(Traduction d’un texte publié par Guy Kawasaki sur OPEN Forum le 18 novembre dernier)
Q : Patron d’une petite entreprise, je pense lancer bientôt un nouveau produit. Que faire : créer un site Web pour mon entreprise ou une page fan sur Facebook ?
R : Je me suis posé la même question, il y a quelques semaines, pour le lancement de mon livre, Enchantment: The Art of Changing Hearts, Minds, and Actions. J’avais le choix entre trois possibilités : créer un site pour le livre, ajouter une section dédiée au livre sur mon site Web, ou créer une page fan sur Facebook.
Après réflexion, j’ai décidé d’ajouter sur mon site une section réduite au strict minimum (chose que je n’ai pas encore faite, ce qui est assez significatif) et de créer une page fan sur Facebook. J’ai complètement laissé de côté l’idée d’un site Web, et voici pourquoi :
1.Je suis très occupé. Concevoir un site Web prend beaucoup de temps. Ne pouvant pas le faire moi-même, il fallait que j’embauche un spécialiste ou que je dérange un ami. Je ne pourrais pas me contenter d’un modèle tout fait ou d’un design sans originalité, ce qui me ferait perdre un temps fou en discussions avec la personne chargée de concevoir le site.
2.Je suis impatient. J’aime passer de l’idée au lancement en une ou deux semaines. Concevoir un site Web, du début à la « fin » (si tant est qu’un site puisse jamais être vraiment fini), dans un laps de temps pareil est presque impossible.
3.Je suis radin – et difficile. Le principal avantage d’un site Web, c’est qu’on peut lui faire faire ce qu’on veut. Le principal inconvénient, c’est qu’on peut lui faire faire ce qu’on veut, à condition d’être prêt à payer. J’aurais voulu un site qui fasse participer les visiteurs en leur permettant de parler du livre, de publier photos et vidéos, de répondre à des quizz et de prendre part à des jeux-concours. Un site Web peut faire tout cela, à condition qu’on soit prêt à payer des milliers de dollars.
4.Je suis réaliste. Mettons que je réussisse à surmonter paresse, impatience, avarice et perfectionnisme et que d’une manière ou d’une autre, j’aboutisse à un site Web merveilleux. Les difficultés ne s’arrêtent pas là ! Il s’agit ensuite d’attirer des visiteurs. Bien sûr, j’installerais tous les boutons utiles : « J’aime » de Facebook, « Retweet » de Tweetmeme (d’ailleurs, pour ne rien vous cacher, je suis l’un des investisseurs de TweetMeme), « Tweet » de Tweeter. Bien sûr, je parlerais de mon site dans tous les articles sur mon blog et tous mes tweets, mais même ainsi, générer du trafic reste un véritable parcours du combattant.
Voici, en revanche, ce qui se passe avec une page fan sur Facebook :
1.Vos efforts sont récompensés sur-le-champ. 25 amis, un nom d’utilisateur personnalisé (Facebook vanity username), et hop, c’est parti. Un nom d’utilisateur personnalisé sur Facebook reste plus facile à obtenir qu’un bon nom de domaine. Ou alors j’ai eu beaucoup de chance il y a quelques semaines, parce que facebook.com/enchantment était disponible quand j’ai voulu l’enregistrer.
2.Des fonctionnalités déjà prêtes. Toutes les fonctionnalités inhérentes aux réseaux sociaux que vous souhaiteriez avoir pour votre site sont déjà présentes sur Facebook : commentaires, discussions, possibilité pour les visiteurs de publier photos et vidéos comme de donner leur avis.
