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Bret Easton Ellis, né à Los Angeles en 1964, est devenu le romancier culte que l’on connaît désormais pour ses livres précédents dont mon préféré reste de loin : «American Psycho »Chacun de ses romans est un événement et celui-ci, le septième, sera bientôt exploité à son tour par le cinéma, n’en doutons pas! C’est la suite du premier livre de l’auteur, «Moins que zéro» écrit à 21 ans en 1985. Il y reprend les mêmes personnages qui ont désormais la quarantaine et qui, de jeunes étudiants à la dérive, drogués, paumés, débauchés, riches, vides et violents à souhait qu’ils étaient alors, sont devenus écrivains, scénaristes, producteurs de cinéma, protecteurs d’escort-girls ou autres vagues occupations hollywoodiennes. Blair, Trent, Julian, Rip se retrouvent toujours dans le même cercle mais si leur physique a changé grâce à la chirurgie esthétique, leurs solitudes, leurs méfiances, leurs délires et addictions de toutes sortes sont restés les mêmes. Leur vie à tous s’organise toujours autour de la recherche de l’argent, du sexe, de la drogue, des médicaments, de l’alcool jusqu'à sombrer systématiquement dans la violence la plus atroce! Plus leur apparence et leur environnement semblent glamour, plus leur vie est laide, vide et monstrueuse. Clay revient à Los Angeles après un long séjour new yorkais. Il y retrouve ses compagnons de jeunesse. Désormais devenu l’un des producteurs de son dernier scénario et participant au casting du film, il fait miroiter un rôle à la jeune Rain Turner, actrice sans talent mais très belle. Celle-ci ne lui cède que par ambition. Il fait tout pour la retenir mais très vite il se sent observé, suivi et épié par une mystérieuse voiture bleue. Il reçoit des sms, inquiétants et menaçants. Bientôt ses amis ou leurs connaissances meurent violemment autour de lui. Tous semblent en savoir davantage et le mettent en garde contre cette fille qu’il poursuit. Bientôt la fin s'annonce en accéléré : disparitions, scènes de sexe, recherche d’argent, de drogue, de reconnaissance, rencontres étranges dans des coins reculés et à des heures indues, morts violentes ! Curieusement pas de policiers ni d’enquête en vue dans cette histoire pourtant un vrai polar parmi les plus noirs.Les personnages, dignes des pages de mode et des célébrités glamour des années fin de siècle, sont tous malheureux, vides mais dangereux aussi, à la fois manipulés et manipulateurs. Clay en particulier est constamment sous l’emprise de la drogue ou de l’alcool, « un verre de tequila à la main, « pété », « allongé sur mon lit en train de boire la deuxième bouteille de gin », mais toujours raffiné question apparence! Malgré l'impression de relire une histoire déjà vaguement connue, je suis une fois de plus retombée sous l"emprise hypnotique du style de l'auteur! L'histoire est horrible, cynique, désespérée, amorale,écœurante, triste, inquiétante, tout ce que l'on veut mais écrite de telle façon que je n'ai jamais eu envie d'arrêter de lire. Ecrit en paragraphes courts, dans un style très sobre, non dénué d'humour, ce roman se lit à toute allure, entraînant son lecteur dans une spirale qui ne peut s'arrêter qu'une fois atteint le gouffre de l'enfer! Une expérience! Suite(s) Impériale(s) deBret Easton Ellis (Robert Laffont, 2010, 228p). Traduit de l’anglais (Etats-Unis) parPierre Guglielmina.Titre original : Imperial Bedrooms