DEBAT D’ORIENTATION BUDGETAIRE 2011
Vendredi 19 novembre 2010
Intervention de
Philippe MASSEIN
Président du groupe socialiste républicain et citoyen.
Monsieur le Président,
Monsieur le Président du CESER,
Mes chers collègues,
Il en est des miracles comme de la vérité ! On attend les premiers, on cherche la seconde, on guette un signe pour les uns, on en espère une manifestation pour l’autre… Hélas Rien !
Pourquoi dis-je cela ? Parce que le temps passe, parce que le temps se lasse de ne pas voir notre opposition, le groupe «Envie d’aimer la Picardie» sortir de la posture, de la contradiction pour entrer dans le temps du débat de fond, le débat démocratique, celui de la confrontation projet contre projet.
Pourtant, et comme le dirait Madame Bettencourt, les Picards le valent bien…… ne serait ce que parce que leur avenir est en jeu !
Ce ne sont pourtant pas les occasions qui vous ont manqué…..La première relevait de votre initiative lorsqu’en décembre 2008 vous nous aviez promis un contre budget.
Comme sœur Anne, je n’ai rien vu venir, et l’audace est restée lettre morte. Seuls quelques timides amendements plus mal ficelés les uns que les autres sont venus éclairer votre vision de la Picardie, vision dont je suis encore à la recherche des contours.
La deuxième, c’était un rendez vous plus attendu encore : le renouvellement de notre assemblée. Belle opportunité pour vous de construire une alternative politique à notre projet.
Hélas attente encore déçue puisque vous n’avez proposé à nos concitoyens que l’indécence de basses attaques politiciennes et personnelles qui ne vous ont pas honorés et que les Picards, si j’en je regarde le résultat des élections, ont d’ailleurs justement, légitimement et durement sanctionnée.
D’occasions manquées en occasions ratées, j’en suis à croire, en bon laïque que je suis, que le miracle espéré en est resté au stade du mirage, au stade d’une illusion trouble que rien ne semble pouvoir dissiper sauf le mensonge et la manipulation.
Mais n’est pas David Copperfield qui veut !
Car, ne vous en déplaise, tel est bien ce que nous vivons depuis votre échec dans les urnes et, pour illustrer mon propos, je ne prendrai que deux exemples.
Le premier, c’est la réforme des collectivités territoriales sur laquelle Philippe DE VILLIERS, sans doute un dangereux gauchiste irresponsable, a porté un jugement lucide. « Les collectivités territoriales vont perdre, hélas, leurs moyens et leurs capacités, substituant à l’esprit du temps visionnaire l’ère du temps mécanicien ».
Comment mieux dire le regret de l’achèvement d’une période de près de trente ans qui a construit la modernité de nos territoires et sans laquelle nos régions seraient sinistrées. Oui, la décentralisation voulue par François MITTERRAND et conduite par Gaston DEFERRE est et reste une grande œuvre qui a permis le développement économique et patrimonial des territoires tout en sauvant les services publics.
En privant d’autonomie et de droits élémentaires et essentiels les collectivités locales comme vous le faites, non seulement vous allez à l’encontre de l’Histoire, mais plus encore vous obérez l’avenir des territoires en les laissant confrontés à eux même, sans parler des citoyens, et d’abord les plus faibles d’entre-eux, qui vont subir de plein fouet les conséquences de cette loi partiale et dont l’opportunité n’est que politicienne.
Le vote étroit du Sénat (à peine quatre voix de majorité) l’atteste et montre le peu d’enthousiasme d’élus de droite soucieux du devenir de l’action locale.
Dommage que le courage ait des limites que la lâcheté ignore !
Et c’est ici que le deuxième exemple prend tout son sens. C’est celui des moyens !
Nous voici désormais dépourvus d’autonomie fiscale, uniquement dépendants du bon vouloir d’un Etat plus que jamais défaillant.
Au moins nous épargnerez-vous votre couplet lancinant sur la hausse des impôts !
Et oui, c’est sans doute difficile à entendre pour vous, mais la vérité est que l’Etat nous asphyxie financièrement pour nous empêcher de réaliser nos missions, celles qui concernent le développement intégré, le lien social et le vivre ensemble.
Et vous ne manquez pas d’air pour fustiger comme vous le faites nos dépenses, toujours excessives et inutiles alors que votre indignation est sans bornes quand nous supprimons des lignes budgétaires qui, soit doublonnent des dispositifs nationaux, soit relèvent de la responsabilité pleine et entière de l’Etat.
Faisons simple, il m’apparaît pour le moins contradictoire et même démagogique de vouloir tout à Amiens et de faire tout le contraire à Paris.
C’est sûrement parce que cela devenait un peu trop voyant que les deux parlementaires élus en fanfare au printemps sur votre liste « J’avais envie que la Picardie m’aime » ont déjà disparu, la bise étant à peine venue.
