Qu’on se le dise, le cinéma roumain à défaut d’être (re)connu regorge de talents auquel le discret mais non moins doué Radu Muntean mérite entièrement sa place. À l’instar de son compatriote Cristian Mungiu (4 mois, 3 semaines et 2 jours, Palme d’Or en 2007), le réalisateur signe avec Mardi, après Noël une œuvre de cinéma sensible, aussi bien émouvante que dérangeante par son incroyable réalisme et sa grande cruauté.
Dans la lignée de son précédent long-métrage (Boogie, 2008), Muntean filme les arcanes du couple et de l’adultère en nous racontant ici l’histoire de Paul (Mimi Branescu) et d’Adriana (Mirela Oprisor), ensemble depuis dix ans ; ils forment avec leur fille Mara (Sasa Paul-Szel) une famille aimante et unie. Mais Paul entretient également une relation amoureuse avec Raluca (Maria Popistasu), une dentiste âgée de 27 ans qu’il a rencontrée cinq mois plus tôt. Le jour où les trois adultes se retrouvent pour soigner les problèmes dentaires de la petite Mara, Paul prend conscience que la situation ne peut plus continuer ainsi. Il décide alors de révéler à sa femme sa liaison avec Raluca…
Le quatrième long-métrage de Radu Muntean s’ouvre sur une séquence de la vie intime d’un couple : deux individus, nus, allongés dans ce que l’on pourrait croire, à première vue, être le lit conjugal. Il en sera ainsi tout au long du film. Le réalisateur roumain a pris le soin de filmer minutieusement les scènes de la vie quotidienne du couple et, plus largement, de la famille. Entre les hésitations sur le choix des cadeaux ou le sapin de Noël, les rendez-vous chez le dentiste ou encore les repas en famille, Mardi, Après Noël trouve lentement son rythme dans le réalisme de ses séquences. Un choix qui à priori peut sembler être éculé et ennuyeux mais se révèle particulièrement judicieux parce qu’il permet au réalisateur de se concentrer sur la pertinence et la justesse des échanges, qu’ils soient physiques ou verbaux, entre les personnages.
Muntean nous épargne les lieux communs sur l’adultère en traitant le sujet avec tact et intelligence, sans tomber dans un manichéisme primaire où, d’un côté, nous aurions les bonnes personnes et de l’autre, les mauvaises. En insistant sur ce paradoxe inhérent de la relation amoureuse, celui de savoir faire des concessions tout en continuant à assouvir ses propres désirs et volontés, Muntean invite son spectateur à s’interroger sur la manière et la possibilité de pouvoir concilier les deux.
Faut-il vivre sa relation comme un amour passionné au risque de l’épuiser rapidement ou, au contraire, maîtriser ses envies et raisonner ses passions mais au risque de l’épuiser lentement ?
Sortie en salles le 8 décembre 2010