"La femme qui dort", Phlippe Zacharie (1849-1915), source, wikimedia commons, domaine public.
Laissez-moi reposer, alanguie dans le pré verdoyant,
La tête bercée au creux des bois plutôt qu’emmurée,
Dans votre cage vide, blanche, carrelée…
Mon visage, tourné vers l’ouest, laisse mourir un souffle
Ténu, qui fait virevolter les robes indolentes des coquelicots,
Leurs frous-frous de crépon froissé tourbillonnant dans le vent.
Mes yeux picorés par les becs jaunes des oiseaux s’envolent
A tire d’aile vers les nuages, se fondent dans le bleu des cieux.
Les os enracinés dans l’humus, je creuse une litière apaisante
Jusqu’à ce que mes veines abreuvent le sol fielleux.
Laissez-moi reposer, alanguie dans le pré verdoyant,
La tête bercée au creux des bois, rassurée et protégée
Un scarabée glisse d’un orbite à l’autre, soulevant l’écorce cutanée
A son passage, une louve s’interroge brièvement sur ma présence,
Emporte un lambeau de chair vers ses louveteaux impatients.
Au petit matin, mes mains baignent dans la rosée de jouvence,
Mes perles d’émail s’accrochent au bout des branches.
Grelots blancs, immaculés, rivalisent avec les clochettes des muguets !
Tintinnabulements joyeux et sonnailles dernières, à la fois,
Pour célébrer l’éternel recommencement et faire taire mon émoi.
Laissez-moi reposer, alanguie dans le pré verdoyant,
La tête bercée au creux des bois, chevelure feuillue et emmêlée
Là où fuit le temps, tout se révèle, amer, doux et troublant
Laissez-moi reposer… laissez-moi reposer…
Alanguie… décomposée…reconstituée…
Et, au printemps, issu de mon cœur, sera l’églantier.