La menace de grands froids pour les sans-abris

Publié le 02 décembre 2010 par Sequovia

S’il est vrai que la neige, le froid, les décorations de Noël ont un côté très charmant pour ceux et celles qui se prélassent au coin du feu, il en va tout autrement pour celles qui ne disposent pas d’un  »chez soi » digne de ce nom. Diverses actions ont été lancées pour venir en aide aux sans-abris qui subissent de plein fouet cette nouvelle vague létale de grands froids.

  • Hébergement des sans-abris

Quelques données
Selon une étude de l’INSEE, 800 000 personnes en France auraient vécu dans la rue à un moment donnée de leur existence. L’évaluation du nombre de sans-abris est assez difficile à réaliser. Néanmoins, la dernière étude INSEE établit 86000 SDF en France, les associations tablent plutôt sur 100 000 voire 300 000 sans-abris en France. Autre fait important, 1 SDF sur 3 a un travail ! Mais le revenu de ce travail n’est pas suffisant pour payer un logement.
En 2009, la rue a tué 406 sans-abris, il s’agit majoritairement de morts prématurées. Entre janvier et juin 2010, 247 personnes sans-toit ont péri, elles avaient en moyenne 46 ans. Depuis 1998, le collectif Morts de la rue a comptabilisé 2050 morts d’une moyenne d’âge de 47,6 ans. Cette année, la première victime du grand froid était une marseillaise, retrouvée sans vie le dimanche 29 novembre.

Sélectionner les sans-abris à l’entrée des centres d’accueil ?
Alors que la vague de froid sévit déjà depuis quelques jours, le quotidien Libération a publié lundi 29 novembre des documents administratifs révélant l’exclusion de centres d’hébergement d’urgence de sans-abris sans-papiers en cas d’affluence. Dans plusieurs départements français, des cas de sélection selon le « statut administratif » auraient eu lieu, selon le journal.
 Pour rappel,  l’article L 111-2 du code de l’action sociale interdit toute discrimination de cet ordre. La Fédération des associations d’accueil et d’insertion, qui gère 95 % des centres d’hébergement d’urgence en France, a souligné à ce titre que les étrangers ne sauraient servir de « variable d’ajustement ».

Les mesures d’accueil lancées par l’Etat
A Paris, 3000 places d’hébergement d’urgence sont dédiés à l’accueil des sans-abris et 5000 places en hôtel sont disponibles par intermittence. Pendant les périodes de grands froids, 2000 places supplémentaires peuvent être débloquées. Le plan hiver 2010-2011 préparé par la mairie – pour un coût de 500 000 euros – prévoit notamment la mise à disposition de six gymnases. Par ailleurs, les maraudes du SAMU social sont renforcées dans les bois de Vincennes et Boulogne, où campent de nombreux sans-abri.
Nathalie Kosciusko-Morizet (Ministre de l’Ecologie et du Développement Durable) et Benoist Apparu (Secrétaire d’Etat chargé du logement) ont fait le point, le 22 novembre, sur les dispositifs gouvernementaux en faveur de l’hébergement et de l’accès au logement. Les ministres ont notamment rappelé que la France dispose aujourd’hui de 113 000 places d’hébergement tout au long de l’année, soit 20 000 places de plus qu’en 2007.
La période hivernale ne doit plus relever d’une gestion de crise. Pour y parvenir, le Gouvernement a mobilisé des moyens importants pour créer un service public de l’hébergement et de l’accès au logement. Depuis l’hiver 2008, le plan grand froid n’est plus déclenché au niveau national mais à l’échelon départemental par les préfectures. L’appréciation de la conduite à tenir en cas de grand froid est laissée aux préfets qui pourront s’appuyer sur les nouveaux services intégrés de l’accueil et de l’orientation (SIAO), induits par la réforme de la politique de l’hébergement.
Opérationnelle dès cet hiver, cette plate-forme téléphonique unique joue un rôle central dans la gestion quotidienne de la période hivernale et dans la coordination des activités de la veille sociale (maraudes, 115, accueil de jour et de nuit). Elle a vocation à centraliser toutes les demandes de prise en charge des personnes sans abri ou risquant de l’être en offrant un accueil et une première évaluation médicale, psychique et sociale des personnes. Une mise à l’abri immédiate s’il y a besoin, suivie d’une orientation vers la solution la plus adaptée est ensuite proposée. Mais le SIAO doit surtout garantir la continuité du parcours de la personne en évitant les ruptures de prise en charge en proposant des parcours individualisés. Une enveloppe de 6 millions d’euros a été consacrée en 2010 à leur installation.

  • Les associations s’inquiètent des conditions d’accueil des sans-abris

Christophe Louis, président du collectif les Morts de la rue, s’insurge contre les affirmations de  Benoist Apparu selon lesquelles tous les appels reçus par le 115 déboucheront sur des propositions d’accueil. Pour C. Louis « Tous les appels vers le 115 ne déboucheront pas sur une prise en charge, tout simplement car si l’on dit au SDF de rappeler un peu plus tard pour avoir une réponse et qu’il ne le fait pas, on considère que la demande est satisfaite, ce qui est hypocrite. » Et d’ajouter : « Quand Benoist Apparu prétend que 95 % des places sont en chambre seule ou à deux, il ment. Il reste encore énormément de dortoirs, et si les gens refusent de se mettre à l’abri, c’est en grande partie pour cette raison. »
Les associations ne veulent plus se contenter d’accueillir les sans-abris dans des situations d’urgence mais bien de proposer des hébergements qui débouchent ensuite sur une réinsertion sociale. Pour Sébastien Prot, directeur de La Mie de Pain association qui gère le Refuge, « l’insuffisance se situe au niveau du logement d’insertion« .

  • La Charte Européenne pour le développement des missions sociales dans les gares

La Charte Européenne pour le développement des missions sociales dans les gares a été signée le 29 octobre 2008, dans la Salle du Conseil du Palais de la Province de Rome, par les représentants des compagnies ferroviaires FS (Italie), SNCF (France), SNCB (Belgique) et CFL (Luxembourg). La compagnie polonaise PKP a joint dans le 2009. Conscientes de leur responsabilité sociale, en signant la Charte elles partagent donc une vision de l’engagement citoyen et solidaire, notamment sur la question de la prise en charge de l’errance des populations fragiles et des règles de sécurité en vigueur dans les emprises ferroviaires, convaincues que la problématique d’exclusion sociale doit être abordé en réseau avec tous les acteurs de proximité du secteur public et du secteur privé.
Par ailleurs, le 24 novembre dernier, la SNCF et la ville de Paris ont signé un accord pour améliorer la prise en charge des personnes en errance dans les gares parisiennes, intitulé « Pacte de soutien à la charte européenne pour le développement des actions sociales et sociétales dans les gares« . Le texte prévoit notamment une formation spécifique à destination des agents SNCF avec la désignation d’un référent social dans chaque gare.

  • L’avis Sequovia

Nous oublions parfois que notre devise nationale inclut le mot « fraternité ». Se dévêtir de temps en temps de notre manteau individualiste ne peut faire de mal à personne. Nous ne sommes certainement pas en mesure de sauver l’humanité. Néanmoins, donner une petite pièce, un peu à manger ou même un sourire ne représente pas grand-chose pour nous qui rentrons tous les soirs dans notre chaumière chauffée mais certainement beaucoup pour celui qui retrouve son bout de carton au coin de la rue. A chacun de faire un petit geste avant les fêtes de fin d’année !