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Pouvoir sans limite

Publié le 02 décembre 2010 par Malesherbes

Mardi soir 30 novembre, notre Président a réuni une trentaine de parlementaires UMP. L’entourage présidentiel a indiqué que Nicolas Sarkozy avait alors déclaré : « Je ne peux être là que pour deux mandats, pas plus ». Voilà une nouvelle stupéfiante ! L’article n°6 de notre Constitution stipule ceci : « Nul ne peut exercer plus de deux mandats consécutifs ». Comme le faisait remarquer mercredi soir Jean-Michel Apathie sur Canal+, c’était comme annoncer que la pluie mouille.

En fait, d’après moi, notre Président a bien annoncé deux choses :

- Incapable de laisser sans réplique la déclaration de candidature de son challenger de 2007, Ségolène Royal, il a choisi cette voie indirecte pour manifester son propre désir de candidature.

- L’Afrique a connu de nombreux présidents qui se sont maintenus au pouvoir au-delà du terme initialement prévu. Sans être exhaustif, on peut ainsi citer : Houphouët-Boigny, Sekou Touré, Mobutu, Omar Bongo, Mouammar Kadhafi, Denis Sassou-Nguesso, Ben Ali. Nicolas Sarkozy vient de nous indiquer que, aujourd’hui, il ne peut les imiter. Rien dans ces propos ne précise qu’il ne veut pas le faire. Et, comme il ne peut pas, ne caresserait-il pas l’espoir de réviser à nouveau la Constitution à son profit, pour l’autoriser à de nouvelles candidatures ?

Faute d’éléments permettant de trancher en faveur de cette seconde hypothèse, je préfère supposer que notre Président a ainsi manifesté sa résolution de respecter notre Constitution. Jusqu’ici, il n’a pas hésité à la violer allègrement, en au moins trois circonstances :

- Contrairement aux pratiques antérieures et à la lettre de notre loi fondamentale, il s’est approprié l’essentiel des fonctions du chef du gouvernement.

- Il a inventé la notion de Français d’origine étrangère, alors que notre Constitution ne connaît que des citoyens tous égaux.

- Dans son discours de Grenoble appelant à la destruction des campements illégaux, précisant "de Roms", il a directement visé un groupe humain, foulant à nouveau aux pieds cette même Constitution.

Outre ces transgressions évidentes, j’ajouterai que la révision de la Constitution de 2008 a été obtenue dans des conditions douteuses. Du fait des élections présidentielle et législatives de 2007, les élections locales ont été reportées en mars 2008, prolongeant ainsi d’un an le mandat des élus locaux. Le Conseil constitutionnel a en conséquence demandé le report des élections sénatoriales pour éviter que la fraction renouvelée ne le soit « par un collège en partie composé d'élus exerçant leur mandat au-delà de son terme normal.». Mais, à ma connaissance, nul n’a été gêné par le fait que la révision constitutionnelle, adoptée à une voix de majorité le 23 juillet 2008, a elle été votée par des sénateurs « prolongés ». Les élections sénatoriales ayant eu lieu le 21 septembre, trois mois de report de cette révision constitutionnelle aurait permis d’avoir un Parlement sans membres au mandat prolongé. Mais, étant donné le gauchissement de la Haute Assemblée, cette révision providentielle eut alors sans doute été rejetée. Ceci explique sans doute cela.

Avec le mauvais esprit qui me caractérise, j’imagine qu’un but inavoué de la réforme des collectivités locales est destiné à redonner au Sénat son rôle droitier et de s’autoriser ainsi d’autres révisions constitutionnelles qui, éventuellement, permettraient ce qu’on ne peut aujourd’hui.


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