Je ne recommanderai jamais assez d’aller dans une librairie sans savoir d’avance ce qu’on veut acheter, car on tombe souvent sur de jolies perles ! Déjà le nom de l’auteur et le titre ne peuvent qu’attirer l’attention, et on se demande qui est ce Achmed ABDULLAH qui écrit des histoires criminelles se déroulant à Chinatown ? La quatrième de couverture nous apprend qu’il s’agit du pseudonyme d’Alexandre Romanoff, dont le père est le cousin du dernier tsar et la mère une princesse afghane, et surtout dont la « vie devnt un gigantesque roman d’aventures aux Indes, en Chine, au Tibet, en France, au Proche-Orient et en Afrique ». Si avec ça votre curiosité n’est pas légitiment titillée, vous êtres vraiment difficile !
Mais peut-être tout cela n’est que ruse marketing pour acheter un roman de gare, de seconde zone ? Et bien non, détrompez-vous ! Dès la première nouvelle, qui donne son titre au livre, j’ai été conquis ! Car en guise de parfait gentleman, on a droit à un chinois, très laid, qui épouse une aveugle et qui se trouve confronté à un cruel dilemme lorsqu’il apprend qu’un de ses amis de Harvard, devenu chirurgien spécialiste des yeux, se propose de guérir sa femme. Doit-il laisser l’opération avoir lieu et prendre le risque que cette dernière soit dégoutée en découvrant son « véritable visage » ? ou alors faut-il qu’il l’empêche à tout prix ? Mais à quel prix justement !
Et le ton est donné ! Car ce recueil de nouvelles raconte plutôt des histoires d’amour tragiques qui débouchent sur des histoires criminelles. Mais toujours avec un point de vue « particulier » (de là à croire que tous les asiatiques même occidentalisés pensaient de la sorte au début du siècle dernier…), qui nous renseigne sur la manière dont l’étranger de ces lointaines contrées, encore bien mystérieuses, pour le commun des lecteurs était perçu. Ainsi, ce tueur à gage d’un certain âge déjà qui a épousé une jeune femme mais qui suffisamment lucide – ou philosophe – passe les incartades amoureuses de sa bien-aimée, jusqu’au jour où… mais n’en disons pas plus, car ce serait gâcher la chute de la nouvelle.
La force de Achmed ABDULLAH réside aussi dans le monde cohérent qu’il a su créer autour d’un noyau de personnages récurrents et d’un quartier, qui permet au lecteur de vite s’attacher et ainsi de lire ce court recueil d’une traite ! Une idée de cadeau, si on en manque, qui fera assurément plaisir pour ces fêtes de fin d’année !
À noter également que c’est le premier article publié dans le cadre du challenge ABC critiques de Babelio dont j’avais déjà parlé.