Et s'ils avaient pu...

Le ciel est poudreux. À ma gauche, les lampadaires l'ont teinté en orangé. À ma droite, il a sa mine naturelle, sombre.
Dehors, pas une personne. Le froid fait loi. Personne n'ose le défier. Et pourtant, il sent bon...
Il est plus de minuit. Mes doigts sont gelés. Je fume. Le bout incandescent de ma cigarette a la même couleur que le ciel, côté gauche.
Les arbres tout vêtus de blanc ressemblent à des sapins de Noël sans guirlandes.
Le silence est déconcertant : il apaise autant qu'il inquiète.
Sagement, Seven renifle la fine couche de neige sur l'herbe. J'ai froid pour sa truffe, mais elle ne semble importunée. Je la regarde longuement. À quoi pense-t-elle ?
J'ai posé ma main parterre et laissé son empreinte dans la neige. Elle ressemble à celles en couleur que laissent les enfants à la maternelle sur des feuilles en papier. On dirait un grand papillon blanc abandonné...
En maternelle, les enfants sont surprenants. Leurs dessins sont surprenants.
J'en ai plein des dessins d'enfants. Je les garde soigneusement. Ils datent de l'époque où j'étais aide-éducateur. Mes artistes en herbe me les avaient offerts et je m'étais dit qu'un jour, je les accrocherais chez moi... Je les afficherai à Chalaux.
J'aurais pu devenir maître. C'est marrant d'être appelé maître par une petite voix toute mignonne...
Mes asters ont croulé sous le poids de leur blanc manteau. Ils sont un peu comme moi. Je compatis. Si j'avais su, je les aurais cueilli et je les aurais mis dans un vase près de mon lit. Ils m'auraient chanté de douces berceuses et réconcilié avec le sommeil. Et s'ils avaient pu, je suis sûr qu'ils m'auraient appris la perfection... Mais on dit que les fleurs ne dévoilent jamais leurs secrets. Juste leur beauté...
Pascal se remet de son rhume. Il fait vraiment trop froid...