Voilà donc le cinéma honk-kongais de la Shaw brothers et ses batailles rangées de malfrats transplanté à la frontière du Mexique et du Texas. Milices racistes et réseaux d'immigrés latinos clandestins s'y étripent joyeusement. La caméra de Rodriguez est un geyser intarissable d'hémoglobine et on aurait du mal à peser les morceaux (monceaux) de corps ôtés à leurs légitimes propriétaires d'un seul coup de Machete par ce formidable acteur qu'est Danny Trejo. Ôtez son visage grêlé et raviné et le film perd la moitié de son charme !
Bon, on s'amuse bien, c'est vrai. Et certains personnages comme le curé très particulier qui occit tout ce qui bouge dans son église et filme les confessions polissonnes et incestueuses de ses ouailles sont tout à fait réjouissants. Là où les choses patinent, c'est quand Rodriguez veut nous infliger une leçon de politique sur la question de l'immigration. Sa guerre des gueux n'est pas crédible et son propos, sorte de vulgate de Besancenot revisitée par John Woo, fait sourire, involontairement cette fois.
Bien sûr lui-même ne croit guère à sa harangue et il va se réfugier dès qu'il le peut vers le second degré comme un automobiliste en perdition sur une aire d'autoroute. Comme Tarantino encore, son cousin en cinéma, il donne l'impression de ne plus pouvoir s'exprimer sans cligner de l'oeil en même temps. Au fond, il ne sait pas lui-même ce qu'il croit ou ne croit pas et, par prudence, joue sur tous les registres à la fois. Cette subtilité serait perçue comme de la confusion si les coups de machette allègrement distribués par Trejo ne nous empêchaient de réfléchir plus que quelques secondes d'affilée.
On attend la suite, avec un oeuf, du Tabasco et de l'oignon.