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Molly HARPER - Nice Girls - Nouvelle INEDITE EN FRANCAIS

Par Eden2010
Molly HARPER - Nice Girls - Nouvelle INEDITE EN FRANCAIS

J’ai la joie de vous proposer ici, inédit en français, une short storyde Molly Harper, auteur américain de Bit-Lit extraordinaire dont je vous ai déjà parlée dans mon commentaire « Nice Girls don’t have fangs » (que vous avez bien sûr lu ….. !!).

Je précise que la traduction ainsi que la publication de cette nouvelle sur ce blog ont été autorisées par Molly Harper. Vous trouverez d'ailleurs la version originale sur son site :http://www.mollyharper.com/

Pour simple rappel : Jane a récemment été transformée en vampire, après avoir été abattue par un homme ivre qui l’avait confondue avec un cerf. Gabriel, un vampire, l’a donc changée pour la sauver. Ils ont connu des hauts et des bas, elle a, en vain, tenté de garder sa famille dans l’ignorance de sa situation et de faire comme si tout était normal, mais le fait est que désormais c’est officiel : elle est morte et va vivre avec Gabriel.

Pour vous donner une idée de l’ambiance de ces livres : vous connaissez bien sûr la « Communauté du Sud » de Charlaine Harris, la série des Sookie Stackhouse ? Et bien, maintenant imaginez la même chose, sauf que Sookie, Eric et Bill se prennent beaucoup moins au sérieux. Cette série pourrait bien détrôner la Communauté du Sud ou du moins l’égaler.

Bref, voici l’occasion de vous faire une idée, de rencontrer Jane, son créateur Gabriel, son ami Zeb et sa femme loup-garou Jolène, Dick le vampire et sa femme Andrea, elle aussi pourvue de crocs.

Cette nouvelle s’inscrit donc dans la "Les filles bien", malheureusement encore inédite en France, et se déroule après le troisième tome (Nice Girls don’t live forever). Mais vous pouvez sans aucun problème la lire sans vous gâcher le plaisir de lecture des romans que je vous recommande d’ailleurs chaudement.

Voici donc LES FILLES BIEN NE SIGNENT PAS DE BAIL SANS ALLIANCE, une nouvelle de Molly HARPER traduit par EDEN.

Les filles bien ne signent pas de bail sans alliance

Tous les cartons de Gabriel portaient l’inscription : « conneries ennuyeuses ».

Leçon de déménagement numéro 1 : ne jamais laisser Dick Cheney-le-vampire s’emparer d’un marqueur.

«  Je comprends bien que déménager dans l’après-midi ne faisait pas partie de nos options, compte tenu de ce petit facteur d’inflammabilité, mais est-ce que nous sommes vraiment obligés de le faire littéralement au beau milieu de la nuit ? », se plaignit mon meilleur ami, Zeb, en ronchonnant pendant qu’il soulevait un carton marqué “conneries encore plus ennuyeuses” sur les marches du perron de River Oaks.

« Zeb, ça fait trois fois que je te le répète, nous ne déménageons pas Gabriel à cette heure-ci pour des motifs solaires. Ceci est une opération absolument secrète. »

« Parce que tu as toujours peur que ta mère découvre que tu « vis dans le pêché », froussarde », répliqua Zep.

C’était vrai. Ma mère a très clairement montré ses sentiments en me faisant la leçon à travers toute une série de cours intitulés « Les filles bien ne signent jamais de bail sans alliance », et sous-titrés « le conte moralisateur de Jamie Beth Hartwell »

La mère de Jamie Beth Hartwell allait à l’église avec mes parents. Elle sortait tout au long de ses années de collège et de lycée avec Murphy Junior. Et s’il ne pouvait pas se permettre de lui offrir une bague de fiançailles, Murphy Junior avait néanmoins les moyens de louer un coquet deux-pièces dans les appartements du Garden Ridge, du moment que Jamie Beth emménageait avec lui et réglait la moitié du loyer. Ils vivaient ainsi ensemble pendant quatre ans au cours desquels Murphy Junior promettant à Jamie Beth que les fiançailles étaient pour demain … jusqu’à ce qu’il rencontre une fille apte à lui permettre de vivre dans un trois-pièces. Soudain, Murphy Junior n’était plus si certain que cela de vouloir se marier avec elle. Et maintenant, Jamie Beth vivait de nouveau avec ses parents.

Après avoir parlé du mariage imminent Hartwell-Murphy pendant quatre ans, sa mère ne pouvait désormais plus se montrer lors des buffets organisés par son église.

