02 - 12
2010
Pitch.
Une fraction de la vie de Cabeza de Vaca, conquistador ayant marché pendant huit ans après que son expédition ait fait naufrage, enlevé par deux sorciers dont il devient l'esclave et l'élève en chamanisme.
Parti d'Andalousie en juin 1527, le conquistador méconnu Cabeza de Vaca va se retrouver au Nouveau Mexique en 1536 après avoir marché pendant huit ans. Auparavant, l'expédition maritime dont il était le trésorier a fait naufrage, quelques rescapés dont il est accostent en radeau en Louisiane en 1528. Enlevé par deux sorciers dont il devient l'esclave, CDV est initié au chamanisme. Capable d'effectuer des guérisons miraculeuses, partageant la vie des indiens, CDV va se retrouver dans une position ingérable : défenseur des indiens auprès de ses compatriotes colons, il est considéré par les uns comme un étranger, par les autres comme un traître en puissance. La fin du film montre la construction imbécile d'une cathédrale au nord du Nouveau Mexique sur la plage (on est alors sous l'inquisition en Espagne) où l'on a recruté les indiens que défend CDV comme esclaves pour porter les pierres.
photo E.D. distribution
Le film est découpé en plusieurs étapes : partant de la scène finale au Nouveau Mexique, un flash-back nous fait vivre l'épopée des naufragés : l'arrivée des radeaux sur une plage de Louisiane avec les hurlements des rescapés et l'ignoble capitaine démissionnaire du bateau, la découverte du chamanisme par CDV seul auprès des sorciers, ses retrouvailles en Floride avec quelques autres rescapés prisonniers des indiens, compatriotes espagnols avec lesquels à présent CDV ne partage plus grand chose, enfin, après des milliers de kilomètres parcourus à pied, l'arrivée de CDV méconnaissable au Nouveau Mexique où le groupe en guenilles est finalement identifié comme des pairs par une expédition militaire espagnole venue construire une cathédrale.
photo E.D. distribution
Ce qui peut dérouter, ce sont ces allures de théâtre antique que prend le film s'agissant des comédiens, personnages fantomatiques, le visage recouvert de poussière, de terre, portant un masque livide gris/blanc, cris et théâtralité de l'interprétation, grandiloquence dans des situations pourtant réalistes, sur des paysages paradisiaques où se déroule l'enfer de l'expédition échouée. L'initiation au chamanisme de Cabeza de Vaca est traitée un peu vite, on a du mal à croire qu'il apprend aussi rapidement les secrets des sorciers alors qu'il est censé y passer plusieurs années. On voit bien que ce qui intéresse le réalisateur, c'est autant le sujet du conquistador le plus important de l'histoire (un des plus grands marcheurs de tous les temps, il a sauvé des indiens et quelques uns de ses compatriotes) que la magie, l'ésotérisme, les drogues hallucinogènes qu'ingèrent les sorciers pour atteindre l'extase, le fait que le seigneur Alvar Nunez Cabeza de Vaca, noble espagnol, soit devenu un shaman.
photo E.D. distribution
C'est le premier long-métrage de Nicolas Echevarria (le film date de 1990), passionné par les coutumes et les manifestations religieuses des indigènes mexicains. Le film met en opposition deux mondes, deux religions, la foi chrétienne espagnole face à une autre forme de spiritualité, le chamanisme, Cabeza de Vaca pratiquant les deux, recadrant au passage la réalité cruelle, peu glorieuse, des conquistadors. Un film unique sur un sujet atypique historique qui possède ses images exceptionnelles, un film qui a tout pour devenir culte à classer un peu hâtivement entre Jodorowsky et Herzog, excusez du peu.
Le livre : "Relation de voyage" de Cabeza de Vaca, document qu'il adressa à l'époque à son roi. collection Babel/éditions Acte Sud
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Mots-clés : avant-Premières, cinéactuel, cinéma mexicain, Cabeza de Vaca, Nicolas Echevarria