’application des peines et des Tribunaux correctionnels. Loin d’être largement commenté par la classe politique, une telle proposition risque malgré tout de susciter un véritable émoi dans l’ensemble des professions de justice et de l’ensemble des citoyens attachés à notre vision de la justice. Émoi pour le moins justifié, tant une telle proposition répond une fois de plus à l’aspiration démagogique du chef de l’Etat à contenter une partie de l’opinion publique aux vues de certains faits divers. Plus encore, elle semble faire office de cache-misère, tant notre système judiciaire est encombré et sous financé.
Le fait de proposer une utilisation à outrance des jurys populaires, marque une fois de plus la défiance de Nicolas Sarkozy envers des magistrats du siège indépendants qu’il ne peut contrôler. Pire encore elle met en exergue la volonté d’une partie de la droite française, de soumettre l’appareil judiciaire à une véritable « dictature » de l’opinion, régie par l’émotion et non par la raison. Le président de la République n’a eu de cesse de critiquer, parfois explicitement, des magistrats qu’il juge incompétents, simplement bons à remettre des criminels multirécidivistes en liberté. Sur ce point le chef de l’Etat a récidivé lors de son allocution télévisée du 16 novembre en sous-entendant qu’un jury populaire serait plus légitime qu’un magistrat de la République indépendant. Il ira même jusqu’à commettre une erreur manifeste, en estimant que les arrêts de Cour d’assise, soumises à un jury populaire, n’étaient jamais contestés. Il est alors bon de rappeler qu’un nombre toujours croissant et majoritaire d’arrêts de Cour d’assise, font l’objet d’un recours devant une Cour d’assises d’appel, qui elle, n’est pas dotée d’un jury populaire.
Les forces de gauche doivent plus que jamais combattre cette vision particulièrement populiste, en proposant une autre analyse, un autre diagnostic.
La Justice reste le parent pauvre de l’Etat français. En effet son ministère, un des plus pauvres de France, dépasse péniblement les 7 milliards d’euros, dans le projet de loi de finance de 2011. Une conséquence latente de cette situation est un manque criant de magistrats et de greffiers, des tribunaux engorgés souvent financièrement incapables de faire appliquer leur propres décisions, et notamment celle qui réclament des moyens, c’est-à-dire celle qui tendent à la prévention de la délinquance.
Nicolas Sarkozy tente de dissimuler cette situation en proposant démagogie là où il faudrait mettre des
moyens.
Les jeunes socialistes s’alarment d’une telle dérive, et demandent que l’on donne les moyens à la Justice
d’agir vraiment contre toutes les formes de délinquance !
MJS