Parmi les membres de ce gouvernement qui semblent devoir leur poste à une forme de prime à la médiocrité (Roselyne Bachelot, Nadine Morano, Michèle
Alliot-Marie, Luc Chatel et Frédéric Lefebvre étant les exemples les plus criants), nommons Xavier Bertrand, qui s’est illustré en tant que Secrétaire général de l’UMP
par un festival de mauvaise foi, d’arguments spécieux ou mensongers, d’outrances et d’approximations. Assurément de quoi mériter une promotion à la place du futur repris de justice Eric Woerth au
ministère du Travail ! Aussi, dès que cet homme-là, le même que Dominique de Villepin surnomme « le traître sans couilles » et dont François Fillon a dit, après qu’il a fait son coming out
de franc-maçon, « maçon, je savais, franc, ça m’étonne », dès que Xavier Bertrand donc ouvre la bouche, il convient d’observer la plus grande circonspection. Et le voilà qui se
gargarise que « Le nombre de demandeurs d’emploi connaît la plus forte baisse depuis février 2008 ». Ce qui donne dans Le Point :
« Réaffirmant « une obligation de résultat : la baisse du chômage », il a déclaré que sa « priorité » serait donc de « mobiliser
tous les moyens de la politique de l’emploi pour conforter cette tendance au cours des prochains mois ». La baisse d’octobre est « le résultat de la détermination sans faille
du gouvernement à soutenir l’économie et l’emploi, alors que la France a été confrontée depuis 2008 à la plus importante crise économique depuis les années 1930 » et « de la
mobilisation des partenaires sociaux, des agents de Pôle Emploi et des entreprises », a-t-il commenté. »
Il faut bien le
lui reconnaître, et ça saute du reste aux yeux à sa silhouette, Xavier Bertrand est extrêmement gonflé. Quel chiffre lui permet-il de se féliciter d’une « forte réduction du nombre de
demandeurs d’emploi » qu’il juge « très encourageante pour l’évolution du marché du travail » ? La baisse dans les statistiques d’octobre de 20 300 inscrits (-0,8%)
n’ayant pas du tout travaillé (catégorie A), soient 2,67 millions. Oui, 20 300 sur 2,67 millions : une « forte réduction », il nous l’enlève de la bouche ! Quant à son
explication de ce mirifique résultat, la « détermination sans faille du gouvernement à soutenir l’économie et l’emploi » s’illustre particulièrement dans le plan de suppression
de 1800 postes à Pôle emploi d’ici 2011 auquel nous consacrions notre billet du 10 novembre dernier… Rappellons que
le gouvernement avait promis que la fusion entre l’Anpe et l’Unedic début 2009 réduirait à 60 le nombre de demandeurs d’emploi géré par
conseiller et qu’il était en moyenne fin août, soit avant l’annonce de la coupe claire dans les effectifs desdits conseillers, de 103,1 chômeurs censés être
« accompagnés » par tête. Mais il y a pire : la misérable baisse de 20 300 demandeurs d’emploi de catégorie A qui procure un tel orgasme à Xavier Bertrand, qui y voit la preuve
éclatante de la magnifique efficacité économique gouvernementale est… fictive. Comme d’habitude, elle résulte de tripatouillages. Démonstration.
Un premier indice nous est fourni par Les Echos :
« les licenciements économiques ont refait une percée avec une progression de 10,4% ». A part ça, Bertrand invoque « la mobilisation des entreprises » :
elles continuent à délocaliser ! Davantage de licenciements économiques, donc, mais moins de chômage, comme c’est curieux… « Les sorties ont été aussi en nette hausse (+7,8% sur un mois
et +5,9% sur un an) » : la voilà, notre baisse du chômage, elle est liée à l’augmentation du nombre des gens qui quittent Pôle emploi. Mais qui pense naïvement que baisse du chômage
égale augmentation de l’emploi déchante dès la phrase suivante de l’article : « Mais elles n’ont pas été alimentées par les reprises d’emploi déclarées (-2,2% sur un mois et -3,3% sur un
an). » Pardon ? Mais si les gens qui sortent de Pôle emploi ne le font pas pour travailler, n’en restent-ils pas moins chômeurs ? Si, mais des chômeurs qui ne comptent pas, et
permettent ainsi à Bertrand de se pâmer. C’est là toute l’astuce, que démonte ActuChômage : ces sorties de Pôle emploi concernent « les radiations administratives (+5,5% sur un mois, +14% sur un an) ou
les cessations d’inscription pour défaut d’actualisation (+17% sur un mois et +11,4% sur un an, soit 44% des sorties) ». Le camarade Dagrouik fait l’addition de
ces dernières sur son site Intox 2007 :
« 30,1 milliers. Soit plus que les 20 000 chômeurs de moins que tout le monde claironne partout. Ce n’est donc que du traitement statistique. » Patdu49, chômeur participant
au site de « journalisme citoyen » Agoravox, y ajoute les
radiations administratives et les mystérieux « Autres cas » de radiations (eux aussi en hausse pour octobre, de 4,5%) et il trouve le total de 36 400 radiations. Résumons : il
y a 20 300 chômeurs de moins en comptant les 36 400 radiés. En réalité, Pôle Emploi fait baisser artificiellement les statistiques en multipliant les radiations arbitraires, comme nous le
dénoncions dans un billet de mars 2010. C’est « le résultat de la détermination sans faille du
gouvernement », hein Bertrand ! Et l’on enrage d’autant plus que, même disposant des chiffres, – ceux de la Dares, en ligne ici -, les médias titrent tout de même sur « la baisse du chômage ». Ils se
prêtent ainsi, mois après mois, à un monstrueux enfumage qui vise à camoufler la réalité du chômage dans notre pays.
Le dessin, signé Mykaia, provient de La télé libre.
Plume de
presse