3.Liberté limitée. Les pages fan sur Facebook ne vous laissent certes pas la même liberté qu’un site Web, mais pour les gens comme moi, c’est plus un avantage qu’un inconvénient : cela nous empêche de faire trop compliqué en termes de design et de fonctions. En gros, vous pouvez jouer sur différents niveaux d’onglets, et c’est à peu près tout. Autre avantage : les visiteurs ne s’attendent pas à ce que votre site soit unique ou révolutionnaire, parce qu’ils savent que toutes les pages fan sur Facebook se ressemblent, et c’est un environnement familier. Comme me disait Mike Murray, mon chef chez Apple : « La discipline, c’est la vraie liberté. »
4.Liberté. Dans cet espace limité qu’est une page fan sur Facebook, vous avez tout de même une certaine liberté. Vous pouvez choisir entre des centaines d’applications Facebook des fonctionnalités supplémentaires. Si vous n’arrivez pas à trouver ce que vous cherchez, vous pouvez toujours demander à quelqu’un qui sait tout sur Facebook de vous recommander un développeur Web. Pour ma part, j’ai demandé à Mari Smith, qui m’a envoyé chez Hyperarts Web Design. Deux semaines et 2.000 dollars plus tard, vous avez une page fan personnalisée qui ressemble à ceci. Si j’avais voulu ne serait-ce qu’acheter le nom de domaine que je voulais pour mon site web, il m’aurait fallu dépenser beaucoup plus.
5.Modération. Elle est plus fréquente sur Facebook qu’ailleurs sur Internet. Il faut s’inscrire pour être sur Facebook, et la plupart des gens y sont soucieux de leur image et de leur réputation. Sans oublier la possibilité de bloquer les spammeurs et les trolls et de déposer une plainte à leur sujet. Ailleurs sur Internet, il est beaucoup plus facile pour les gens malintentionnés de sévir et de polluer votre site de leurs commentaires, photos et vidéos, et beaucoup plus difficile de se débarrasser d’eux. Facebook est un environnement contrôlé, dans le bon sens du terme.
6.Rayonnement. Le plus gros avantage de Facebook, c’est son nombre de membres, 400 millions selon certaines sources. En d’autres termes, si Facebook était un pays, il serait le troisième de la planète en terme de population, derrière la Chine et l’Inde, et devant les États-Unis. Chaque fois qu’un visiteur fait quelque chose sur votre page fan, ses contacts sociaux l’apprennent. C’est le Saint Graal du marketing : un bouche-à-oreille inconscient et automatique ! Je trouve cela infiniment mieux que d’espérer que les gens cliquent sur un bouton « J’aime » ou « Tweet » sur mon site, ou recommandent le site par mail à un ami. Petite astuce : j’ai découvert que l’on peut créer un onglet « montrer » sur Facebook grâce au langage FBML. Comment ça marche ? Les visiteurs doivent « aimer » la page pour voir son contenu. Je m’en suis servi pour proposer la version PDF de mon premier livre, The Macintosh Way. Si les visiteurs cliquaient sur « J’aime » pour cette page, ils se voyaient proposer un lien pour télécharger gratuitement le livre. J’ai ainsi gagné des milliers de fans. Si vous pouvez vous permettre de proposer gratuitement un PDF, une chanson, un bon de réduction, je vous conseille d’essayer.
7.Vanité. Je suis très superficiel : j’adore augmenter mon nombre de suiveurs sur Twitter et de fans sur Facebook. Tout le monde sur Twitter veut davantage de suiveurs, même ceux qui ne le disent pas. C’est valable aussi pour Facebook : toutes les entreprises ayant une page fan veut toujours plus de fans, même celles qui ne le disent pas. Avoir des fans sur Facebook flatte plus mon ego que d’être suivi sur Twitter, et cela pour deux raisons. Premièrement, avec Facebook, on est sûr que chaque fan a pris la décision de cliquer sur le « J’aime » de la page. Avec Twitter, l’identité des nouveaux suiveurs est souvent douteuse : il peut s’agir de robots, de spammeurs, d’une manipulation adroite de la base de données de Twitter, ou d’un pervers se faisant passer pour une jolie fille. Deuxièmement, le nombre de suiveurs de n’importe quel utilisateur ayant figuré sur la liste d’utilisateurs recommandés ne veut pas dire grand-chose. Le nombre de fans donne une bien meilleure idée de la qualité des interactions sur votre page fan, ou de celle de ce que vous proposez sous votre onglet « montrer ».
