Transmartinique: sous le soleil exactement...

Publié le 16 décembre 2010 par Sylvainbazin
Me voilà à nouveau en hiver, dans les frimas métropolitain, après un court mais agréable passage à la Martinique, où j'ai couru et couvert la Transmartinique, une épreuve de 130 kilomètres qui faisait suite au raid Manikou. Le moins qu'on puisse dire c'est que j'ai eu chaud là-bas! Je vous livre un petit récit de mon aventure tropicale:
Au programme une traversée intégrale de l'île aux fleurs qui s'annonçait variée, des montagnes et forêts tropicales du nord aux larges plages de sable blanc du sud, en passant par le côté "agricole" du département avec ses vastes plantations de bananes et de cannes à sucre.
Après un voyage sans encombre en compagnie de mon ami Mohamad Ahansal, nous arrivons à Fort de France où nous sommes accueillis par Pascal, Emile et  du comité d'organisation. Un accueil vraiment très sympathique que nous apprécions beaucoup. Un coup de voiture pendant lequel Emile nous explique pas mal de chose sur son île et nous voilà à St Anne où nous louons une maison. Le soir, nous découvrons la cuisine locale et quelques spécimen d'amateurs de rhum...
La chaleur contraste bien sûr grandement avec le froid polaire que nous venons de quitter. Même pour Mohamad, le prince du désert, l'humidité qui règne ici provoque un vrai changement. Le footing du lendemain me le confirmera: ça va être très dur pour moi de m'acclimater en si peu de temps. Christophe, puis Virginie et Jean-Marc arrivent de Guyane et se joignent à nous.
La dernière nuit avant la course est particulièrement courte: nous prenons la navette prévue à 1h30 du matin pour nous rendre au départ, à l'opposé, tout au nord. C'est donc de Grand rivière que nous nous élancerons au petit jour. L'ambiance est chaleureuse et détendue. Nous sommes aux Antilles! Sur la ligne je retrouve pas mal d'amis et les principaux favoris dont Widy qui m'a l'air très motivé. Il n'est que 6 h du matin mais je trouve déjà qu'il fait chaud!

Les sensations ne sont pas très bonnes dès le départ. Jean-Marc Wojcik, avec qui j'ai partagé tant de foulées tout récemment au Népal, me dépasse rapidement au pied de la montagne Pelée. Il faut souligner que nous attaquons d'entrée par le plus dur question dénivelé. Le volcan est en effet le point culminant de l'île, à 1600m. Les pentes y sont très raides par endroit, surtout sur la fin où nous retrouvons des marches très hautes de pierres et de végétations. En haut, on est dans le brouillard et le vent. Je monte assez tranquillement, ça va encore...
Après avoir pris quelques images au sommet je descends en faisant surtout attention de ne pas trop glisser. L'humidité est très forte et je dois m'arrêter plusieurs fois pour essuyer mes carreaux, je n'y vois plus grand chose. Mais bon j'arrive en bas sans bobos, c'est l'essentiel. Par contre je commence vraiment à sentir la chaleur monter et j'ai du mal...
Sur le sentier des Jésuites, où ça remonte bien raide, je suis carrément porté à ébullition, version cocotte minute sans le sifflet... Le coup de chaud est là. Dans cette atmosphère humide pas moyen de faire redescendre la température. Je continue vaille que vaille, j'aimerai tout de même aller au bout. L'estomac complètement noué je ne peux guère m'alimenter et j'ai des haut le coeur, pas très agréable... Heureusement qu'à cette allure là je peux quand même profiter de la découverte et que l'ambiance est bien sympa. J'essaie de discuter un peu avec mes compagnons de route pour ne pas trop me focaliser sur mes souffrances. Je fais ainsi un bout de chemin avec Anthony, un prof de sport local, puis avec Mehdi Irain. Mehdi, je l'avais déjà croisé à Rambouillet. C'est là qu'il avait commencé le trail. Maintenant, toujours militaire, il est en poste à la Martinique. Nous discutons pas mal surtout qu'il revient du Solu Khumbu Trail (voilà un sujet de conversation tout trouvé!) et ça me relance un peu. Je parviens à rester avec lui jusqu'au grand ravitaillement du Lamentin, qui marque en gros la mi-course. Nous avons quitté la montagne et la forêt tropicale pour nous retrouver dans les champs de cannes et de bananes, le versant agricole de l'île. Le soir est tombé et il fait un peu moins chaud, mais je ne suis pas brillant.