« Comme ça, tu as peur de ta maman », dit Zeb, « C’est une super raison pour moi d’être dehors, aussi tard, au lieu de, je ne sais pas, dormir dans mon lit sous mon propre toit  par exemple».

« Qu’on n’aurait pas si Jane ne nous en avait pas fait cadeau pour notre mariage », lui rappela Jolène, l’épouse Zeb, une femme superbe et lycanthrope. Les lèvres de Zeb lèvres se tordirent dans une grimace d’excuses. Je levai mes mains comme pour parer à sa culpabilité.

« Perd cet affreux tableau de chasse que Gabriel veut suspendre dans notre séjour et nous sommes quittes », je lui dis. Il haussa les épaules et courut en bas des escaliers pour aller récupérer plus de cartons de Big Bertha.

« Nous vous aiderions si nous pouvions », nous cria ma tante fantomatique Jettie de là où elle était assise sur la balancelle du perron aux cotés de son petit-ami tout aussi décédé qu’elle, Mr. Wainwright, , « mais nous sommes vieux et fragiles … et non-corporels ».

Zeb ronchonna et balaya leurs paroles d’un geste pendant qu’il jetait un tapis enroulé dans mon antre.

« T’en fais pas, Jane », me dit Jolène en me tapotant l’épaule alors que ses dents blanches brillaient dans le noir. « Il est toujours irritable quand nous laissons les jumeaux avec ses parents ».

« Parce qu’il n’aime pas être séparés d’eux ? »

« Oh, non, parce que nous avons laissé les jumeaux avec ses parents », dit-elle, frissonnant délicatement. « Ca leur a pris six mois pour prouver qu’ils ne mettraient pas intentionnellement les enfants en danger. Maintenant, nous n’avons plus qu’à nous inquiéter du danger dans lequel ils pourraient mettre les enfants involontairement. »

« Désolée », lui dis-je, « J’apprécie vraiment votre aide ».

« Oh, tu sais, Jane », grinça Jolènependant qu’elle se servait de sa force de loup-garou pour soulever sans effort un carton empli de livres de Gabriel. « Je suis juste heureuse d’être hors de la maison. Jusqu’ici, personne n’a encore pissé ou craché sur moi. De mon point de vue c’est déjà un soir à marquer d’une croix rouge.».

« Ton histoire est si triste », lui dis-je solennellement. Elle gloussa et me traita à voix basse de casse-pieds pendant qu’elle transportait les cartons dans la maison.

Je ris tout en cochant mentalement un autre élément de ma liste-de-choses-à-faire dressée pour l’emménagement.

Recruter de malheureux amis qui acceptent d’être payés en bière/sang et pizza ? Fait.

Organiser le déménagement pendant la phase de sommeil paradoxal de maman ? Fait.

Se débarrasser de l’hideuse gravure de scène de chasse de Gabriel ? Fait.

Ce n’est pas comme si je ne faisais pas de compromis dans cette installation. J’avais rénové deux chambres à l’étage de sorte qu’on pouvait désormais l’appeler une « suite parentale » solarresistante. J’ai vidé une bonne partie de mes étagères pour la collection de Gabriel. Ce n’était pas un choix si difficile compte tenu du fait que la plupart de ses livres sont de précieuses antiquités tandis que les miens des exemplaires bien usés de nouvelles de Jane Austen et Roald Dahl en format livres de poches.

J’ai également rangé la plus grande partie de ma collection de licornes dans la cave, menaçant Gabriel d’un coup de soleil permanent s’il soufflait ne serait-ce qu’un mot à ce sujet à Dick.

J’avais même donné divers objets de famille que je lui avais refusé pendant des années à ma sœur aînée Jenny, juste pour faire de la place aux objets que Gabriel allait amener de sa maison de famille dans Silver Ridge Road. C’était cette même maison qui était l’objet de la donation que Gabriel faisait à Jenny dans le but, je pense, de cimenter le cessez-le-feu fraternel que nous avions instauré il y a quelques mois.

Emménager ensemble, c’était pour Gabriel et moi le dernier arrêt sur la route vers « Engagement-ville ». Avec le vote de la loi sur le Mariage des Morts-Vivants et la récente union entre Dick et Andrea, je commençais à ressentir la pression de laisser Gabriel faire de moi une femme honnête. Nous nous étions mis d’accord d’emménager ensemble parce que j’avais expliqué à Gabriel il y a quelques mois que je n’étais pas encore prête à me fiancer. Je m’habituais tout juste à être un vampire. Je me remettais du mariage d’enfer entre Zeb et Jolène. Et, ne l’oublions surtout pas, le psycho-rejeton de Gabriel venait tout juste de tenter de m’assassiner dans ma propre maison.

