En résumant de manière simpliste, toute entreprise a pour ambition de « Faire mieux, plus vite et moins cher ». Ce slogan, issu de la révolution industrielle, a donné naissance à de nombreuses méthodologies d’optimisation de processus, de maîtrise des coûts ou de
rationalisation de l’organisation au cours des deux derniers siècles.
De l’industrie au service, une transformation est en marche
Le secteur secondaire, automobile, aéronautique, électronique, etc … a été le premier à mettre en œuvre des méthodologies du type Lean, chez Toyota ou du type 6 Sigma, chez Motorola. Mais depuis une dizaine d’années le secteur tertiaire commence à adapter ces méthodologies au contexte des prestations de service. L’un des exemples le plus flagrant est la forte mutation qu’est en train de vivre le métier d’assureur. Cette mutation est portée par une industrialisation importante de son activité toute entière.
En effet, sous la pression de l’environnement commercial, c’est-à-dire l’exigence des clients ou la diversité de l’offre, de la pression concurrentiel des bancassureurs par exemple, et de celle des actionnaires, les assureurs cherchent à améliorer la qualité du service rendu dans un premier temps et dans un deuxième temps à développer une offre innovante. Et ce, en améliorant la performance globale de l’entreprise. L’une des réponses à ces enjeux est l’industrialisation de l’assurance, qui par rapport au secteur bancaire, n’a pas atteint la même maturité sur le sujet.
L’industrialisation comme source de réflexion stratégique
Cette industrialisation consiste à mieux maîtriser les interactions entre les cinq familles d’éléments qui composent toute organisation : la Stratégie (enjeux, objectifs, …) la Structure (organisation, fonctions, …), les Systèmes (production, information, …), le Social (choix des hommes, des compétences, …) et la Culture (valeurs, comportements, …), avec pour finalité l’amélioration de la valeur intrinsèque de l’entreprise dans un environnement économique et social de plus en plus hostile.
En partant de la chaîne d’activité de l’assurance qui définit tout ou partie des métiers de l’assurance, les assureurs sont amenés à construire des modèles économiques qui dépendent de plusieurs facteurs environnementaux : économiques (concurrence, besoins des clients, …), technologiques (systèmes d’information, nouvelles technologies de communication, …), sociétaux (démographie, modes de vie, …) et réglementaires (cadre juridique, fiscalité, …). Ces modèles économiques correspondent à l’élément « Stratégie » du modèle organisationnel ci-dessus et ils peuvent prendre plusieurs formes :
- Modèle 1 : Bancassureur, dans lequel l’activité de « Distribution » est réalisée par la banque alors que l’assureur conserve les activités de « Création de l’offre », « Gestion des clients » et « Prestation de services »,
- Modèle 2 : Multicanaux, dans lequel l’assureur distribue ces produits sous plusieurs marques et / ou plusieurs réseaux,
- Modèle 3 : Mutualisation, dans lequel l’assureur met en place une structure commune pour réaliser une activité, par exemple « Gestion clients », pour le compte de plusieurs autres marques
- Modèle 4 : Assurance / assistance, dans lequel l’assureur externalise les prestations de services d’assistance
La réflexion des assureurs sur le choix d’un modèle économique initie l’industrialisation du métier d’assureur dans la mesure où l’assureur va choisir de se concentrer sur son activité cœur de métier, dans un environnement socio-économique donné, pour être plus performant que ses concurrents.
Une fois mise en œuvre, la démarche d’industrialisation de l’assurance permet d’accroître la vitesse d’exécution des processus de bout en bout, tout en réduisant leur variabilité, c’est-à-dire les changements de niveau de qualité d’un même service ou produit à la suite de plusieurs sollicitations identiques, par exemple une « Demande de remboursement ».
En pratique, cette démarche d’industrialisation impacte tous les maillons de la chaîne d’activité.
A titre d’exemple, pour la création de l’offre d’assurance-vie, l’industrialisation va permettre d’harmoniser les conditions générales des produits pour mieux maîtriser les risques d’écart actif / passif et simplifier leur exploitation c’est-à-dire leur création, utilisation / interprétation et leur modification. Il s’agira par exemple de structurer ces conditions générales selon une date de référence unique, par exemple la date de réception des fonds, un cours de référence unique, par exemple le prochain cours connu et un délai de référence standard, pour contribuer à l’harmonisation de l’ensemble des conditions générales des produits de l’entreprise et permettre d’accélérer les processus de distribution et de gestion.
En revanche, pour la gestion des contrats, l’industrialisation va permettre, par exemple, d’automatiser la collecte et l’intégration des Opérations Sur Titre (OST) dans les systèmes de gestion des contrats afin de réduire les anomalies sur contrat dans le cadre des inventaires semestriels ou annuels.
Et de la même manière sur les activités de gestion des actifs, l’industrialisation va permettre une automatisation des échanges avec les partenaires financiers (dépositaires, valorisateurs, délégataires, …), une sécurisation de la constitution et de l’émission des carnets d’ordre et une simplification des échanges avec le « Passif » pour notamment optimiser la gestion opérationnelle des actifs et contribuer à l’adéquation actif / passif.
L’industrialisation comme levier opérationnel de performance
L’industrialisation se poursuit par la définition, la mise en place et le suivi de processus dont la finalité est la satisfaction client et la performance humaine, technique et financière de l’entreprise. La gestion, c’est-à-dire la définition, la mise en place et le suivi de ces processus, s’organise autour des quatre éléments du modèle organisationnel : la Structure, les Systèmes, le Social et la Culture :
- Pour l’élément « Structure », il s’agit de standardiser le fonctionnement des organisations (direction, services, fiches de poste, …),
- Pour l’élément « Systèmes », il s’agit d’optimiser les moyens de communication (SI) et de production (contrats, valeurs mobilières, …),
- Pour l’élément « Social », il s’agit de rationaliser l’allocation des compétences,
- Et enfin, pour l’élément « Culture » il n’y a pas de leviers directs mais les actions sur les autres éléments l’impactent.
Les actions réalisées sur ces quatre éléments vont permettre de réduire tout type de gaspillage, comme les actes redondants ou les interfaces trop nombreuses induisant souvent de longs délais d'attente. Ces gains de productivité sont à l’origine de l’amélioration de la performance globale des processus.
Crédit photo : Christian Carollo/Stock Exchange