Mamako, mamassa, mako makossa...

Publié le 24 novembre 2010 par Yannpapas

L'autre jour, en regardant la télé, je suis tombé sur le clip d'une chanson de Rihanna sortie en 2007, Don't stop the music. Je ne suis pas vraiment fan de la jeune chanteuse américano-barbadienne (même si je ne suis pas totalement insensible à ses yeux magnifiques et à son joli minois...). J'étais en train de rédiger un article pour mon blog et je n'ai pas zappé car la chanson n'est pas désagréable. Je ne la connaissais pas vraiment, n'écoutant pas trop ce style de musique mais l'air m'était vaguement familier.
Je n'écoutais que d'une oreille quand une phrase a attiré mon attention. D'abord discrète, puis progressivement plus marquée, elle faisait comme ça : "mama-se, mama-sa, mama-ku-sa".

Ça m'a rappelé un truc... une vieille histoire entre Michael Jackson et Manu Dibango. L'histoire remonte à 1972 quand le saxophoniste camerounais compose Soul Makossa pour la Coupe d'Afrique de Football. C'est la face B d'un morceau dédié a l'équipe nationale camerounaise de football, Mouvement Ewondo.
Le Makossa est un type de musique très populaire dans les villes du Cameroun. Le mot "Makossa" signifie danse en Duala, une des langues parlées au Cameroun et notamment à Douala, la capitale économique du pays.
Voici le célèbre "Mamako, mamassa, mako makossa" dans un live datant de 1973 :

Au début, la chanson ne s'exporte pas vraiment hors du continent africain, jusqu'à ce qu'un célèbre disc-jockey new-yorkais, David Mancuso, découvre le disque chez un disquaire de Brooklyn et commence à le passer dans ses célèbres Loft Parties.
La chanson connait un certain succès et la plupart des copies s'écoulent très vite. D'ailleurs, la demande augmentant, 23 groupes reprennent la chanson dans les mois qui viennent pour profiter du succès. En 1973, Soul Makossa atteint la 35ième place du Hit Parade américain et connait progressivement un succès international.
Dix ans après, le roi de la pop glisse le refrain de Dibango dans son célébrissime Wanna be startin' somethin' sans lui demander son accord, ni même sans le créditer sur la pochette de l'album Thriller. On le retrouve dans les chœurs, à la fin de la chanson, un petit peu modifié : "mama-se, mama-sa, mama-kusa"

"Je l’ai appris de manière inattendue", se souvient Manu Dibango dans un entretien accordé au Figaro en 2009. Il découvre le pot aux roses grâce à une amie qui lui a envoyé une carte de vœux en ajoutant : Et bravo pour la collaboration avec Michael Jackson. "J’étais flatté que l’un des plus grands artistes du siècle me reprenne. Mais il était aussi en train de gagner beaucoup d’argent en se prétendant auteur du morceau."
Manu engage une procédure qui se solde par un règlement financier à l’amiable en 1986. 2 millions de francs (de l'époque) sont versés à Manu Dibango et à son éditeur, renonçant ainsi à ses droits sur Wanna be startin' somethin' même s'il garde le contrôle sur les futures adaptations et reprises de Soul Makossa.
Le dossier en était resté là, jusqu’en 2007 où le saxophoniste camerounais voit sortir la chanson de Rihanna ainsi qu'un remix de Wanna be Startin' Somethin’ signé Akon pour le 25ème anniversaire de l'album Thriller :

Les deux chansons ont beaucoup de succès, surtout Don't stop the music, hit mondial qui se vend à plus de 7 millions d’exemplaires. Une fois de plus, dans les deux cas, Dibango n'est pas crédité et Michael Jackson est même considéré comme l’auteur-compositeur du morceau.
En 2009, à 75 ans, l’artiste camerounais a assigné, devant le tribunal de grande instance de Paris, les maisons de disque de Michael Jackson et Rihanna pour avoir utilisé sans son autorisation le thème musical de l’un de ses titres. Il sera débouté par la justice qui déclare sa plainte "irrecevable".
On retrouve le "mamako, mamassa, mako makossa" ou le "mama-se, mama-sa, mama-kusa", devenue célèbre, dans pas mal de chansons. Aucune n'arrive à la cheville du tube camerounais et ne vaut la peine que j'alourdisse cet article. Je vous propose donc de le terminer par une interprétation de Soul Makossa, datant de 2005, par son créateur, Manu Digango, en duo avec la personnalité préférée de mes compatriotes, Yannick Noah.
MAKOSSA !!!