J’avais, comme qui dirait, besoin de respirer.

Gabriel m’avait encore demandé de l’épouser quelques semaines plus tard, et je n’étais pas prête. Et puis encore, à mon anniversaire, mais je n’étais toujours pas prête. Et puis il m’a promis de ne plus me le demander avant que je ne sois prête. Et quand il a dit ça, je me sentais soudainement prête. Et puis, je me sentais comme une idiote parce qu’il avait alors arrêté de me le demander.

C’est ce qui arrive lorsque vous sortez avec un type qui vous sauve d’une blessure par balle dans un fossé boueux. On attend alors un minimum de drames dans votre relation. Gabriel et moi avons connu tout le contraire de la rencontre-tout-en-rose. Nous avons eu une rencontre-décontracte. Pour faire court, quand j’ai été (de façon totalement injuste et sans autre cérémonie) virée de la bibliothèque, au lieu d’indemnités de licenciement j’ai reçu un chèque-cadeau me permettant tout juste de me souler à rouler sous la table chez Shenaningans. J’y ai rencontré Gabriel, dessoulée, un flirt s’en est ensuivi. Au retour ma voiture est tombée en panne à mi-chemin. J’ai été aperçue marchant vers la maison par l’alcolo de la ville qui m’a confondu avec un cerf et a tiré sur moi. J’ai été abandonnée mourante dans le fossé, seulement pour que Gabriel m’y trouve et me change.

Mais lorsque je raconte cette histoire en public, Gabriel a dû me changer en raison des blessures dont je souffrais suite à ma tentative de sauver des orphelins aveugles enfermés dans un camion accidenté et à la proie de flammes.

Et me voilà donc, sur le point d’entrer en cohabitation, m’interrogeant sur la meilleure façon de demander en mariage mon copain dont la sensibilité masculine d’avant-guerre-civile ne pourrait probablement pas supporter ce geste. Je me dirigeai vers Big Bertha pour attraper quelques cartons de plus quand je réalisai que Gabriel et sa sensibilité étaient en train de monter l’allée.

Je pouvais presque entendre Dick et Gabriel se disputer alors même que leur voiture était encore à près de 50 mètres. Andrea, l’épouse de Dick devenue récemment vampire, avait le visage collé contre la vitre et semblait être occupée à se taper la tête contre la portière dans une vaine tentative de s’assommer.

« Je disais seulement », grognait Dick en sautant de la voiture dès que Gabriel l’eut arrêtée dans un crissement de pneus. « Arranger un match n’est pas grave s’ils sont de les seuls perdants ».

« Le match de Baseball truqué ! », insistait Gabriel, claquant la portière coté conducteur en suivant son ami d’enfance vers le coffre de la voiture. « Le scandal des Black Sox a fait perdre les gens toute confiance dans un loisir américain extraordinaire. J’étais tellement choqué que j’ai désavoué la totalité de la culture populaire. Juste à cause de Chick Gandil, discuter avec Jane est parfois presque douloureux. »

« Hey », leur cirai-je, « je suis juste ici, là ».

Gabriel m’adressa un large sourire et je me souvins immédiatement que tout ce tohubohu de déménagement valait absolument la peine. Rien que par son physique mon nouveau colocataire m’a toujours laissée aussi troublée que baveuse. Cheveux noirs dont les boucles ondulent autour du col de sa chemise, des yeux argentés lançant des éclairs, une bouche luxuriante aussi capable de réciter des vers que de murmurer des mots salaces que je ne serai jamais jamais capable de répéter sans aussitôt me consumer de honte.

Je lui lançai un sourire en réponse alors qu’Andréa tombait de la voiture et se jetait à mon cou. Je pensais qu’elle venait pour un me prendre dans ses bras, mais elle serra ses mains autour de ma gorge et se mit à m’étrangler.

« Ehhh », m’exclamai-je, tirant sur ses mains pendant qu’elle secouait ma tête d’avant en arrière comme celle d’une poupée.

« Ils n’ont pas arrêté pendant tout le putain de trajet », hurla-t-elle « Si Lee aurait gagné la guerre, si Vicksburg avait tenu son siège un peu plus longtemps. Si l’atterrissage sur la lune était une vidéo trafiquée. Et je devais rester tranquillement assise à écouter, juste à cause de toi « !!!

