En 2009, c’est Tongue N’ Cheek qui vient reprendre le flambeau des trois précédents, notamment Maths & English, en choisissant un titre à la construction assez fidèle, de même pour la pochette qui en reprend son inspiration « chewing-gum ». L’Anglais n’a pas peur de s’assumer pleinement : le style rétro des années 80 est bel et bien de retour, et Dizzee en est l’un des portes paroles les plus inspirés et inspirant.
Car l’univers musical des années 80 (décennie qu’il n’a pu que survolé, vu jeune âge) se ressent tout au long de cette quatrième production qu’il se serait amusé à enregistrer sans trop se prendre la tête. Mon Dieu ! De quoi serait-il capable s’il voulait se jeter sur un « grand projet » ?
Pour l’instant, c’est Tongue N’ Cheek qui nous intéresse. Son album le moins intéressant des quatre. En comparaison, certes. Ce qui ne signifie pas pour autant qu‘il ne le soit pas, intéressant. D’ailleurs, aujourd’hui, il en est déjà à cinq singles numéro 1 extrait de l’album. Et même si un tube n’est pas forcément un gage de qualité, le tout de force est d’avoir réitérer tout en gardant une crédibilité « street » toujours aussi intact depuis ses débuts.
Armand Van Helden ou Calvin Harris auront été les premiers à le propulser à la cime des ventes outre-Manche. Pour ma part, le premier, « Bonkers » est beaucoup trop calibré dance-floor, mais c’était l’objectif, et il a été plus qu’atteint. Pour « Dance wiv me », j’avoue que là, j’en prends pour mon grade : j’adore !
Autrement, le public français reconnaîtra sûrement une énorme influence de Sefyu sur « Road rage », dont la production est trop proche de celle du Français pour que cela ne soit pas énorme un clin d’œil.
« Dirtee disco » ose même retourner avant les années 80, et il faut avouer que l’hommage est très classe. Sur « Nuffin long » Dizzee Rascal semble en roue libre et extrêmement à l’aise sur une prod’ simple mais très efficace.
Le morceau le plus strident, stressant ou, donc, urbain, est « Heavey » : musicalement difficile à appréhender, le flow de Dizzee est effroyablement juste.
« Doing it big » prouve à lui seul qu’il est possible de réunir plusieurs décennies sur une même œuvre, bien que peu en soient capables avec la même justesse que Dizzee Rascal.
Capable de faire dans la dentelle, « Chillin wiv da man dem » nous montre que sa voix se pose à merveille sur un panel toujours plus large musicalement. Très reposant.
« Money money » semble singer l’artiste lui-même, avec une audace des plus plaisantes, malgré l’évidente envie de ne pas être original.
Le pris du morceau le plus kitsch revient sans l’ombre d’un doute à « Holiday ». Kitsch n’importe où ailleurs, le morceau est ici très jouissif, une sorte d’hommage sans la nostalgie qui vient souvent noircir nos souvenirs.
Dizzee Rascal s’est éclaté à faire cet album, et s’éclate encore plus dans sa version double dont je vous parle ici (j’ai omis les quelques titres live pour me concentrer sur les inédits).
J’avouerai, en conclusion, qu’il est m’est très difficile de résumer l’Anglais en un ou quelques mots. Ainsi, Tongue N’ Cheek est à l’image de son créateur : coloré et urbain, et l’on comprend alors pourquoi c’est Londres, ou plus précisément sa banlieue, qui nous a offert cet artiste atypique, qui a la grosse tête alors même qu’il reste un illustre inconnu presque partout en dehors des îles britanniques. Les Anglais n’en sont pas à un paradoxe près. Ni à un nouveau génie de la musique près. Tiens, je n’ai pas parlé de Shakira…
(in heepro.wordpress.com, le 09/11/2010)