La coop devenu banque

Publié le 10 décembre 2010 par Fabien Major @fabienmajor

Ce n’est pas pour rien qu’un organisme prestigieux britannique lui a récemment décerné le prix de Banque Canadienne de l’année. Le Mouvement Desjardins démontre de jour en jour qu’il n’est plus une coop mais bien une banque, cupidité incluse. Oui, on a de belles réalisations chez les descendants d’Alphonse, mais certainement deux grosses taches qui font ombrages aux succès.

La première concerne l’entêtement de Desjardins à ne pas rembourser AU MINIMUM 2,8 millions aux victimes de Norbourg. Cette somme représente un profit «fictif» puisé à même les économies des petits investisseurs. Depuis 5 ans, au fil des révélations de l’affaire Norbourg, on a compris que si Vincent Lacroix a réussi à dévaliser autant et à gagner la confiance de milliers d’épargnant c’est qui avait reçu deux cautions morales d’importance. La première venant de son ex-employeur La Caisse de Dépôt qui lui a donné les clefs de Teraxis. La seconde vient de Desjardins qui lui avait confié le mandat de gérer 20 millions de dollars. Lacroix ne se gênait pas pour dévoiler cette information confidentielle à ceux qui doutaient de sa structure et de ses capacités. Il a été clairement démontré que lorsque la filiale Opvest de Desjardins a demandé le rachat du placement, Lacroix eût complètement dilapidé le fonds dans de mauvais paris ou par ses ponctions personnelles. Afin de ne pas indisposer ce client privilégié, Lacroix a remboursé les 20 millions avec l’argent des investisseurs et a ajouté 2,8 millions d’intérêt de façon tout à fait arbitraire! Je crois donc que Desjardins agit comme une VRAIE banque en s’entêtant à conserver ses 22,8 millions. À la limite, les gains fictifs sont tout à fait illégitimes.

Aux États-Unis, c’est justement dans cet esprit que la famille Carl Shapiro a restitué 625 millions aux victimes de Bernard Madoff. Cela représente des intérêts bidon acquis au fil des ans. Qu’un raider boursier comme Shapiro reconnaissance que le fruit de la criminalité n’a pas d’affaire dans ses coffres est très noble. Qu’une coop financière agisse autrement apparaît grotesque.

Investir dans des fonds Éthiques ou Toxiques

En mai 2010, j’ai été un des premiers à souligner le paradoxe honteux d’inclure dans des fonds «éthiques et verts» des entreprises ultrapolluantes comme les géants des sables bitumineux. La gamme des Fonds Éthiques de Desjardins est un trompe-l’oeil et prend les investisseurs novices pour des valises! Si on choisit volontairement des fonds «VERTS» c’est pas pour investir dans des entreprises qui ont des «intentions», mais pour des gestes concrets.

Si la structure et les mandats de leurs fonds socialement responsables incluent des sociétés qui violent à répétition les droits humains ou qui fractionnent le schiste en abusant outrageusement de nos terres, il y a lieu de se questionner! L’argument qui sous-tend qu’en participant comme actionnaire aux décisions administratives en viendra à changer les choses petit à petit, ne tient pas la route.

Peut-on être contre la torture en fournissant le fouet de bonne qualité et en chuchotant au bourreau de frapper «doucement»? En achetant et en détenant des actions d’entreprises canadiennes aux mœurs et pratiques discutables comme Suncor, Talisman et Goldcorp… Desjardins maintient et participe à la croissance de la valeur de ces actions en bourse. Elle fournit juste plus de capitaux pour que le lobby des sables toxiques maquille le message.  Aujourd’hui des dizaines de sociétés de premier plan se liguent contre l’exploitation des sables bitumineux dont Avon, Walgreen, Levi Strauss, Gap, Timberland, Whole Foods, Bed, Bath &Beyond… Et ça grossit.

Avec sa position dominante, Desjardins pourrait très bien se permettre de redevenir bien « plus qu’un banque »!