Je repars tout de même en trottinant en compagnie de mes deux acolytes que je laisse filer un peu plus loin. La nuit est tombée et je regarde les lumières de fort de France. Les montées sur le ciment ne sont pas tristes non plus et mon état ne va pas en s'améliorant. Vomissements, spasmes, c'est carrément HS que je rejoins le ravito suivant, à Saint François. J'y reste un bon moment. Je tente d'y retrouver quelques forces et surtout de remettre mon estomac dans le bon sens. J'y retrouve aussi Christian Leroux, coureur de 24 heures très performant rencontré sur le Guyan'trail cette année, qui a préféré arrêté. Finalement au bout de pas mal de temps et malgré le conseil du médecin présent ("de toutes façons tu n'iras pas au bout...") je repars tant bien que mal.
Je dois m'arrêter à plusieurs reprises peu après, je guette les robinets chez les particuliers pour m'arroser un peu. Même la nuit, ça chauffe! Je passe comme un zombie dans la distillerie Clément, que nous traversons, puis parviens tout de même à me hisser cahin-cahan en haut de la dernière grosse difficulté du parcours, le Vauclin. Ca ne va guère mieux mais de toutes façons maintenant je prends vraiment mon temps...
 Je retrouve ensuite Virginie avec qui j'entame la dernière partie de la course, qui nous fait longer la côte par les plages et les savanes. Elle a mal aux pieds mais parait sinon plutôt en bonne forme. Nous restons un bon moment ensemble, passant notamment devant les éoliennes, les seules de l'île, au lever du jour. Mais quand elle décide d'accélérer un peu pour "finir le plus vite possible" je ne peux pas suivre! Je recommence même à ressentir à nouveau les signes du coup de chaud, décidément... J'atteins tout de même le ravitaillement suivant, en compagnie de Corinne, une "métro" installée là depuis 15 ans, qui dispute elle le "défi bleu" (la course de 60 kms partie de Saint-François), qui me confirme que deux jours c'est peu pour s'adapter au climat local. Là, je reste un bon moment sous le jet d'eau et ça me fait quand même du bien. L'estomac va un peu mieux et je repars d'un pied disons un peu plus léger...

Les plages et les savanes s'enchaînent, dévoilant de très beaux paysages côtiers. Les falaises sont parfois découpées comme en Bretagne, ailleurs c'est plutôt la carte postale d'un paradis avec cocotiers qui s'impose. Je rejoins bientôt Marius et nous restons ensemble jusqu'à l'ultime ravitaillement où je ne veux pas trop m'arrêter. Je profite encore un peu du paysage et me traîne ainsi jusqu'à la ligne d'arrivée. Je pense que j'ai vécu là une de mes plus difficiles journée de course pour arriver simplement au bout d'une épreuve, sans bien sûr penser du tout à faire une quelquonque performance. Sans doute la fatigue de l'Himal race y est elle pour quelque chose, mais je pense surtout que le climat m'a joué un bon tour. Enfin ce n'est pas bien grave, j'ai tout de même traversé la Martinique ce qui restait le but du jeu!
Je retrouve les amis, qui à l'exception de Christian ont tous bien mieux réussi. Christophe est 3e, Mohamad 8e, ce qui n'est pas si mal car ce n'est pas non plus son climat, et Jean-Marc 20e et 1er V2! Quant à Widy il a fait la course de sa vie pour s'imposer devant Julien Chorier, qui n'a pas à rougir non plus.
Allez, vous en saurez davantage très bientôt en lisant mes articles! Très prochainement notamment dans running attitude...Et un sujet "avec des images qui bougent" dans le prochain journal du Trail en Janvier! C'est sur Montagne TV bien sûr...