C’était, dès la FIAC, l’endroit dont on parlait (comment, vous n’y êtes pas encore allé ?) La collection Rosenblum, commencée il y a quatre ans par un couple d’amateurs d’art, est visible sur rendez-vous (pour 10€) dans un grand entrepôt luxueusement aménagé, du côté de la (quasi défunte) rue Louise Weiss. Je n’ai pas trouvé de texte en français sur leur site (Monsieur Toubon ?), donc non-anglophones s’abstenir, mais l’élogieuse revue de presse est multilingue; vous pouvez aussi vous inscrire et faire partie de la ‘community’, du ‘network’ de ‘friends’. La première exposition d’oeuvres leur appartenant, ‘curatée’ par eux-mêmes, se nomme ‘Born in Dystopia’ (euh, nés dans la dystopie ?) En deux mots, ça frappe fort, mais, à part Loris Gréaud et sa famille de rhinocéros tape-à-l’oeil (qui ne va pas me réconcilier avec le petit chéri du Palais de Tokyo et d’Yvon Lambert réunis), le reste m’a plutôt plu, voire ému, intrigué ou séduit.
Ému ? La première pièce de leur collection, celle qui les a faits collectionneurs, est un conteneur à valises, comme on en voit dans tous les aéroports, déchiqueté par une bombe, tordu, béant, avec les valises explosées, dégueulant de vêtements, d’effets personnels, tragique. C’est une installation de Christoph Büchel (dont je n’ai pas noté le titre, et je ne le trouve pas sur leur site) qu’ils ont achetée après le 11 septembre, pour pouvoir dire un jour à leurs enfants : voilà le monde dans lequel nous avons vécu.
Intrigué ? Comme chacun sait (en tout cas, paraît-il, les adeptes de l’église des saints des derniers jours), la fin du monde est proche, sans doute le 12/12/2012. Ce jour-là, venez vous réfugier dans la collection Rosenblum où a été installé un abri anti-tout, anti-atomique, anti-bactériologique, anti-chimique, etc., pour survivre dans le monde apocalyptique qui nous attend. Installé dans un espace de néons et de miroirs qui le multiplie à l’infini, ce caisson est (presque) prêt à l’emploi. Pour survivre, outre une porte blindée et un filtre de décontamination de l’air en état de marche, il comprend un habit de cosmonaute en patchwork et une citation de Bruce Nauman déroulée, mise à plat. Ce cocon paranoïaque, ce retour au giron amniotique se nomme ‘Second Home’ de Matthew Day Jackson, artiste très présent dans cette collection.
Séduit ? Par la combinaison d’un colleur d’affiches (ou est-ce plutôt un peintre en bâtiment qui va recouvrir les affiches de peinture blanche ?) de Duane Hanson, d’une variation murale d’Allen Ruppersberg sur les poèmes d’Allen Ginsberg et de textes de Sun Ra revus par Lili Reynaud-Dewar. Et par la composition pétrolière d’Andrei Molodkin, où chacun de nos bien-aimés leaders bénéficie d’une transfusion cardiaque de pétrole saoudien, tchétchène ou iranien (en haut).
Photos de l’auteur.