J’ai donc installé un nichoir sur mon balcon et je l’alimente régulièrement en graines afin de nourrir les passereaux affamés qui passeront par là. Les chutes de neige et les températures glaciales ont eu vite fait d’attirer les indigents à ma fenêtre.
Depuis plusieurs semaines maintenant, j’ai observé le manège des petits oiseaux. Si exceptionnellement un rouge-gorge ou une paire de moineaux viennent picorer dans mes jardinières, ce sont les mésanges qui se sont appropriées les mangeoires. Deux mésanges bleues et trois mésanges charbonnières. Les bleues sont… bleues ! Avec un bandeau noir sur les yeux, comme les Frères Rapetout. Les charbonnières sont plus grosses, tête noire aux joues blanches et le plastron jaune avec une barre noire et franche le scindant en deux sur toute la hauteur.
Les mésanges vivent en petits groupes familiaux ou bien éventuellement regroupent plusieurs couples mais dans ce cas il y a toujours un couple dominant. Elles s’octroient un territoire et n’hésitent pas à le faire savoir en se postant à ses frontières et en chantant bien fort elles crient au monde que c’est ici chez elles et qu’il ferait beau voir que d’autres vinssent s’y installer. Sur mon balcon, dont j’ai conclu qu’il appartenait à leur royaume, un couple de mésanges charbonnières avec un jeune viennent plusieurs fois par jour casser une petite croûte.
Comme à la cour du roi, un ordre de préséance doit être respecté. Elles se perchent d’abord dans les arbres qui se dressent devant ma fenêtre, puis l’une d’elle se pose sur la rambarde du balcon tout en agitant la tête dans tous les sens pour parer tout danger, ensuite elle pousse un cri et enfin plonge sur les graines, en prend une dans son bec et file la grignoter sur la branche d’un arbre proche. Après que l’une se soit servie, une seconde se faufile dans le nichoir et c’est le jeune qui se nourrit en dernier. Si par hasard le gamin se servait en premier, l’un des adultes aurait vite fait de s’interposer et renvoyer le jeune à l’autre bout du balcon où il attendra son tour sagement.
Parfois d’autres congénères passent picorer, pendant quelques secondes on s’agite fort en piaillant dans mes jardinières mais tout le monde se sustente, les pillardes s’esbignent et les maîtres du logis retrouvent leurs prérogatives. Quant à moi, converti en maître d’hôtel de ce palace à zozios, je vérifie régulièrement que les mangeoires sont pleines et que la soucoupe d’eau n’est pas gelée.