Elle dessine bien les feuilles de bambou. Celles qui font face au vent.
On se blesse souvent en travaillant le bambou. Pour cette raison, cet artisan explique qu'il faut faire corps avec la matière plutôt que lui opposer une résistance.
Cet autre artisan qui fabrique des sifflets pour le football ne regarde pas les matchs. Il les écoute. Pour s'assurer que ça siffle bien.
Ce fabriquant d'éventails, lui, dit "souffler la vie" quand enfin il colle le papier sur la monture.
En japonais, on dit de la passion qu'elle peut "coaguler" (koru) sur un objet ou sur une activité.
Dès qu'il y a du feu, il y a du hasard. Parfois, juste avant d'ouvrir son four, cette céramiste fait une courte prière.
Elle dit que pour que la forme soit pure, il ne faut pas sans cesse déranger la terre car elle a de la mémoire. Au cours de la cuisson, elle peut retrouver des formes qu'on lui a imprimées en la modelant.
Les Japonais décrivent les choses d'une façon étrangement naturelle : le verre est un bourgeon, le bol une fleur un peu ouverte, l'assiette une fleur épanouie.
Oui, j'ai remarqué cela l'autre jour avec des tulipes.
Ils décrivent aussi les mains des bébés comme des feuilles d'érable.
Mais à partir de quel degré d'épanouissement un verre devient-il un bol ?
Ito NAGA
extrait de Iro mo ka lo, la couleur et le parfum
Photos prises au musée National de Tokyo à Ueno (mai 2010)