Quand les huitres se meurent…

Publié le 25 novembre 2010 par Blanchemanche
25 novembre 2010
http://www.top-actu.com/2010/11/quand-les-huitres-se-meurent/
Conchyliculture

La Rochelle. Charente-Maritime. Sur l’ensemble des côtes françaises la situation de la filière ostréicole devient alarmante. Sur la côte Charentaise-Maritime le bilan n’est pas mieux, l’huitre est en train de disparaitre.
Depuis 2008, les ostréiculteurs font face à un danger microscopique à effets macroscopiques. Un virus attaque les huitres dès leur naissance et décime progressivement des centaines de tonnes de coquillages mettant en péril tout un pan de l’économie du département. Les taux de mortalité atteignent 90%.

oshv1 Image Ifremer
Le virus OsHV-1, un tueur d’huitres.
En 2009 les études épidémiologiques suggèrent que le virus OsHV-1 joue un rôle important dans les mortalités. Mais il n’est pas la seule cause de la catastrophe. Le réchauffement de l’eau de mer et plus indirectement l’agriculture seraient complices du désastre.
Contagieux, le virus OsHV-1 s’attaque aux cellules de l’huitre l’amenant à s’autodétruire quand le mollusque est en période de reproduction. De plus, la température de l’eau de mer a augmenté significativement en passant la barre fatidique des 16°C permettant au virus de se développer et les bacteries de croitrent plus rapidement. Enfin, certains polluants et les produits phytosanitaires utilisés dans le milieu agricole pourraient avoir une incidence eux aussi quand ils se retrouvent dans les marais et l’eau des estuaires. « La chambre d’agriculture encourage les initiatives au niveau écophyto pour réduire l’utilisation de certain produit qui pourrait avoir selon la recherche une incidence sur les difficultés de l’ostréiculture » indique Luc Servant, Président de la Chambre d’agriculture, » encore qu’aujourd’hui rien n’est prouvé. »
Des scientifiques « à la rue ».
Le programme de réensemencement de sauvegarde avec des huîtres dites « R » (comme Résistantes) élaboré avec l’Ifremer et les écloserie était jusqu’à récemment considéré comme une des principales solutions à la surmortalité des naissains observée depuis trois ans. Mais début novembre, le Comité Nationale de la Conchyliculture a demandé l’arrêt du plan de réensemencement. Les naissains dits « résistants » étant également décimés par le virus.
Certains producteurs indépendants ont évoqué la responsabilité de l’Ifremer et des écloseries dans le développement de la maladie, via la dissémination de souches trop fragiles.
Aujourd’hui, L’Ifremer étudie une souche d’huîtres japonaises, une cinquantaines de ces huitres sont en test dans les laboratoires mais leur arrivée sur les étals nécessitera au moins cinq ans, selon le Comité Nationale de la Conchyliculture.
Des pouvoirs publics sourds ?
Selon le Comité de Survie de l’Ostréiculture, les pouvoirs publics restent sourds au cri d’alarme de la profession et Bruno Le Maire ministre de l’agriculture, lors de la clôture des assises de la Conchyliculture en octobre dernier « a considéré que la profession n’était pas en situation d’urgence et qu’il n’était pas envisagé de mesures significatives« .
Pourtant, coté gouvernement, il semble que le discours ne soit pas le même. Lors de son intervention du 11 octobre dernier Bruno Le Maire indiquait : « La solution ne passe pas par des aides publiques systématiques. Ce n’est pas possible et ce n’est pas souhaitable. Je le dis tel que je le pense. Il y a 85 millions d’euros d’aide qui ont été apportés sur deux ans pour prendre en charge les pertes liées à la surmortalité des huîtres. Je ne sais pas si chacun mesure, dans la période de restriction budgétaire, ce que représente 85 millions d’euros d’aide. C’est considérable. »
Des emplois menacés.
La conchyliculture emploie 8000 personnes permanents et saisonniers en Charente-Maritime dans 1252 exploitations dont 1196 ostréicoles et génère 245 millions d’euros de chiffre d’affaire. Selon le Comité de Survie de l’Ostréiculture, 60 % des exploitations sont en grande difficulté et 30 % des ostréiculteurs auront disparu en 2011.
Des prix de vente à la hausse.
Conséquence de la situation, le consommateur devra payer ses huitres de 20 à 30 % plus cher. Les fêtes de fin d’année approchent et on peut craindre, la crise aidant, que les français ne se détournent des huitres devenues trop chères. Ce qui serait un coup de massue supplémentaire et peut-être fatal donné à la profession. Et les choses ne vont pas s’arranger dans les années à venir au regard de la production qui ne cesse de diminuer. Les huitres deviendraient elles le caviar de la mer ?