Se blottir dans les ornières du présent et de son propre espace individuel, communautaire ou national restera toujours la meilleure façon de s'interdire de penser.
Car toute réflexion suppose la distance, une capacité à se mettre dans la position de l’autre -fut-il pour soi-même un adversaire. Et il ne s’agit pas là de cette tolérance dont les imbéciles se targueront toujours mais plutôt d’une stratégie pour anticiper ce qui a quelque chance d’advenir et de se fourbir quelques armes pour y faire face.
N’être jamais là où il faut être c’est se placer délibérément du mauvais côté de la barrière, dans un amoralisme revendiqué, dans un geste provocateur absolu mais c’est lui qui permettra pourtant à la pensée cette liberté de contredire pour qu’elle puisse s’édifier et se formuler.
Force est de constater que le troupeau se précipite toujours sur les mêmes idées en s’aliénant à la mode du moment.On sera pro juif, anti arabe, pro ou anti sarkoziste de façon grégaire, pour appartenir à un camp.Mais, bizarrement, on s’apercevra que ceux-ci ou ceux-là pensent peu ou prou la même chose et qu’ils s’aliènent aux règles d’un même jeu qu’ils soient d’un côté ou de l’autre du filet.
Bien sûr les postures varieront, on arborera ici l’étendard de l’un ou, là, les psalmodies du camp adverse. Mais penser est autre chose et bien souvent l’engagement revendiqué n’est rien d’autre qu’un enfermement dans une communauté d’intérêt ou dans une naïveté partagée.
Or tous les commentateurs brandissent leur point de vue pour éclairer les faits quand ceux-ci devraient, au contraire, définir une opinion.
Par exemple si je dis que les juifs représentent 0,25% de la population de la planète, d’un coté du filet on me dira qu’une telle minorité ne peut disposer d’un grand pouvoir et de l’autre côté on me dira que ce 0,25% est décidément bien bruyant au point de rendre bien remuants quelques 2 milliards de musulmans. L’objectivité d’un chiffre suffira à placer deux communautés face à face et aussitôt un débat, voire un combat, s’instaurera.Ou pire, donner ce pourcentage sans autre commentaire fera que dans un camp on me traitera d’antisémite et, dans l’autre, de suppôt du sionisme !
Prendre de la distance c’est aussi mettre en parenthèse nos certitudes philosophiques aussi confortables soient-elles.
Ainsi nos fameux « Droits de l’Homme »… dont on oublie qu’ils furent imposés sous le couperet de la guillotine et que le droit de manger peut parfois passer avant le droit de s’exprimer.
Le gars qui crève de faim en trimant au fond d’une mine peut bien se rassurer en se disant qu’il peut librement protester contre l’injustice qu’il subit mais, s’il ne se libère pas physiquement de ses maîtres ,sa liberté ne sera qu’une chimère et sa liberté d’opinion ne sera jamais qu’une justification pour ceux qui l’oppriment.
Alors parlons un peu de la Chine ! Comme c’est consensuel, n’est-ce pas ! De droite à gauche et partout ailleurs, on ne discute rien, on condamne. Et bien je défendrai donc ici la Chine.
Je cite Wikipedia :
« La Chine est le pays qui exécute le plus de prisonniers dans le monde et les exécutions ont tendance à diminuer depuis quelques années. Selon Amnesty International, 2/3 des condamnations à mort du monde sont exécutées en Chine[6] ; l'ONG annonce au moins 1 010 exécutions pour l'année 2006, 10 000 selon Human Rights Watch. Selon le secrétaire général de l'ONU, la Chine, qui a la plus grande population du monde avec 1,3 milliard de personnes, était au septième rang en termes de nombre d'exécutions effectuées par rapport à la population globale entre 1994 et 1999, derrière Singapour, l'Arabie saoudite, la Biélorussie, le Sierra Leone, le Kirghizistan et la Jordanie[7]. »
Mais entre 2000 et 2009 ce ne sont pas moins de 600 personnes qui furent exécutés aux USA. Un chiffre inférieur, certes, mais qui me révolte davantage pour un pays qui a depuis longtemps trouvé sa stabilité politique et économique.
La Chine a dû s’extraire de la misère avec une vitesse vertigineuse, même de façon partielle, et cela n’a pu se faire que par des solutions radicales, choquantes…
Et n’oublions pas ce que sont les soubresauts de l’histoire.N’oublions pas les 10000 ou 11000 exécutions lors de l’épuration alors que la Libération demeure notre grand mythe national !N’oublions pas qu’au nom de la Démocratie on exécuta les Ceausescu !
Mais la Chine, elle, est sommée de penser selon notre présent, selon notre espace, selon notre histoire !Et jamais dans la presse une voix divergente ne pourra se faire entendre. Jamais on n' accordera à ce pays la moindre qualité... Lisez partout ce même racisme rampant!
Je ne dirai jamais que ce pays est un modèle mais a-t-il jamais eu prétention à l'être? Est-il certain que sa politique ne soit pas dans l'intérêt de son peuple? La chine serait -elle une nation guerrière, engagée dans quelque conflit armée? Interviendrait-elle agressivement sur nos valeurs ou nos propres affaires?Non. Et pourtant, selon le choeur des médias, elle serait la grande menace!
Je m’insurge donc contre le fait que la liberté d’expression soit bridée au point de définir le bien ou le mal de façon sommaire, sans réflexion, mais toujours selon notre jugement forcément supérieur !
Alors, oui, provisoirement en tout cas, vive la Chine !