Wikileaks, avec la nouvelle mise en ligne de documents confidentiels, n'en est pas à son coup d'essai. En 2009, le site mettait en ligne l’intégralité du procès Dutroux, en 2010 était diffusée une vidéo de l’armée américaine dans laquelle deux photographes de l’agence Reuters étaient tués à Bagdad lors d’un raid aérien et 91 000 documents militaires américains secrets sur la guerre en Afghanistan. En octobre, en collaboration avec Le Monde, le Guardian, Der Spiegel, le New York Times, et Al Jazeera, mise en ligne de 391 000 documents secrets sur l’Irak (morts, tortures).
C'est encore en collaboration avec cinq grands médias : Le Monde, le Guardian, Der Spiegel, le New York
Times, et Al Jazeera, que WikiLeaks diffuse 250 000 télégrammes diplomatiques. L'affaire qui suscite une controverse mondiale, montre de
manière flagrante, la synergie et la complémentarité entre différents médias. WikiLeaks joue le rôle de fournisseur de contenu - il n'est pas le seul en son genre -, et s'appuie sur des
médias "traditionnels" et bien en vue, pour trier, analyser et rédiger des articles à partir de cette matière afin d'y apporter une plus-value journalistique. Le bénéfice est dans les
deux camps qui voient ainsi leur lectorat augmenter de manière conséquente.
Dans le champ de l'information apparait ainsi un nouvel acteur qui maitrise la technologie et devient capable de récupérer et de diffuser des milliers de documents et l'on aura beau débattre des avantages et inconvénients de cette manière de faire, il faudra bien en tenir compte afin de conduire une réflexion et de définir une déontologie journalistique adaptée à cette évolution.
Pour l'heure, les informations livrées ont un petit air cancanier qui prête plus à sourire qu'à s'indigner et le reste n'étonne pas vraiment. Certaines font franchement rire : le quotidien helvétique Le Temps révèle une affaire diplomatique de la plus haute importance concernant la suppression des trottoirs dans une commune helvétique où est posté un ambassadeur des Etats-Unis. Dans un article savoureux et plein d'humour, Joelle Kuntz détaille la teneur des échanges :
"l’ambassadeur américain dans ma commune décrit avec finesse les efforts accomplis par les autorités pour encadrer au plus près les habitants. «Un modèle», affirme-t-il. Par exemple, «des flèches viennent d’être peintes sur une chaussée pour confirmer aux automobilistes qu’ils peuvent aller à gauche, à droite ou en face comme ils le font depuis toujours, selon les dires d’un ancien maire. De même, une bande jaune destinée aux cycles et vélos a été ajoutée, afin de combler le manque d’indication officielle qui était de nature à troubler la population des cyclistes.... (...) L’histoire retiendra surtout de sa dépêche sa demande de prolongation de son mandat dans ma commune pour ses derniers quatre ans avant la retraite" .... Allez le lire, c'est un modèle du genre.
Le phénomène WikiLeaks secoue à tous les niveaux et le fondateur du site, par qui le scandale arrive, devient ennemi public numéro un mondial. Mais le phénomène est en marche qui obligera à modifier différentes pratiques. Vers la fin du secret d'Etat ?