Le football selon Saint Daniel Riolo

Publié le 06 décembre 2010 par Timothylearik

Depuis son arrivée à RMC en 2006, Daniel Riolo n’arrête pas de faire parler de lui. D’abord simple consultant, aux côtés des vaches sacrées Roland Courbis et Jean-Michel Larqué, il les a rapidement supplantés pour devenir l’attraction principale de l’Afterfoot, l’émission-phare du football sur la bande FM. Une attraction, comme au zoo, on regarde les pingouins chier et glisser sur la glace, avec opiniâtreté et ridicule. Une attraction, comme on regarde un homme tronc ou des sœurs siamoise dans le film Freaks de Tod Browning. Daniel Riolo, on l’écoute religieusement tous les soirs, au coin de l’âtre, comme nos aïeux écoutaient le Général et Radio Londres dans les années 1940 : avec espoir, fierté et incompréhension (« les sanglots longs de l’automne, de quoi ? Mais qu’est-ce qu’il raconte, lui ? »)… Au crépuscule d’un quinquennat journalistique bien rempli, il est temps de faire le point sur Daniel Riolo, ce mélange hétérodoxe d’Albert Londres (ces voyages mythiques dans le Nord et le Finistère), de Saint-Just (ses saillies radicales pour épurer la Ligue 1) et de Saint-Simon (ses chroniques de la tragi-comédie de Knysna en 2010).


« Je ne cherche pas forcément à être drôle, provoc’ ou je ne sais quoi. »


Un lundi soir comme les autres. Après une conserve de raviolis de Prisunic réchauffée au bain-marie et les multiples refus polis de Pomponette, le quidam se rabat avec lucidité sur le réconfort le plus abordable : l’écoute de l’Afterfoot, soit 4 heures de débats radiophoniques (3h10 en ôtant les réclames) sur le sport le plus débattu depuis les combats à mort des arènes de la Rome antique. Et là, stupeur ! Le quidam est sous le choc. Une voix l’interpelle. D’une gouaille francilienne. Une voix de tête à claques. C’est Daniel Riolo. Avec sa voix de post-adolescent en mue tardive. Daniel Riolo coupe la parole à tout le monde. Daniel Riolo est toujours « contre ». Daniel Riolo a toujours raison. Et quand bien même, avec Daniel Riolo, vous auriez tort d’avoir raison.
Pourtant, Daniel Riolo est le premier à expliquer qu’il « ne cherche pas forcément à être drôle, provoc’ ou je ne sais quoi ». Ouf ! On se demande ce que ça donnerait ! Comme il se met (presque) tout le monde à dos, Daniel Riolo revendique son indépendance… Ni « esprit de cours » (© Dominique Marie François René Galouzeau de Villepin) ni comportement de « laquais » (© Jean-Luc Mélenchon) chez Daniel. Il est libre. Et en est fier. Et il s’en vante :

  • « Moi, j’adorerais me retrouver à la même table que Ménès, en face de lui, pour lui poser certaines questions, sur sa connivence permanente avec les joueurs et le milieu du foot en général, sur le fait qu’après avoir taillé Domenech pendant des années, il se retrouve maintenant à manger à la même table que lui… »


Finalement, cette indépendance fait un peu penser à Prince en 1995-1996 lorsque l’Artiste voulait quitter le label Warner. Daniel Riolo est en « émancipation » permanente. Under the Cherry (Cole) Moon…


« Gaby Heinze a craché sur un maillot de Marseille, je l’ai vu faire ».


Les emportements de Daniel Riolo sont quotidiens. En défenseur du « beau jeu », il fustige inlassablement la Ligue 1, le Calcio, la Liga, la Premier League (Pour faire simple, Daniel Riolo n’aime pas les championnats), Paul Le Guen, Mateja Kezman, Raymond Domenech, Gérard Houiller, Karim Benzema, Hatem Ben Arfa, Alessandro Del Piero, toute l’équipe de France 2010, la « Fédé », Alexandre Delpérier, Jean-Michel Aulas, Michel Platini, Arsène Wenger, Aryen Robben… et Gabriel Heinze, le renégat par excellence (pire que Fabrice « double F » Fiorèse !), puisqu’il a quitté le PSG pour l’OM, alors que, comme l’a expliqué Daniel lors d’une émission mythique, avec un esprit de délation franco-français de bon aloi : « au Camp des Loges, Gaby Heinze a craché sur un maillot de Marseille, je l’ai vu faire ». Ce « je l’ai vu faire » donne toute son envolée lyrique aux propos de Riolo. C’est l’effet de réel par excellence. Cet effet de réel dont parle Fabien Barthez quelque part… Non… Roland Barthes, plutôt.
Daniel Riolo a tout de même des joies… de temps à autres : Diego Maradona, l’équipe de France 1982, le FC Barcelone d’aujourd’hui, Lissandro Lopez, Johann Cruyff, Christophe Dugarry, les arbitres, le Parc des Princes, Luis Fernandez, Pedro Miguel Pauleta, Vincent Guérin, Julio César Dely Valdes (heu… non, peut-être pas), Augustine « Jay-Jay » Okocha (heu… non, peut-être pas non plus)… Bref… Enfin, il faut souligner le bon goût qu’a Daniel à s’opposer formellement à l’arbitrage vidéo – contrairement à son comparse Roland Courbis.
Pour le, plaisir, un petit florilège « riolien » :

  • « Les Rennais ont rien à foutre de la Coupe UEFA, Pierre Dréossi snobe cette compétition, ils sont en train de se foutre de la gueule des supporters »
  • « Clerc en équipe de France c’est encore un délire de Domenech, il est même pas titulaire à Lyon et quand il joue tu sais même pas qu’il est sur le terrain. Y a des meilleurs à son poste et Domenech préfère prendre le quidam. »
  • « Il faut tailler les jambes pour qu’il y ait péno ? »


Les chroniques de Knysna : « Rave un2 the Year 2010 »


L’épitomé de l’art journalistique de Daniel Riolo a sans doute été atteint lors de la coupe du Monde de football 2010 où tous les soirs, il commentait le naufrage de l’équipe de France, sa langue trempée de l’acide… Pas du LSD bien sûr, plutôt du vitriol. Un jeu de massacre permanent où, il faut le reconnaître, Daniel usa plus qu’à l’accoutumée d’un humour sardonique qui fit souvent mouche. Certains de ces chorus sont visibles sur Dailymotion et Youtube. Et l’on espère qu’une seule chose : que Daniel réunisse le meilleur de ses interventions dans un livre de chroniques qui deviendrait au Sport ce que les Mémoires de Saint-Simon sont à l’Histoire.