"Valse avec Bachir"

Publié le 28 novembre 2010 par Sheumas

   Petite pause dans cette balade à La Rochelle qui reprendra d’ici quelques jours, le temps d’infiltrer quelques articles relatifs au cinéma et à son actualité récente. Les deux films auquels je me consacre ces jours-ci tournent en ce moment dans les cinémas de La Rochelle car ils sont programmés pour les lycéens et collégiens dans le cadre de leur ouverture au septième art. Commençons par « Valse avec Bachir ».

   Toute démarche impliquant la mémoire est à la fois intéressante et troublante,  notamment dans le domaine des œuvres d’art : cinéma, photographie, peinture, musique, littérature... Certains textes viennent immédiatement à l’esprit quand on réfléchit à ce domaine, à commencer par l’épisode à la fois anodin et quasi mystique de la madeleine de Proust... « Vous prendrez bien une tasse de thé ? Sucre ? Lait ? Biscuits ? Merci madame !... »

   Pas de tasse de thé ni de petits gâteaux mielleux dans le film d’animation documentaire primé au Festival de Cannes en 2008, « Valse avec Bachir ». En même temps qu’une plongée dans l’histoire récente du Proche Orient, le réalisateur israélien Ari Folman entraine le spectateur dans un douloureux parcours autobiographique.  Il choisit, en effet, non pas de raconter une histoire linéaire mais de reconstituer, à travers les « débris » de mémoire de son personnage, l’épisode insoutenable des massacres de réfugiés palestiniens de Sabra et de Chatila auquel, dans les années 80,  il a été, malgré lui, mêlé.

   Comme l’explique dans le film un psychanaliste ami du narrateur, il arrive parfois que des pans entiers d’une histoire personnelle soient ensevelis, évacués totalement de la surface du conscient au point de disparaître définitivement. Cette opération de négation du vécu s’explique en partie par le caractère insupportable de certaines expériences. Dans ce cas-là, si on peut dire que, chez Proust, le temps perdu est une fontaine enchantée dont la source est à libérer dans la « mémoire geyser » du narrateur, on peut dire aussi que, en ce qui concerne « Valse avec bachir », la mémoire est « une mine », une mine susceptible d’exploser si, au terme d’un effort courageux, le personnage entreprend de la déterrer avec l’aide d’autres témoins du drame qui, eux-mêmes, entretiennent avec le passé un rapport à la fois trouble et dangereux.