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Les « négresses à plateau »

Publié le 14 mai 2007 par Argoul

Today, we have just missed the « négresse a plateau » entertainment. Thos Black women are tortured for fashion: they have to cut their lower lip to introduce an about 12 centimetres of diameter’s tray. By chance, rain is coming during the night and the trail will be too much muddy for the cars. We will not see the wild “négresses a plateau” but only one in the village, and that’s enough. We come for meet people, not for a zoo show. And the children around are more lovely than any butcherised woman.

Le programme d’enfer prévu pour aujourd’hui et décrit de façon apocalyptique par J. hier soir est tombé à l’eau. Ou plutôt, c’est l’eau qui lui est tombé dessus. Nous devions parcourir 80 km de pistes défoncées et boueuses pour descendre dans le parc de Maggo « chasser le Mursi ». Cela n’aura pas lieu, les dieux sont avec nous, il a plu une grande partie de la nuit et cela continue par intermittence ce matin, rendant pour mon bonheur les pistes impraticables.

Négresse à plateau, femme girafe et cannibale emplumé restent les images culturelles d’une négritude fantasmée. L’avant-garde esthétique des années vingt fut hantée de rêveries coloniales. Aujourd’hui, malgré « la culture », osons la critique : ce voyeurisme est un parti-pris complice, renforçant une sorte de sentiment intime de supériorité qui est encore colonialisme. Cette inconscience de soi est dangereuse. L’ignorance des déclencheurs d’images laisse agir l’inconscient, le fantasme, le cerveau reptilien. Alors que toute la démarche de la culture est justement de tenter de nous en sortir pour que notre cerveau le plus évolué maîtrise l’ensemble de notre humanité. « Lieu de mémoire », la négresse à plateau ? Foutre ! comme aurait dit le père Ubu : ne sacralisons pas « la culture » comme si les Dada et les Cocteau des années folles devaient agir sur nous pour l’éternité. Ils furent un moment, nous avons le nôtre. Osons être « nous ».

Le lever de 6 h se trouve donc contré par le recoucher de 6 h 20, jusqu’au petit-déjeuner de 7 h 30. La pluie oblige à improviser et ce n’est pas plus mal.

J. nous emmène donc nous promener dans un village voisin, très vert, aux maisonnettes entourées de jardinets. Des gamins traînent partout, souriants, toujours pas à l’école bien que nous soyons mardi et que le coup de la « fête musulmane » nous ait déjà été fait hier.

Deux femmes Mursi sont là au village, dans une hutte où un homme, Mursi lui aussi, fait la classe à quelques mômes. Une négociation globale a lieu pour les inévitables photos de la lèvre inférieure distendue dans laquelle la femme porte un « plateau » de terre cuite de la taille d’une soucoupe. Elle n’est pas belle, la femme à plateau ; je ne sais quel tyranneau a un jour considéré que cette mutilation faisait « chic », mais c’est loin d’être réussi ! L’horreur survient surtout lorsque la femme, que cela torture, ôte le plateau de cette lèvre. L’anneau de chair inutile pendouille alors comme quelque rondelle de calamar, rose et caoutchouteux. La pratique tend à disparaître, nous dit J., eh bien tant mieux ! Je militerai pour que cette incongruité soit supprimée des circuits touristiques futurs. Ce genre de voyeurisme n’est pas digne de « voyageurs ». Nous ne sommes pas venus dans un cirque voir des « phénomènes » mais rencontrer des gens qui ont un autre mode de vie. La soumission de la femme à des pratiques barbares ne saurait être cautionnée par la distribution de billets à chaque exhibition.

En revanche, nous avons attiré à nous quantité de gamins et gamines de toutes tailles et nous en profitons pour faire moult portraits. Ils s’amusent toujours de se voir figés sur les écrans dans diverses expressions et grimaces, et en rajoutent, comme tous les gosses qui sont un peu cabots.


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