La fiancée c'est une jolie jeune femme à l'allure délicate et douce qui n'a pas cessé de surprendre au fil de son cheminement musical. Un EP par an à travers lesquels elle elle se dessine un peu plus à chaque fois et où le public découvre l'étendue de tout ce dont elle est capable.
Sur le premier, on la devinait un peu. Des textes souvent poétiques se mêlaient à des mélodies efficaces, j'avais beaucoup aimé. (A retrouver là). Sur le second EP, elle dévoilait un contraste qu'on ne soupçonnait pas entre des textes forts et des mélodies légères sur lesquelles se posait sa voix toujours si claire. (Les mini clips réalisés pour illustrer ce deuxième EP sont là, avec le photo-reportage de son showcase chez Pop Market).
Son troisième EP, habilement nommé Trois, sortira début 2011. Et figurez vous que j'ai la chance d'en avoir reçu un exemplaire à domicile. Voilà que La Fiancée décide de consacrer ce 6 titres exclusivement à des reprises. Exercice délicat qui selon moi n'a de sens que s'il s'agit d'une réappropriation totale des titres interprétés.
Sur cet EP, l'auditeur n'aura donc pas le plaisir de découvrir des textes originaux comme il les avait aimés sur les deux précédents opus. On peut être un peu déçu car il faut dire que la belle avait su s'encadrer de pointures de l'écriture et d'habiles compositeurs jusqu'ici. Ils lui avaient cousu des morceaux sur mesure dans lesquels elle n'avait plus qu'à se glisser pour leur donner une incarnation qui semblait comme une évidence.
Ce troisième opus est donc l'occasion pour Claire de chanter 6 titres que d'autres ont interprétés avant elle. Périlleux. Mais La Fiancée a le goût de l'aventure. Entourée de talents qui lui sont familiers (les musiciens qui l'accompagnent sur scène) et du réalisateur Jack Lahana qui avait déjà officié sur "Deux", La Fiancée a pris le parti de reprendre à son compte les morceaux sans pour autant chercher à les transfigurer. Si bien qu'on reconnait aisément les titres originaux et qu'à la première écoute, ça m'a un peu déroutée, j'avoue. Et puis à force d'écouter l'ensemble de l'EP on réalise qu'il y a une vraie cohérence dans ses choix, que c'est encore un peu d'elle-même qu'elle laisse deviner au travers de ce patchwork réalisé à partir de fragments des univers d'autres.
Le premier morceau du disque est Ouverture d'Etienne Daho. Texte superbe sur une rencontre inévitable, de celles dont on sait immédiatement qu'elles augurent un beau moment, fut-il torride au point d'en être brûlant. On craint alors que la belle ne tombe dans l'écueil de la facilité usant de son image de jeune fille sage en chantant lun amour romantique qui peut sembler naïf. C'est sans compter sur la capacité de La Fiancée à se trouver où on ne l'attend pas.
Juste derrière ce titre-ci c'est en effet un morceau de Jil Caplan que l'on découvre, titre qui balance sur un rythme entrainant un triste constat amoureux (Tout ce qui nous sépare). Il sera suivi de près par une reprise de Benjamin Biolay, toute en poésie désabusée, qui oscille entre romantisme et clairvoyance désenchantée. Plus loin c'est un clin d'oeil à une autre artiste qui a su composer un mélange entre une image lisse qu'on lui aurait bien volontiers collée la faute à son esthétique parfaite et une profondeur qu'on ne lui soupçonnait pas de prime abord mais qui tombe comme la cerise sur un bien joli gâteau. Ce titre de Brigitte Bardot (sauras tu le retrouver?) avait d'ailleurs déjà été repris sur scène par Julien Doré.
Je ne connaissais pas jusque là les deux titres en anglais de l'EP. Le smokey day des Zombies est une jolie découverte. Datant de 68, il parait incroyablement d'actualité avec son choeur aérien qui évoque les FleetFoxes. Quant à Driving away from home, titre du groupe It's Immaterial (1986), il est chanté en duo avec son interprète initial, John Campbell et prend ici une teinte plus dark que l'originale, assez envoûtante.
Avec ce troisième EP, la fiancée nous invite à parcourir ses terres et peu importe finalement qu'il s'agisse de territoires qui ne lui appartiennent pas au départ. Comme à l'accoutumée, elle aime surprendre son monde et n'a pas hésité à prendre un risque en composant une tracklist en forme d'hommage.
Ce disque est incontestablement de ceux qui méritent d'être écoutés à plusieurs reprises pour se laisser gagner par l'ambiance qui se dégage de l'ensemble à mesure que les morceaux nous deviennent familiers.
Les fans de la première heure retrouveront sur Trois ce qu'ils aimaient déjà chez cette délicate Fiancée. Ceux qui la découvriront seront forcément tentés de s'aventurer du côté de ses deux précédents opus et en seront bien inspirés : Les textes et compositions originales qu'ils y trouveront ne peuvent que les rassurer sur la valeur de cette interprète et de son équipe d'auteurs/compositeurs et musiciens dont on n'a sans doute pas fini d'entendre parler.
Jolie promenade donc que celle que réserve cet EP. Le quatrième est déjà en cours d'écriture (et je crois que j'en connais déjà le titre, pas toi?)...A suivre de près.