J'avais dans mon jardin quelques fleurs secrètes
Que tu cueillais parfois d'un geste innocent
Pour que ta chambre un temps prenne un air de fête
Et s'envole en rêvant sur la brise du vent
J'avais entre mes mains le pinceau de l'artiste
Pour croquer ton visage comme un fruit défendu
Qui s'offrait au public comme le clown en piste
Et pleurait en coulisse dans le noir revenu
J'avais dans mes cheveux des senteurs de Provence
Que tu humais la nuit dans le fond de mon lit
Et qui tissaient des brumes dans les matins d'enfance
Où tu te réfugiais pour chercher un abri
J'avais des solitudes au fond de mes prunelles
Que tu cassais parfois pour montrer le soleil
Qui éclatait son sang dans les pauvres ruelles
Et mourrait au couchant avec des cris vermeils
J'avais dans les chemins des pas de laboureur
À retourner les champs pour que pousse la vigne
Ses grappes se pressaient là tout contre mon coeur
Pour se changer en vin pour se changer en signes
J'avais déjà tout çà et puis je t'avais toi.