Tunnel sous la Manche : vingt ans déjà !

Publié le 02 décembre 2010 par Mpbernet

Alors que St Pancras est aujourd'hui presqu'aussi proche qu'une station de métro parisien, souvenons-nous du moment, le 1er décembre 1990 à 12h, 12 minutes et 12 secondes, où les deux équipes de percement du tunnel (et plus précisément de la poignée de mains de Philippe Cozette et Graham Robert Fagg, à 100 mètres sous la mer, qui reste gravée dans les mémoires) ont fait tomber le dernier morceau de roche calcaire, réalisant ainsi la jonction entre les deux parties du premier tunnel trans-Manche...
Quelle émotion : un trou d'homme par lequel des fanions français et britanniques furent échangés, puis l'élargissement, la construction du système complexe des différents tunnels, la mise en place de l'infrastructure majeure, permettant en tout temps* un passage de voyageurs et de marchandises sous la mer. Un exploit technique et humain, rêvé par Napoléon 1er lui-même dès 1801, inauguré ensuite en grande pompe en 1994 par les deux monarques de l'époque : Elizabeth II et François Mitterrand.

Car le tunnel sous la Manche est bien le chantier du siècle. Au total, près de 10.000 personnes, dont 6.000 sous terre, ont été mobilisées sur au moins seize grands chantiers répartis de part et d'autre de cette mer qui, désormais n'en est plus tout à fait une.

Les prouesses techniques réalisées par les hommes comme les machines qui creusèrent et bâtirent ce "lien fixe" sont à la mesure du défi. Sept jours par semaine, 24 heures sur 24, les équipes se sont relayées avec un souci permanent de rapidité, d'efficacité et de coordination, afin de respecter les délais draconiens accordés pour la "livraison" des 150 km (trois fois 50) de tunnels et des infrastructures gigantesques qui l'accompagnent. Une livraison, en effet, fixée à quatre années seulement après le premier coup de pioche, donné en janvier 1988.

Pourtant, les difficultés liées à ce type d'équipement hors du comment ne manquèrent pas : la nature de la roche, les couches géologiques gorgées d'eau, l'adaptation des immenses tunneliers et..... la nécessité d'un gigantesque effort de synthèse cartographique. En effet, les cartes britanniques n'étaient pas établies d'après le même système de projection que les cartes françaises. Impossible, en clair, de raccorder ou de superposer les deux types de cartes.

D'où toute une série de «bricolages » très minutieux : raccordement des réseaux géodésiques de base des deux pays, création d'un système de coordonnées spécifiques à l'aide du réseau de satellites militaires américain Navstar, méthodes gyroscopiques...Sur la dernière centaine de mètres avant la jonction du tunnel de service, enfin, des forages de contrôle ont permis aux équipes d'affiner les trajectoires pour la tant attendue rencontre des deux tunneliers.

Bref, un immense pas en avant technologique, et aussi financier, pas très favorable aux épargnants d'origine qui y ont laissé bien des plumes. Mais aujourd'hui, nous sommes si naturellement fiers d'avoir réussi, nous la vieille Europe, à réaliser cet exploit, que nous le trouvons banal ! Et, qu'est-ce que vingt ans......??
 

* sauf par temps de neige comme ce matin où 50% des trains sont supprimés car on doit réduire la vitesse. Nous avons bien fait de partir à Londres en novembre !