Au champ du déshonneur

Publié le 28 novembre 2010 par Ansolo

"Tout est perdu, fors l'honneur" a, parait-il, écrit François 1er au soir de sa défaite de Pavie. Marc Lièvremont ne pourra même pas avoir cette consolation. Et ce n'est pas l'essai de pénalité accordé aux Français suite à plusieurs mêlées à cinq mètres de la ligne Australienne qui y changera quoi que ce soit.

Car les joueurs du XV de France ont sombré comme jamais, incapable d'opposer ne serait-ce qu'une réaction d'orgueil face à des Australiens qui récitèrent un rugby précis et léché, mais pas nécessairement "injouable" comme peut l'être celui des Blacks. Face à ces Wallabies tout heureux de cette soirée "portes ouvertes", les Bleus ont fait leur pire match depuis longtemps.

La seule ampleur du score en dit plus long que n'importe quel discours : 59 à 16 !

Jamais le XV de France n'a encaissé autant de points sur son sol. Rarement on vit les porteurs du maillot frappé du coq afficher une telle résignation face aux vagues offensives adverses, un tel manque de combativité et, disons-le, un tel manque de respect pour le maillot qu'ils avaient l'honneur de porter.

Ce match nous a rappelé celui, catastrophique, qui oposa les bleus aux Springboks en 1997 au parc des Princes, et qui se solda par un cinglant 52-10. Mais on se souvient que cette fameuse déroute fut, pour le XV de France, le point de départ d'une nouvelle ère, marquée par un grand chelem en 1998 et une finale de coupe du monde. Il n'est vraiment pas certain que la déculottée subie contre les Australiens aura les mêmes vertus.

Que faire maintenant ?

On pose la question d'une démission de Marc Lièvremont. Pour deux raisons. En premier lieu, cette déroute, après celle vécue en Argentine en juin, est d'abord de la responsabilité du sélectionneur en chef. Ensuite, on ne pourra pas faire pire que ce à quoi nous avons assisté hier soir.

Evidemment, on rétorquera qu'il est trop tard, que la coupe du monde est maintenant trop proche pour évincer le sélectionneur actuel. Mais comment ne pas envisager une telle solution quand on constate que les seules paroles de Marc Lièvremont après le match sont pour exprimer son "incompréhension" ou son état de choc ?

Ce blog a depuis le début, défendu Marc Lièvremont et sa vision du rugby. Mais il y a désormais urgence pour le sélectionneur à se comporter enfin comme un chef et ne plus donner cette impression qu'il ne veut mécontenter personnes en prenant des demi-décisions ou en refusant de trancher.

Car il lui faut maintenant trancher. Faire des choix et s'y tenir. Faire jouer les internationaux à leur place. Et travailler. Car l'indigence offensive affichée depuis trop longtemps ne saurait perdurer. La mêlée a, hier soir, affiché sa solidité et son efficacité en première mi-temps. Mais celle-ci n'a pas durée après les sorties de William Servat et Thomas Domingo, mettant au jour les carences des remplaçants. De surcroît, la mêlée n'est plus qu'une arme parmis d'autres. Elle semble être devenue la seule ressource tricolore.

La défense, pourtant si solide habituellement, a craqué de toute part contre des Australiens efficaces mais pas révolutionnaires dans leurs schémas tactiques. Il est facile de dire que les bleus ont lâché mentalement. Mais il faut rappeler qu'ils ont encaissé leur premier essai dans les toutes premières minutes du match. A un moment où le mental était encore là...

Au lendemain de cette Bérézina collective (conditions climatiques comprises), on ne réclame pas un aggiornamento du rugby Français dont on sait pertinemment qu'il en est incapable. Mais au moins des mesures claires pour éviter un gâchis qui se profile, à maintenant 10 mois du coup d'envoi de la coupe du monde.