Un mois après l’annulation de la seconde édition du concours Thriller Mania, voici quelques réflexions autour de ce concours qui partait pourtant d’une idée intéressante. L’édition papier, à défaut d’établir de vraies stratégies pour appréhender au mieux le virage numérique, a compris depuis un certain temps tout l’intérêt qu’elle pouvait tirer d’Internet : comptes Facebook, Twitter, sites Internet dédiés, services de presse adressés à des blogs, etc.
Dans cet esprit, le concours Thriller Mania demandait aux internautes de voter pour le manuscrit (genre thriller) qui leur plaisait le plus durant plusieurs semaines (chaque semaine les auteurs des manuscrits ayant reçu le plus de votes dévoilaient un nouveau chapitre). Organisé par Pocket/Evene et avec le soutien de 13ème rue, Métro et Quais du Polar, le concours pouvait s’enorgueillir de deux parrains grand public : Maxime Chattam et Franck Thilliez. Contrairement à My Major Company Books, les internautes ne misent pas d’argent, ils ne sont pas éditeurs. Ils votent uniquement.
Pour cette seconde édition, les organisateurs avaient essayé d’apporter un peu plus d’originalité que la simple mise en ligne de chapitres. Des petits défis étaient organisés régulièrement pour permettre aux auteurs de se démarquer de leurs concurrents. Malheureusement, il semble que ce concours n’ait pas réussi à assumer son positionnement. Après une première édition 2009 qui avait vu les auteurs participer plutôt au concours de celui qui avait le plus d’amis (compte tenu du peu de votes recensés, finale mise à part), la seconde édition a connu une dérive exponentielle : de nombreux « faux » votes ont été recensés à la manière des élections traditionnelles. Adresses e-mails créées pour la circonstance, il semblerait que soudain la technologie et ses vices aient pris le pas sur la lecture et le vote sincère. Mais peut-on s’en étonner ?
Avec un premier prix qui ne pouvait qu’attirer les convoitises des auteurs en herbe (une publication chez Pocket !), obtenir le plus de votes possibles devait devenir une obsession pour chacun des auteurs, rafraîchissant sans aucun doute la page consacrée à leur manuscrit à l’aide d’une pression sans fin sur F5. S’il n’est pas question de mettre en doute l’honnêteté des auteurs, force est de constater que le mode de sélection a montré ses limites.
Demander aux internautes de désigner un manuscrit à publier doit-il être considéré comme le refus du risque de l’éditeur qui est de publier un texte qui lui tient à cœur ? Pas sûr même s’il y a peut-être une différence entre demander un avis et suivre un avis. Notons le positionnement à part de My Major Company Books dont tous les projets ouverts à mises sont validés d’un point de vue éditorial et qui offre aux internautes la possibilité d’être éditeurs et donc d’être intégrés à chaque étape de la réalisation du livre.
Il ne faut pas que l’édition papier voit dans le développement d’Internet un eldorado permettant de l’utiliser de n’importe quelle manière. Internet reste un monde divers, incontrôlable souvent, qui doit être bien appréhendé avant de s’y lancer. Les organisateurs de Thriller Mania vont sans nul doute réfléchir à un nouveau processus de sélection afin de faire perdurer ce concours qui est un moyen parmi d’autres d’aller chercher les lecteurs là où ils passent de plus en plus de temps : sur Internet.
La littérature sera-t-elle bientôt confrontée au phénomène Star Academy ou Nouvelle Star ? Rien n’est moins sûr…
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