Aux vues de l’actualité récente de Michael Caine (Nolan, Nolan, Nolan) que le monsieur a aussi une grande carrière derrière lui (et on espère avec encore beaucoup devant nous) en tant que meneur de troupe. Le plus racé des acteurs anglais nous revient dans un premier film british pur sang, revisitation XXIe siècle de la Haine sauce londonienne. Et ne sera pas le plus coriace qui l’eut cru…
Harry Brown est un nouveau veuf, sa femme venant de le quitter. Harry est vieux aussi, et il n’a plus beaucoup de passe temps, hormis les parties d’échec avec un vieil ami dans un pub semi désert. Quartier désincarné de Londres où les bandes font la loi, les trafics défont le quotidien. Et malgré sa grande solitude, Harry est finalement brisé par le meurtre sauvage de son ami Leonard, pris au piège des petits jeux d’une bande de délinquants notoires. Face à l’impuissance de la police, plus tracassée par le jeu de chat et de souris auquel elle se livre avec les trafiquants, Harry voit ses réflexes de l’armée refaire surface, non sans tenter de les canaliser.
Film choc, certainement, Harry Brown met brillamment en scène un Michael Caine assisté de deux vieux briscards du cinéma anglais, Liam Cunningham (Centurion, Hunger…) et David Bradley (Harry Potter…) pour un film de vigilante que n’aurait pas renié Charles Bronson en son temps. Les temps sont durs, et le réalisateur ne lésine pas sur le tableau d’une banlieue ultra violente et une jeunesse dénuée de tout sens des réalités… Dès la séquence d’ouverture, filmé façon « Youtube », le film s’engouffre dans une tempête de quartier sans concession, désespéré et sans couleurs, se terminant de manière grossière mais fataliste par une apocalypse entre quatre tours. On se rappelera les images de JT vues il y a quelques années en France, et on se dit que les poudrières de banlieue ne sont pas si irréelles.
Harry Brown, film d’époque donc, mais aussi très beau rôle pour Michael Caine, accusant le poid de l’âge avec force, sans perdre de sa splendeur. Laissant de côté l’excuse de sa condition, ce retraité tranquille dont les seuls appuis ont volés en éclat à cause du temps ou de la violence, ne se laissera plus marcher sur les pieds, et retrouve les calculs froids et meurtriers du soldat qu’il était. Et là le film devient un vrai polar teinté d’horreur, dans un environnement lugubre où l’humanité des personnages ne saura pas freiner la marche en avant vers l’insurrection. La dernière partie, assez courte, les verra s’affronter une dernière fois, moins glorieusement, alors que les vérités ont éclatées au grand jour. Malgré des dernières idées un peu optimistes (mais pourquoi pas), Harry Brown fait réfléchir sur nos choix au quotidien, nos réactions devant la dérive de la société, sans trop savoir s’il faudrait agir pour y remédier ou non. Comme Harry, choisir de contourner le problème ou l’affronter directement, il faut bien un jour se confronter aux démons qui nous entoure, qu’on le veuille ou non…