Magazine Cuisine
Ce soir, réunion du Gunthard Club pour un debriefing du salon du Grand Tasting qui s'est tenu ce week-end au Carrousel du Louvre. Pour l'occasion, l'ami Oliv avait convié notre grand apothicaire helvéto-belge, fondateur du Gaspart Club, monomaniaque de l'Alsace et de son cépage riesling, l'inénarrable Patrick B., tout droit arrivé de Bruxelles avec une caisse de contre-bande qui a justifié un interrogatoire digne de la Gestapo de la part de nos bons douaniers des rails (contrairement à l'histoire de Fernand Raynaud, il semble bien qu'ils aient été à la fois imbéciles et douaniers sur ce coup ). Que d'histoires pour un carton de 6 bouteilles de vin et quelques chocolats belges - mais c'est Vigipirate en France !
Plus de peur que de mal, le terroriste présumé (dont la généalogie n'est pas établie avec certitude : 4 nationalités pour 4 grands-parents) a montré patte blanche et a été libéré à temps par la maréchaussée. Et c'est indemne et en pleine forme que nous le retrouvons pour cette soirée.
Nous avons également accueilli avec grand plaisir son compère Laurent et son épouse Brigitte, qui nous ont fait découvrir (entre autres) un bien joli vin libanais (voir article complet ici).
Passons ensuite aux choses sérieuses (tous les vins ont été servis à l'aveugle).
Les vins blancs.
Saint Joseph blanc, Fleur d'Avilleran 2008, François Villard. Un nez très vanillé, avec des notes de fleurs presque capiteuses (Jasmin, Lys). Perception de boisé assez développé. La bouche est ronde, molle, courte et manquant clairement d'énergie. Une relative déception qui semble confirmer des élevages peut-être trop ambitieux pour une matière en retrait (j'ai ressenti une impression similaire, il y a peu, sur un Condrieu du même producteur). Moyen.
Vouvray, Fleuve blanc 2005, Jean-François Mérieau. Un nez sur des fragrances anisées, plus typées fenouil que "pastis". Belle minéralité, presque épicée. La bouche est fraîche, longue, tendue et élégante. Bien +.
I.G.T. Sicilia, Carjanti 2007, domaine Gulfi. Un nez presque bourguignon, sur les amandes grillées, légèrement beurré. En bouche, l'attaque est tendue ... mais devient trop rapidement ronde, presque sucrée. Malgré une persistance intéressante, la rétro-olfaction moelleuse gâche le plaisir. Assez Bien.
Alsace Grand Cru, Riesling Clos Saint Urbain, Rangen de Thann 2007, Zind-Humbrecht. Un nez assez retenu, mais typiquement 'riesling', quelques notes pétrolées sur un fond citronné élégant. Les fruits exotiques apparaissent après aération. La bouche est magnifiquement tendue, sans astringence. Elle est élégante, complexe et révèle une belle maturité "à point". Très belle finale, sur l'ananas et le pamplemousse. Très Bien (merci Patrick).
Alsace Grand Cru, Riesling Hengst Samain 2005, Josmeyer. Nez très pétrolé, presque confit, à la limite de la sur-maturité. La bouche manque de puissance et semble plus molle que le précédent vin. Finale douce-amère qui confirme une impression en demi-teinte. Bien +.
Sancerre, La Grande Côte 1998, Pascal Cotat. Un nez un peu bizarroïde, à mi-chemin entre le riesling et un blanc en sous-maturité (buis vert / végétal). En bouche, j'ai ressenti un gros décalage d'avec le nez : acidité et légère sucrosité. Un vin nettement dissocié. Moyen.
Les vins rouges.
D'une façon collégiale, nous avons choisi de commencer par les vins les plus charpentés, pour finir par les plus élégants.
Pic Saint Loup, Les Glorieuses 2006, Clos Marie. Nez foxé et sur le foin, avec une légère sensation épicée. La bouche est énorme, sucreuse, avec une acidité (trop ?) importante. Finale épicée et un peu amère. Clairement pas mon type de vin.
Coteaux du Languedoc, Roc d'Anglade 2000. Un nez chimique désagréable (type cyclohexanone - chuuuttt : pas de commentaire !). Bouche sans intérêt pour moi, toujours sur cette impression de sirop pour la toux des années 1960 (Patrick, help me). Finale médicinale amère. Aucun intérêt.
Châteauneuf du Pape, 2008, domaine Charvin. Un nez gourmand, floral, fruité (fruits rouges) et épicé. Une bouche magnifiquement élégante, mêlant les fruits rouges, les épices douces et la garrigue. Belle corpulence, sur une minéralité qui tient le vin. Très Bien.
Châteauneuf du Pape, 2008, Clos Saint Jean. Un vin too much pour moi (et pour mon voisin de droite avec qui nous partageons un certain nombre de goûts en matière de vin). Pas mal de chose que je n'apprécie pas dans ce style : épaisseur, extraction poussée, sucrosité écœurante. Bof.
Morey Saint Denis, 2001, Hubert Mugnier. Grâce (?) à l'ami Oliv, nous avons eu le droit à deux exemplaires de ce même cru, mais de provenance et de conservation différentes. Première bouteille : la quintessence du grand Côte de Nuits, un nez qui pinote gentiment, avec une touche réglissée salivante. Une bouche fraîche, élégante, fruitée, grâcement charpentée. Une finale longue et fine. Bien +++. Seconde bouteille : un vin beaucoup plus strict, plus raide et qui assèche nettement en finale. Assez Bien. Comme quoi, d'une bouteille à l'autre parfois ...
Volnay, Clos des Santenots 1992, Jacques Prieur. Nez un peu discret, limite déviant que j'interprète comme Bret / foin. Attaque en bouche assez corpulente, mais qui se termine trop rapidement. Légèrement acide. Une déception. Assez Bien.
Saumur Champigny, Les Rogelins 1995, René-Noël Legrand. Le nez semble pinoter, mais la bouche est acide et un peu raide. Se termine assez rapidement sur des notes de sécheresse. Bof.
Hermitage, Le Gréal 19995, Marc Sorrel. Je suis passé complètement à côté de ce vin. Bof bof bof ...
Vin du Liban, Château Musar 1990. Un joli nez fondu, sur les cerises à l'alcool, le kirsch et le sous-bois. Belle bouche élégamment réglissée, sur une charge alcoolique imposante mais mesurée et sans déséquilibre ni sensation de chaleur. Fraîcheur épicée, soyeux en bouche et bel équilibre. Très Bien (merci Laurent).
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Passons ensuite aux deux curiosités de François et Gwenola.
Turriculae, produit à Beaucaire par un archéologue vigneron (à moins que ce ne soit le contraire). Une boisson à base de raisins fermentés, telle qu'on pouvait la produire à l'époque romaine. Comment dire, cette impression de noix verte, pas mûre et acide ne m'a pas emballé du tout. Peut faire penser à un mauvais vin jaune (c'est vous dire).
Vernaccia di Serrapetrora, Alberto Quacquarini. Un rouge pétillant, qui associe des impressions de sucre et d'amertume. Pas mon truc.
Enfin, une douceur pour la route.
Sauternes, château Guiraud 1988. Un beau Sauternes, rôti, abricoté sans lourdeur, corpulent mais sans lourdeur, avec une finale douce-amère sapide. Très Bien.
Voilà, une nouvelle soirée passée sous le signe de la bonne humeur, de la convivialité et de l'amitié. En prime, nous avons fait plus ample connaissance avec quelques amis belges qui, pour une soirée (et une nuit si affinités), se sont hissés à notre niveau, tant pour les blagues que pour le partage.
Bruno