La flûte enchantée par René Jacobs : (relative) bonne surprise

Publié le 16 décembre 2010 par Philippe Delaide

J'avais quelques doutes (ou préjugés) à propos de la version de la Flûte enchantée de WA Mozart que René Jacobs vient d'enreigstrer chez Harmonia Mundi. J'avais indéniablement été conquis par sa version de Cosi fan tutte (il y a déjà dix ans...), comme celle des Noces. En revanche j'avais vraiment été déçu par un Don Giovanni mené au pas de charge et étais resté sur un bilan assez mitigé sur son Idoménée.

Je dois avouer avoir apprécié une certaine fraîcheur dans sa lecture de la flûte. On y retrouve, parmi les touches personnelles du chef, un continuo avec de belles ornementations au piano forte qui apportent des couleurs intéressantes et insoupçonnées à cet opéra. Le tempo est bien plus raisonnable, et, surtout, l'interprétation procure un rendu cohérent est assez homogène. On aurait pu espérer çà et là un peu plus de mordant chez les chanteurs et le spectre de la lecture apprêtée et éxagérément démonstrative de Nikolaus Harnoncourt (version de 1990 - label Teldec) semble rôder par moment.

La principale faiblesse (de taille diront certains) de cette version réside dans le niveau assez variable des chanteurs. Daniel Behle qui incarne Tamino manque parfois un peu d'épaisseur mais, surtout, le timbre et les limitations techniques d'Anna-Kristiina Kaappola en Reine de la Nuit comme les relatives approximations de Kurt Azesberger dans le rôle de Monostatos sont difficilement acceptables. En revanche, comme à son habitude, le Rias Kammerchor est parfait.

Sinon, cette version bénéficie des timbres un peu "acidulés" qui demeurent la marque de fabrique de René Jacobs sur les opéras mozartiens et d'un beau dynamisme décapant. On se laisse donc tout de même séduire tout au long de l'écoute. Cela aurait été parfait avec plus d'engagement des chanteurs pour incarner des êtres de chair et donner à tout cela un peu plus d'épaisseur humaine.

On dispose donc ici d'une version plaisante, vive, alerte, d'une tenue très correcte mais qui ne révolutionne pas particulièrement la lecture de cet opéra et ne se hisse certainement pas parmi les plus grandes versions, ne serait-ce qu'elle ne restitue que moyennement la part de mystère inhérente à cet opéra.

Lien vers le site Harmonia Mundi pour plus de détails et des extraits.

WA Mozart - Die Zauberflöte - Rias Kammerchor - Akademie für alte musik Berlin - Direction René Jacobs - Label Harmonia Mundi.