« Tu es en train d’étrangler quelqu’un qui n’a pas besoin de respirer », lui sifflai-je d’une voix rauque, « Et tu n’étais pas obligée de venir avec eux »

« Non, ce que je te reproche c’est de les avoir rapprochés à nouveau. Ils se sont activement ignorés pendant des décennies avant que ne t’en mêles », cracha-t-elle à la manière d’un bon vieux méchant dans Scooby-Doo.

« Salut mon cœur », dit Gabriel gaiement en passant devant nous comme si notre amie n’était pas en train de me maintenir par terre en m’étouffant. « Je pense que c’était le dernier tour. Ta sœur est déjà à la maison en train de prendre les mesures pour les rideaux ».

« Ca fait combien de temps qu’ils font ça », demanda Dick à Zeb en faisant un signe de la tête vers Andrea et moi. « Et aucun de vous n’a pensé à les filmer ? »

Jolène soupira et donna une tape derrière la tête de Dick.

« Merci », lui lancèrent Andrea et moi à l’unisson.

Se massant délicatement l’endroit où Jolène l’avait touché, Dick marmonna « je n’aime pas te jeter ce genre de trucs à la figure, Stretch, mais quand j’ai emménagé avec ma petite femme je ne t’ai pas demandé ton aide ».

Andrea dit : « Et bien, amour, je ne peux que te rappeler que tu n’as jamais officiellement emménagé chez moi, tu as juste insidieusement, au fil du temps, introduit tes affaires dans ma maison ».

Dick fit une grimace, «Ah, je sais, putain, je suis fort ».

« As-tu as pris Rhinehardt Lane » demandai-je à Gabriel. Andrea râla pendant que je la poussais loin de moi et sautais sur mes pieds. Elle atterrit sur la route où elle s’affala de façon bien peu gracieuse.

Dick aida Andrea à se relever et la rassurait sur le fait qu’elle m’aurait bien eu si Gabriel ne nous avait pas séparées.

Gabriel m’embrassa et m’adressa un petit sourire en coin. « Jane, je t’aime, mais j’ai mes limites pour te faire plaisir. Faire un détour de trente kilomètres autour de la maison de ta mère me semble un peu exagéré. »

« Gabriel, je te dis, elle a cet étrange sixième sens quand quelque chose se passe dans ma vie que je ne veux absolument pas qu’elle sache ».

Andrea s’ébroua en enlevant les brins d’herbe accrochés à son pantalon. « Et bien, tu pourrais toujours lui raconter ta vie, comme une adulte ».

Je braquai mon doigt directement sur son nez. « Tais-toi,toi. Maintenant que tu as la force de vampire, les paris sont ouverts en ce qui concerne le bottage de cul. »

« Cinq dollars sur Jane », cria Jettie.

« Dix sur Andrea », contra Dick. Quand je lui lançai un regard noir, il haussa les épaules. « Je t’ai vu te battre, Stretch …. Mais attend, est-ce que c’est ça, la raison pour laquelle nous sommes ici aussi tard dans la nuit ? Ta mère ne sait pas que Gabe emménage avec toi ? »

« Non, elle ne le sais pas », murmura Gabriel en roulant ses yeux. « Elle sait que je donne la maison à Jenny, mais Jane lui a dit que j’allais vivre dans un appartement dans le coin. »

« Je t’imagine quand même mal comme un adepte de laverie automatique », lui dit Zeb en secouant la tête.

« Ohhh », grommela Dick, son visage quelque peu plus pâle quand il se tourna vers moi. « Ceci va encore se terminer par toi en train de me frapper. Encore ».

Je fis tomber le carton marqué « Trucs ennuyeux et fragiles de Gabriel », ce qui fit jurer Gabriel couramment en Mandarin. « Qu’est-ce que tu as fais ? »

« Et bien, je me suis désigné moi-même chef du comité responsable des rafraichissements pour cette fiesta, alors je me suis rendu au LeaderPrice pour prendre quelques bières ».

« Qu’il a bues un peu plus tôt cette nuit », lança Andrea.

« Je t’ai dit, chérie, je bois toujours de la bière quand il y a de la lutte », s’écria Dick avec indignation. « Quoi qu’il en soit, je fais donc la queue à la caisse pour pay… »

« Ce que je l’oblige désormais à faire un peu plus souvent qu’en geste occasionnel », dit Andrea.

