6h30 du matin, le réveil sonne. Il est temps de se préparer pour ce second marathon. Depuis la mi-avril j’y pense régulièrement. Aujourd’hui plus de raison de reculer, il faut y aller, c’est le jour J. A Berlin j’avais fait 4h31′, plein de crampes depuis le Km26. L’objectif est maintenant de faire 4h05 à 4h10. Mes entraînements et mes séances tests me prouvent que j’en suis théoriquement capable, alors y’a plus qu’à…
Habillage, petit dej de 7h à 7h30 composé de deux tasses de café au lait bien sucré, deux tartines de Nutella et une Banane. Je ne peux en avaler plus. Mon estomac commence à se nouer un peu car contrairement à Berlin, je sais maintenant ce qui m’attend et je sais que cela va être difficile. Comme me dit mon ami Patrick, “le plus dur en parachute c’est le deuxième saut”, la Rochelle c’est mon deuxième saut dans l’inconnu après Berlin. Il tombe de la neige fondu pendant mon repas du matin. Je m’habille assez chaudement mais pas trop car je sais d’expérience que l’on prend facilement 10°C à l’effort. Un T Shirt manche longue en coton, un polo de course en polaire très fine, un coupe vent. Pour les jambes, un fuseau fin, chaussettes Run 800 usées, mes runnings (Nike Triax) qui ont bientôt 800K. Un Camel back sur le dos rempli de 1,5l de solution glucosée et quelques gels endurance et barres énergétiques. Un bonnet, des gants de soie.
Mon ami qui m’héberge si gentiment m’accompagne jusqu’au sas de départ. Il reste d’ailleurs avec moi à papoter quasiment jusqu’au signal de départ. C’est marrant de voir que finalement l’organisation n’est pas très stricte avec une absence de zone réservée aux coureurs. Pas non plus de contrôles des dossards au départ.
Il fait 0°C, le pluie s’est pour l’instant arrêtée. Nous passons la ligne en trottinant, puis nous remarchons sur 500 mètres, la zone de départ est trop étroite. Il faut attendre 2km pour prendre vraiment son rythme. Je me cale sur ma montre GPS (Forerunner 405) et je tente peu à peu de rattraper mon temps cible au KM soit 5′50. Après 10km, je suis au temps cible, je passe même à 5′45″. Je temporise un peu en me rappelant les crampes de Berlin. au Semi je passe en 2h02′30″ soit un marathon théorique en 4h05′ mais je sais aussi que le deuxième moitié c’est autre chose, c’est ce pourquoi on est tous là, c’est l’effet marathon. Les deux semis ne se ressemblent pas. Ils sont comme deux faux jumeaux. Un petit blond gentil et calme et un grand brun, torturé, exigeant, qui ne fait aucune concession et fait ses caprices sans prévenir. La pluie s’est n’est plus de la partie, il fait toujours aussi froid (entre 0°c et 2°C. Quelques minutes après mon passage au semi, j’entends le résultat de la course, le gagnant fait 2h09 et quelques poignées de secondes, incroyable. Au 30ème km je jubile, je passe en moins de 3h, je me dis que c’est possible, que je vais dompter la bête… Au 33ème je fatigue mais je m’accroche, la moyenne passe de 5′47 à 5′53, j’ai encore de la marge. Au 35ème je passe en un peu moins 3h30, je suis maintenant à presque 6′ par km je souffre un peu mais je tiens. Je m’arrête au ravito pour marcher un peu et reprendre des forces, je sais que c’est le dernier avant l’arrivée. Au moment de repartir une douleur vive, instantanée, irrémédiable, atroce dans les deux mollets simultanément. Je m’arrête net en criant de douleur. Je me dis “ça y est ! La bataille contre mon corps est lancée” et je tente de repartir comme il y a 10 mois à Berlin. Ce fameux jour où je croyais avoir connu le fond de la douleur. Ici, impossible, à chaque foulée mes deux mollets deviennent une boule de béton. Je ne peux plus courir. Ce n’est plus un problème de douleur, c’est juste mécanique, la jambe ne fonctionne plus. Alors j’essaye de marcher. Là, surprise, cela se fait, sans mal. Tant que je ne décolle pas la jambe du sol, mes muscles de la jambe me laissent tranquille. Alors je marche, le plus vite que je peux. J’enchaîne les pas sur 7km, en rageant, en étant en colère contre ce corps qui ne m’autorisera pas encore une fois à être satisfait de ma performance. Je fais ces 7,195km en 1h04 pour finir en 4h34, soit 3 min de plus qu’à Berlin en 2009. Les 500 derniers mètres au milieu de la foule, me laisse encore un goût amer dans la bouche. J’ai juste fait 10 foulées pour passer la ligne en courant, pour sauver la face. La course à pied est une école d’humilité.
Ce soir, je ne sais pas si je referai un jour un marathon. Il y a quelque chose de formidable dans ce défi personnel, mais quelque chose d’idiot aussi, car je suis maintenant cloué pour 3 longues semaines au moins avant de reprendre mes sorties dans la campagne ligérienne.
Pour ceux qui voudront faire ce marathon en 2011 ou après sachez que la course est très bien organisée, que les bénévoles sont formidables, que les lots sont superbes (coupe-vent, couvre oreille, couteau à huîtres estampillés Marathon de la Rochelle), bourriche d’huîtres, rose pour les dames… plein de bonne humeur, gentillesse, simplicité et authenticité sont les maîtres mots de ce marathon qui mérite bien sa place de deuxième course nationale en terme d’affluence après le marathon de Paris. Il faut toutefois réserver son hôtel très tôt car les capacités d’accueil de la ville sont limités (sauf si on a des amis/collègues de boulot, qui sont près à nous recevoir comme des rois !!!) Le parcours est en deux boucles assez plates avec toutefois 2 ou 3 faux plats de 300m environ. Le temps à cette période de l’année peut être très problématique pour qui veut faire une perf. Mais est-ce vraiment là l’essentiel ?
Merci à Eric qui m’a donné l’occasion de passer un très beau Week-end à La Rochelle en dépit de la petite déception du temps de course.