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C'est un drôle de phénomène que celui du décalage horaire. Je ne parle pas du mouvement de la planète, je parle de ce 'centrisme' qui nous amène à perdre la perspective que les autres ne sont pas à la même heure, à la même page. Quand je me couche, c'est la fin de l'après-mdi en Ayiti, les grosses nouvelles ne sont pas encore publiées et mes amis-collègues n'ont pas terminé leur journée. Pour dire vrai, ils ont passé les 3 derniers jours à la maison, il pleut des cailloux, ce n'est pas très bon pour les carrosseries. La journée commence ici quand en Ayiti tout le monde dort profondément. Au levé, on a accès aux nouvelles de la veille. J'apprends que Martelly et Manigat ne participeront pas à l'exercice de recomptage proposé par le CEP… Attendons que les résultats commencent à émerger, il est toujours temps de changer d'idée. Rappelons-nous le passage du 28 au 29 novembre ! Il faut fouiner quelques heures sur le site du CEP où des résultats assez détaillés sont présentés pour arriver à tirer quelques conclusions éclairantes de ces milliers de documents disponibles. Dans la ville de Jacmel par exemple, on constate (ça mérite sûrement une validation) que seulement 8 des 39 PV ont été comptabilisés, dans la ville du Cap-Haïtien, on a comptabilisé 51 des 53 des PV. Qui fait ces analyses grossières et simplistes pour donner quelques nuances de gris dans l'analyse binaire qui prévaut actuellement ? Quelle est la proportion exacte des PV non calculés ? Comment cette proportion varie d'un département à l'autre ? D'une commune à l'autre ? Peut-on identifier les bureaux de vote les plus 'délinquants' ? Quelle était la répartition des votes dans ces bureaux de vote ? Parmi les PV que Martelly a entre les mains depuis le 29 novembre et qui lui permettent de se déclarer vainqueur, combien ont été rejetés ? Rejetés par qui : l'équipe responsable de la fabulation ou par le CEP ? Quel est le rôle de la communauté internationale (fort présente au centre de fabulation) et celui du CEP dans la diffusion des résultats ? Entre l'engagement du CEP de recalculer les procès verbaux, et l'étonnement de l'ambassadeur américain face aux résultats, il y a encore tout un décalage. Comment l'État haïtien et la communauté internationale feront cette prochaine valse ?