« Est-ce que tu pourrais arrêter de m’interrompre, femme », demanda Dick. Andrea arqua élégamment son sourcil auburn dans un geste que Jolène avait catalogué « le sourcil de garce ».

« Ignore-la, Dick », insistai-je, ce qui fit Andrea ricaner avec dédain. «  Tu peux dormir sur notre canapé si tu veux, mais maintenant, termine ta fichue d’histoire ! »

Dick expira un souffle dont il n’avait aucunement besoin. « Et bien voilà, je suis donc dans la queue de sortie et qui je vois arriver, mais c’est la maman de Jane. Et, bien sûr, étant le garçon bien élevé que je suis, j’engage la conversation avec elle. Pour éviter qu’elle ne pense que je suis ivre – arrête, Gabe – je lui explique donc que ces trois caissons de bière sont pour nous tous pendant que nous aidons Gabriel à déménager ses affaires vers River Oaks. »

« Tu as bu trois caisses de bière », s’ecria Zeb « et tu es toujours debout ? »

« Des années de pratique », marmonna Gabriel.

« Alors, elle sait ? » je hurlai, « Elle sait ! » J’attrapai Dick par le T-Shirt et me mis à le secouer.

« Elle semblait être vraiment ravie de tout ça », s’exclama Dick. « Elle souriait ! »

« C’est son expression ‘je viens d’avoir une mauvaise nouvelle en public’ », criai-je. Qu’est-elle est supposée faire ? Gémir ‘ma fille est une femme de mauvaise vie’ et grincer des dents dans le couloir de la caisse ?

Zeb semblait réfléchir un peu trop sérieusement sur ce qui était clairement une question rhétorique jusqu’à ce que son regard ne rencontre le mien, furieux.

A cet instant, un frisson parcourut mon dos. Mes oreilles se mirent à sonner et ma vision se mit à briller avec une clarté effrayante. « Ma mère est en chemin, elle vient ici » !

« Ta télépathie ne porte pas aussi loin », dit Gabriel avec un petit rire.

« Elle arrive », chuchotai-je dans une voix aigue et haletante sortie tout droit de Poltergeist.

Dick frissonna. « Putain, Stretch, je t’ai dit de ne pas utiliser cette voix ».

« Tout le monde », je hurlai, attrapant un vase en céramique et un coussin au hasard « attrapez ce que vous pouvez et jeter tout dans la maison ! »

Gabriel entourait mes bras de ses mains  « Jane, calme-toi. Tout se passera bien ».

« Tu ne comprends pas dans quelle situation on est ! Le harcèlement. Le coup de la culpabilité. Les questions. ‘Pourquoi tu me fais ça ?’ », dis-je en imitant la voix de martyr de Maman. Gabriel frissonna de son coté, pris de chair de poule. « ‘Est-ce que tu sais ce que les gens vont penser de vous deux vivant ensemble ? Pourquoi ne vous mariez-vous pas tous les deux ? Tu ne penses pas qu’il est assez dur de voir sa fille mourir et de ne pas avoir la chance de l’enterrer ? Maintenant tu me prives de la chance de voir ma fille cadette mariée ?’ »

Gabriel haussa les épaules et m’attira vers lui, jusqu’à ce que mon visage fût serré contre son cou. « Nous ne nous marions pas parce que tu n’es pas encore prête ».

« Mais je suis prête », gémis-je, ma voix étouffée contre sa poitrine.

Les bras de Gabriel relâchèrent immédiatement mes épaules. « Quoi. MAINTENANT ? Tu me dis ça maintenant ? »

« Oui », je criai, en ignorant le gros éclat de rire provenant de Dick de l’autre coté de la pelouse.

« Je croyais que tu étais emballée qu’on emménage ensemble ? Je croyais qu’on le faisait parce que tu n’étais pas prête à te marier !»

« Mais je le suis », hurlai-je, « Je suis prête maintenant. Et je ne savais pas comment te le dire puisque j’avais fait toute une histoire à propos de ce que je n’étais prête. Mais je te fais confiance. Tu as arrêté de filtrer avec soin les informations pour moi et de me traiter comme un enfant. Tu me dis enfin quand quelque chose t’ennuie ou te rend furieux ou si tu veux juste un câlin ou si tes cheveux ne veulent pas faire ce que tu veux. Franchement, parfois j’aimerais que tu partages un peu moins avec moi, mais je ne veux en aucun cas régresser. Je sais que tu m’aimes. Et je t’aime trop, je ne crois pas que je supporterais de ne pas être avec toi chaque jour ».

