L'une des raisons principales de la désaffection des Français pour les élections de leurs responsables politiques, outre la déception que ceux-ci suscitent chez ceux-la, c'est que dans leur grande sagesse, ils ont compris que les politiques élus n'avaient plus le pouvoir; de fait, ils ont abdiqué en faveur de la toute puissante haute-fonction publique, qui à l'abri des élections et de l'anonymat exerce le réeel pouvoir dans ce pays.
Ainsi, à la grande différence du système américain, où un président élu amène dans ses bagages toute une cohorte de hauts fonctionnaires qui vont s'empresser de mettre en oeuvre les décisions prises par le président élu, en France, les hauts fonctionnaires ne changent pas. Ils sont même d'une grande stabilité par rapport à leurs ministres de tutelle dont la durée de vie dépasse rarement plus de 30 mois. C'est pourquoi ils peuvent se permettre d'entamer un bras de fer avec le dit ministre quand les dispositions à mettre en place ne leur plaisent pas. Et dans plus des 2/3 des cas, l'issue de la confrontation est en faveur de ces grands commis de l'Etat, au détriment des élus du peuple.
Alors qu'on parle d'Administration Bush ou d'Administration Obama, rien de tel en France: il n'y a pas d'administration Sarkozy, comme il n'y avait pas eu d'administration Chirac ou Jospin.
C'est à mon sens l'un des problèmes majeurs de notre système, qui empêche toute réforme profonde, et qui, en même temps, est un déni de démocratie. Ce constat, que de plus en plus de Français ont fait et intégré, détourne nos concitoyens des urnes ou, pire, les pousse dans les bras de l'extrémisme, seule solution à leurs yeux pour faire table rase de ces beaux messieurs qui, inconnus du grand public, à l'abri confortable de leur anonymat, décident en toute quiétude de l'avenir de la France.
Et comme ils sont ceux qui profitent le plus du système établi, il n'est pas surprenant qu'ils ne se précipitent pas pour le faire changer. C'est bien pourquoi, le plus souvent, un ministre passe plus de temps à se battre à l'intérieur de son ministère pour faire accepter sa feuille de route, qu'à l'extèrieur pour convaincre du bien fondé de ses réformes. Nous avons tous en mémoire l'exemple de Christian Sautter qui, succèdant à Dominique Strauss Kahn en novembre 1999 comme ministre de l'Économie, des Finances et de l'Industrie chercha à mettre en place une réforme du ministère des Finances prévue par son prédécesseur; ce qui lui valut une grève des fonctionnaires placés sous son autorité et provoqua son remplacement trois mois plus tard par Laurent Fabius. Et pourtant, nous étions dans un gouvernement socialiste, dirigé par Lionel Jospin.....
Pour changer la France, commençons par changer ce système, et rendons les haut-fonctionnaires révocables, afin que le pouvoir politique, élu démocratiquement par le peuple, aie enfin les moyens et le pouvoir de gouverner et de réformer notre beau pays.