Les corpus
Poil de carotte / Jules Renard ; avec 50 dessins de F. Vallotton.
Source: Bibliothèque nationale de France
Il y a 100 ans, le 22 mai 1910, Jules Renard disparaissait à l’âge de 46 ans.
L’auteur du célèbre Journal, dont la BnF possède un des rares feuillets conservé, a débuté en collaborant à des revues et y donnera presque toute son œuvre. Jules Renard est intimement lié au Mercure de France dont il est l’un des co-fondateurs avec Alfred Valette. C’est là qu’il publie Sourires pincés où naît le personnage de Poil de Carotte. En 1894, il collabore à la Revue Blanche, organe d’avant-garde des nouvelles tendances littéraires et picturales, et s’y lie avec les plus grands artistes de l’époque. Grands amateurs d’art, les frères Natanson soutenaient les Nabis : Bonnard, Vuillard, Vallotton, Toulouse Lautrec. Renard fit la connaissance d’autres artistes encore : Steinlein, illustrateur attitré du Gil Blas illustré et de ses textes, puis au Rire Hermann-Paul, Gramadoch et Vallotton dont le crayon accompagnait ses proses humoristiques. C’est Paul Ollendorff, co-directeur du Gil Blas, qui édita en 1892 un des tout premiers romans de Jules Renard L’Écornifleur, et Henri Floury, jeune éditeur de L’Image (1896-1897) qui publia, en 1899, les Histoires naturelles avec les lithographies de Toulouse-Lautrec. L’artiste et l’écrivain partageaient une même sensibilité artistique et des dons aigus d’observateur de la nature. Cette édition aujourd’hui très précieuse fut un échec commercial. Cinq des lithographies originales de cette édition sont conservées au département des Estampes et de la photographie.
Poil de Carotte et les Histoires naturelles n’ont cessé d’inspirer les illustrateurs, grâce à eux l’écrivain a pu atteindre un large public à travers des collections bon marché. Ainsi en 1902, la nouvelle édition de Poil de Carotte chez Flammarion est illustrée par Vallotton. Quant aux Histoires naturelles, elles ont été éditées, de 1896 à 1909, à quatre reprises. L’édition Flammarion de 1904 est confiée à l’illustre Pierre Bonnard. Dans cette œuvre de jeunesse, l’artiste utilise la technique du dessin au pinceau et à l’encre de chine qui contribue au caractère spontané et juste de chaque croquis. En 1909, ce texte parait dans la « Modern-Bibliothèque » de Fayard, collection populaire à fort tirage, avec des illustrations de Benjamin Rabier. Maître du dessin animalier, Rabier avait une vision humoristique et anthropomorphique du monde animal qui trouva aussi à s’exprimer dans ce bestiaire. Outre le célèbre Journal qui a contribué à asseoir sa postérité, Renard triompha encore au théâtre avec l’adaptation de Poil de Carotte au théâtre Antoine en 1900 ; son style correspondait aux exigences du théâtre naturaliste dont André Antoine a été le maître d’œuvre. Comme ses contemporains l’avaient déjà pressenti, Jules Renard est devenu un classique, constamment réédité.
Anne Pasquignon - direction des Collections, département Littérature et Art