Gabriel se mit à bafouiller. « Mais- mais, tu me dis ça maintenant ?! »

« Peut-être devrions-nous aller à l’intérieur », murmura Zeb.

Andrea secoua la tête, ses yeux fixés sur nous. « C’est comme un accident de la circulation, je ne peux pas regarder ailleurs. »

« Et qu’est-ce qui se passe si moi, je ne suis pas prêt », riposta Gabriel.

C’était mon tour de bafouiller, indignée, « Quoi ! »

« J’aimerai peut-être jeter ma gourme encore une décennie ou plus, faire durer un peu mes jours de célibataire », dit-il, ses lèvres s’étirant dans un petit sourire satisfait.

« Ces jours sont en train de diminuer alors même qu’on parle », je lui répliquai, impassible.

Tante Jettie ricana derrière moi. « Oui, garçon, fais la suer ! »

« De quel coté es-tu », lui lançai-je.

« Alors, juste pour clarifier les choses – parce que nos conversations ont vraiment besoin de sous-titres – je peux te demander à nouveau en mariage, à tout moment ? » demanda Gabriel.

« Et bien, ouais, mais ne te sens pas obligé de faire tout ce sur-les-genoux, chandelles et roses- truc ».

« Nous sommes d’accord, alors », acquiesça-t-il, hochant la tête.

« Ou encore ce ‘panneau-d’affichage-des-scores-lors-de-rencontres-sportifs-truc’. J’ai toujours trouvé ça un peu lourd. »

« Quand est-ce que nous sommes jamais allés voir une rencontre sportif ensemble? », dit-il, levant un sourcil.

« Je pense que ce serait grossier de ma part de mentionner mon aversion pour les bagues cachées dans la nourriture de toute sorte ».

« Jane, tout autre homme pourrait interpréter tout ça en pensant que tu es une fanatique du contrôle ».

Je jetai mes mains en l’air dans un geste de capitulation. « Je me tais maintenant ».

Il me lança un regard indéchiffrable. « Alors, juste pour que je comprenne bien le périlleux fonctionnement interne de ton cerveau – nous ne sommes pas fiancés, ni de façon officielle ni de façon officieuse, mais je suis libre de renouveler ma requête à tout moment. »

« Du moment que tu entends par là me proposer le mariage et non pas de m’assigner en justice, oui ».

« Merci, pendant un instant j’étais un peu troublé », dit-il.

« Que vas-tu faire maintenant, appeler un putain de notaire ? », lui cria Dick, « Embrasse la fille ! »

Gabriel jeta le carton des trucs ennuyeux et fragiles dans la direction de Dick et était sur le point de faire exactement cela quand j’entendis la voiture de ma mère monter la chaussée. Je pouvais sentir son cerveau vibrer alors qu’elle était sur le point de nous « prendre sur le fait » d’emménager avec Gabriel.

« Pas un mot sur des fiançailles, peu importe combien elle insistera », j’avertis mes amis. « Peu importe ce qu’elle dira ou combien de décibels elle y met, n’essayez pas de la distraire par ce moyen ».

Les lèvres de Gabriel sursautèrent. « Je ne pense pas que ça va être si terrible que ça. C’est une femme contre cinq créatures surnaturelles … et Zeb ».

« Tu rigoles parce que tu n’as pas entendu ma mère tenir sa dissertation orale de trente-minutes sur le choix des fleurs appropriées pour la saison. Nous nous en sortirons mieux si nous la laissons nous hurler dessus parce que nous sommes des sales fornicateurs pré-maritaux. »

Avant que Gabriel – ou encore Dick, par chance – pouvait répondre à ça, ma mère s’arrêta dans un crissement et coupa le moteur.

« Jane Enid Jameson ! », cria ma mère, sortant de sa berline alors que son visage prenait une teinte aubergine bien peu naturel. « Qu’est-ce que tu crois que tu es en train de faire ? »

« Oublie les fiançailles », me murmura Gabriel, « nous allons dire ta mère que nous nous sommes déjà enfuis ensemble. Elle ne saura pas quoi répliquer à ça. »

« Nous allons mentir à ma mère ? ».

Il eu un mouvement de recul lorsqu’elle s’approcha à grands pas furieux, son lourd sac-à-main Aigner bringuebalant à son bras. « Je crois que ce serait la meilleure chose à faire, oui. »

Je hochai la tête, l’embrassant juste avant de lui glisser à l’oreille, « Je suis d’accord avec ça ».

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