Martine Aubry garde le silence face à l'accélération et la multiplication des candidatures. Elle est probablement la mieux placée pour constater qu'à maints égards le PS est une bulle toujours prête à éclater.
Il y a loin de la performance électorale locale de cette formation politique au ... succès présidentiel.
Tout d'abord, par l'effet de la pyramide des âges, une certaine droitisation de l'opinion est intervenue. Le poids des seniors pèse de plus en plus fortement. Cette réalité sociologique installe certaines réalités comme des priorités incontournables à l'exemple de la question de l'ordre public.
Sur ce volet, un décalage important demeure entre les aspirations des militants activistes et celles de l'opinion.
Des étapes d'acceptabilité de certaines mesures ont été franchies. Le discours officiel de la gauche très impacté par des principes anciens portés par les militants actifs creuse un divorce avec des segments électoraux forts.
Il y a là un clivage culturel qui handicape la performance électorale du PS.
Ensuite, second facteur, le PS refuse de tirer toutes les conséquences pratiques de la présidentialisation quasi-absolue du régime.
Cette présidentialisation impose de reconnaître rapidement une personnalité dotée d'un leadership présidentiel incontestable.
Ce leadership signifie la capacité à être porteur de valeurs fondamentales avec une autorité qui rassure au-delà des ancrages partisans pour conduire la mission à la tête de l'Etat dans la défense des intérêts des Français qui ne peuvent se réduire au seul ancrage partisan d'origine.
C'est ce charisme présidentiel qui assure le désir d'élection.
Troisième facteur, le parti politique doit être une logistique performante. Par les modalités légales de financement de la vie politique, le parti politique est d'abord un "trésor de guerre" et une équipe de moyens humains. Si cette logistique n'est pas
entièrement organisée pour livrer le combat présidentiel de "son" candidat, elle pénalise la compétitivité de ce candidat dans des proportions considérables rendant probablement impossible toute victoire.
Enfin, le parti doit être un outil de rassemblement. La compétition n'est probablement plus entre l'UMP, le PS, le Modem mais entre trois nouvelles familles politiques : le DLVV, le PID et le RC.
Le DLVV, c'est la famille "Dans La Vraie Vie" : ses membres bougent, réussissent, ratent, se trompent, repartent, aiment, cherchent le bonheur … bref, vivent comme maintenant. L'UMP a très efficacement occupé ce créneau en 2007.
Le PID, c'est le parti de la Peur, de l'Incertitude et du Doute. Les Verts occupent ce créneau avec la crise environnementale.
Quant au RC, ce sont les Retardataires Chroniques. Ils disent aimer le clic mais pratiquent le "clic arrière" : un pas d'avancée pour deux pas de tradition donc le blocage : c'est le conservatisme de la gauche du PS.
Dans ce paysage des "nouvelles familles d'opinions", le PS est absent. Il n'a pas de lisibilité reconnue.
Ce tableau montre que le PS est aujourd'hui en difficulté parce qu'il renonce à accepter les "nouvelles règles du jeu". Il est victime de la pluralité des gauches.
Par conséquent :
- Il a un déficit sur un volet important de son programme.
- Il n'a pas de leader avec l'autorité présidentielle installée.
- Sa logistique semble fragile.
Son pouvoir d'évocation par sa capacité à offrir des réponses concrètes face à la demande manque de clarté.
Dans ce contexte, le PS s'éloigne excessivement des règles de base des partis politiques modernes efficaces.
A maints égards, il ressemble au parti Démocrate US du début des années 2000. Mais ce dernier n'avait pas accepté l'éloignement durable du pouvoir. Il a donc muté sur chacun de ces quatre points. Une mutation que le PS n'a pas encore livré.
Tant qu'il ne regardera pas en face cette nouvelle réalité, il demeurera un parti peu performant lors de la présidentielle.
C'est peut-être cette réalité là qui explique avant tout le mutisme actuel de Martine Aubry ...