8.Gratuité. Difficile de trouver un meilleur argument. Je n’ai jamais donné un centime à Facebook en échange de tout ce qu’il a fait pour moi. D’ailleurs, je débourserais sans broncher si Facebook et Twitter devenaient payants, car ils rendent tous deux des services inestimables. Tant que Facebook ne propose pas de formule payante, je ne vois aucune objection à ce que des publicités figurent sur ma page fan. Je ne prétends même pas toucher une partie des revenus publicitaires : garde-les, Facebook, tu les as bien mérités.
Quels sont les risques et les inconvénients d’une page fan Facebook par rapport à la création d’un site web ? Il en existe quelques-uns :
1.Vous êtes complice de l’inexorable montée en puissance de Facebook, futur maître du monde. En quoi est-ce différent du fait d’utiliser Windows (ce que je ne fais pas) ? Ou d’acheter le dernier iBidule d’Apple (ce que je fais assez souvent) ? Je préfère surfer sur une grosse vague que construire mon propre château de sable. Après tout, si Facebook permet à mon livre et à votre produit de se vendre, peut-être qu’il mérite d’être maître du monde. Peu m’importe que Mark Zuckerberg soit un “petit crétin” ou que Facebook dévoile des informations confidentielles (lesquelles, d’ailleurs ? que j’aime le hockey ?). Tout ce qui m’importe, c’est que Facebook me soit utile comme plateforme marketing. Comme disait le Parrain : « Ça n’a rien de personnel. Ce sont les affaires. ».
2.Vous mettez tous vos œufs dans le même panier. C’est vrai. Si Facebook suit la voie de MySpace, peut-être que votre page fan finira par disparaître. Il est plus probable, cependant, que mon livre meure avant Facebook. Je n’ai plus besoin de Facebook si mon livre n’est plus publié, et à plus forte raison s’il devient un best-seller international (avec un peu de chance grâce à sa page fan). En résumé, peu m’importe le sort de Facebook du moment que le site ne disparaisse pas tout de suite. Ce qui ne risque pas d’arriver. Certes, il s’agit là d’une stratégie à court terme et orientée lancement de produit. Si vous vous situez plutôt dans le long terme et pensez à une stratégie d’entreprise globale, l’espérance de vie de Facebook doit alors entrer en ligne de compte. Ceci dit, à très long terme, nous mourrons tous un jour ; plus sérieusement, vous pouvez toujours commencer par une page fan et créer un site web plus tard, après que vos ventes auront décollé.
3.Les gourous du marketing vous diront qu’en termes de miracles SEO, visibilité de la marque, liens entrants, notoriété, etc., rien ne vaut un site Web. C’est également vrai. Cependant, rien ne m’empêche de consacrer le temps, les efforts et l’argent que je n’investis pas dans la création d’un site Web à d’autres initiatives susceptibles de faire le succès de mon livre. Au bout du compte, un produit se vend ou ne se vend pas. Je ne pense pas que le choix d’une page fan de préférence à un site puisse faire à lui seul l’échec de votre entreprise. Mais je suis prêt à parier que mon livre aura plus de succès si je choisis d’utiliser Facebook plutôt que de créer mon propre site.
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Voici quelques pages fan dont on peut s’inspirer pour démarrer en beauté : une entreprise, Starbucks (plus de 18 millions de fans !), un livre, The Wave, et une personne, Mari Smith. Ce sont ces pages qui m’ont aidé à prendre ma décision. Qu’en est-il pour vous ? Si vous êtes patron d’une petite entreprise, très occupé, impatient, radin, difficile et réaliste (et vain, mais ce n’est pas obligatoire), et que vous préférez surfer sur la vague Facebook plutôt que de construire un château de sable dans votre coin, créez une page fan, non un site web. Kawabunga !
Guy Kawasaki
ENCHANTMENT!
La traduction est lancée ! Marylène Delbourg Delphis, proche de Guy Kawasaki et animée de la même conviction que pour L’ Art de se lancer et La Réalité de l’entrepreneuriat a accepté de traduire Enchantment. Nous avons suivi le conseil de Guy Kawasaki et créé la page Enchantement sur Facebook. Rejoignez-vous et contribuez au succès de ce livre. Bientôt des goodies…