Journal d'une גme : L'arc-en-ciel (12-12-2010)
Photo du blog Territoire inconnu
Aujourd’hui : journée familiale. Un après-midi en présence de tous mes frères et sœurs, beaux-frères, belles-sœurs, et parents.
Une joie de se retrouver, manifestée en cela par des regards entendus, des sourires complices, des discussions teintées d’humour et de rire ; parfois des conversations plus graves aussi – profondes.
Nous formons une famille dont la nombreuse descendance demande encore soin et attention ; ils sont encore tous si petits.
Une fratrie unie dont chaque membre est un être à part entière, ne se fondant nullement dans la masse, mais au contraire, se démarquant par une personnalité qui est sienne ; une vie qui lui est propre, avec son lot de souffrances et de joies.
Une bonne dizaine de cœurs battaient en concert dans les retrouvailles ; et je ne pouvais ignorer certains maux tus chez l’une, d’autres douleurs intenses qui mordaient l’âme depuis tant d’années, et d’autres afflictions récentes, fulgurantes, déchirantes, qui embuaient les yeux furtivement.
Ces cœurs battaient la chamade dans un silence assourdissant.
Si les paroles et les gestes restent pauvres face à tant de vie, les âmes, au moins, peuvent se toucher l’une l’autre.
Au-delà des traits d’humour et des blagues moisies, des bougies soufflées et des hourras !, cogne une communion des cœurs par le sang.
Pour la seconde fois, je suis sortie sur la terrasse avec l’une ou l’autre de mes sœurs, beau-frère, histoire de me griller une cigarette.
Ca discutait. De tout et n’importe quoi. Un signe révélateur, notamment, de cette proximité qui permet de parler de tout – et de rien.
Alors que nous étions dehors, j’observais le lointain. J’avais le cœur en arrêt face à cette lumière extraordinaire qui s’offrait à nous.
Une pluie fine rayait un ciel azur s’étirant en pénombre tandis que les rayons de l’astre éclairait les bouleaux du jardin.
C’était comme si un voile translucide reposait sur une partie de la terre. Ce manteau de lumière, en frôlant les arbres, l’herbe, le toit des maisons, les rendait étincelants. Le contraste de cette clarté avec le ciel qui s’assombrissait était d’une beauté inouïe.
La pluie se fit plus insistante ; la lumière plus tourmentée.
Un arc-en-ciel apparût.
Net. Tranchant entre l’azur et la pénombre. Imposant ses couleurs resplendissantes.
Je restais là, à contempler.
La respiration coupée.
Lentement, je détachais les tons de l’arc-en-ciel et instinctivement, j’en intégrais les symboliques.
Au-dessus de nos têtes, la pureté et l’équilibre, la passion et l’amour, la créativité et l’optimisme, la joie et la vie, l’espérance et l’apaisement, la sagesse et la sérénité, la douceur et le rêve et la spiritualité, tendaient vers un ciel inquiet.
Entre ombre et lumière, les émotions les plus variées de l’être coloraient la voûte céleste. Elles se hissaient avec force et douceur, passion et sérénité, dans une sorte d’énergie apaisante.
L’arc-en-ciel, issu de la terre des hommes, aspirait à l’infini puis, doucement, plongeait à l’autre bout du monde, là où mon regard butait sur l’horizon. Là, où les hommes le foulait du pied.
Une dizaine de minutes seulement, le temps de la fumer cette cigarette, que je ne bronchais pas ; que j’étais parcourue d’émotions face à tant de grandeur.
Je me disais, alors que je regardais tout cela, que la création, pour peu qu’on s’arrête, conduit à la grâce.
Et que mon âme frissonnait devant la grâce engendrée par la création.
Et je me disais, en remarquant, au loin, deux colombes noires – probablement des ramiers – qui traversaient l’arc-en-ciel et les rideaux de lumière, que c’était comme si Dieu avait posé son bras sur les épaules du monde.
Savina