Un petit tour et quelques indemnités plus tard, le tout agrémenté d’une cynique leçon de morale sur le non cumul des mandats, et les voilà quittes !
Pas vu, pas pris, voilà bien la parfaite illustration de ce que vous êtes, de ce que vous faites !
C’est aussi pathétique et dérisoire que la palinodie tragi-comique de ce « Matignon story » qui nous a été imposée.
Tout çà pour çà est on tenté de dire ?
A moins qu’il ne s’agisse de satisfaire les caprices d’un prince oubliant la tragédie du pouvoir mais surtout la responsabilité qu’il porte dans l’image dégradée de la République et de l’intérêt général bafoué au vu et au su des citoyens.
Que de temps perdu dont nous savons tous qu’il ne se rattrape pas. A force de vouloir tout faire en saturant l’espace médiatique, il apparaît qu’avec lui le temps a compté double et qu’ils sont nombreux, même au-delà de la gauche, à le trouver bien long.
D’autant plus long que la méfiance et le mépris affichés pour les corps intermédiaires (la négation de la démocratie sociale au moment de la réforme des retraite en est d’ailleurs le dernier exemple) produisent des ravages sur la cohésion sociale.
Nous, les collectivités locales, sommes victimes de la même méthode.
Est-ce parce que pédagogue par conviction je suis et que pédagogue par goût je reste que je sais que ce n’est pas la bonne méthode et que je pense que dire et redire des évidences élémentaires est plus que jamais nécessaires.
La première, c’est que dépendant désormais à plus de 90% des dotations de l’Etat, l’autonomie financière dont nous disposons pour construire ce budget 2011 n’est plus qu’une caricature d’autant que le gouvernement vient d’annoncer le gel des dotations jusqu’en 2012 au moins.
C’est une recentralisation revendiquée et assumée par ce pouvoir qui fait du conseil régional un simple établissement public comme avant 1986.
La deuxième de ces évidences est qu’aucune politique nationale n’est possible sans le concours des collectivités territoriales. En Picardie, comme ailleurs, nous demandons le respect et la confiance de l’Etat.
La troisième est que nous maîtrisons nos dépenses quand l’Etat en est à emprunter pour payer ses fonctionnaires.
Nous voulons donc que cessent ces campagnes de dénigrement sur nos politiques publiques qualifiées de dispendieuses alors qu’elles sont désormais les seules à garantir la cohésion sociale.
La quatrième de ces évidences est que le budget de la France pour 2011 est un budget de rigueur qui pénalise les classes moyennes alors que le nôtre sera de vérité et d’équité.
Oui, nous réaffirmons notre priorité à l’emploi par l’innovation, le développement intégré et la valorisation des compétences parce que nous savons que l’avenir de nos territoires et de leurs habitants est tout entier dans notre présence auprès des entrepreneurs, en tous cas ceux qui croient dans le potentiel humain, ceux qui osent conquérir des marchés à l’export et pour lesquels notre action est un effet de levier déterminant.
Nous le faisons à travers des outils que nous avons eu la prévoyance de mettre en place avant la crise et cette ineptie de suppression d’autonomie fiscale, je pense à « Picardie investissement » à « J’Entreprends en Picardie » ou encore « se former plutôt que chômer ».
C’est d’ailleurs en partie grâce à cela que la Picardie a séduit, sur un an, plus de 12.000 créateurs d’entreprises nouvelles et pérennes dans nos territoires.
Oui, nous réaffirmons notre priorité à la formation parce que c’est le chemin vers l’emploi.
Voilà pourquoi nous voulons un véritable service public régional de l’orientation, de la formation et de l’emploi qui soit maître de la carte des formations techniques et professionnelles et donc mieux à même d’assurer la cohérence régionale des besoins de formation.
Monsieur le Président, mes chers collègues, avant de conclure, je veux dire à nos partenaires et à nos concitoyens combien, depuis 2004, notre majorité a eu raison d’investir massivement plus de 1,8 Milliard d’euros dans le renouvellement du matériel TER, dans les lycées, dans la recherche et l’innovation.
Oui, je veux dire combien notre majorité a eu aussi raison de mettre en place tous ces projets concrets et utiles au quotidien… Et je pense aux 2.000 emplois solidaires dans les associations, aux bénéficiaires de la formation professionnelle qu’ils soient salariés, apprentis ou chômeurs dont le nombre a crû de plus d’un tiers.
Et même si comparaison n’est pas raison, je pourrais multiplier les exemples qui font de la région le partenaire de référence et de cohérence économique et sociale.
Alors oui, nous sommes encore et toujours à la manœuvre pour bâtir un budget de vérité puisque nous ne maîtrisons plus nos recettes et que l’Etat nous impose des dépenses.
Un budget d’équité puisque nos priorités restent le service des Picards et que nous refusons qu’ils soient pénalisés par des lois injustes et politiquement revanchardes.
Un budget responsable qui anticipe la reprise en créant les conditions économiques pour que celle-ci profite à l’intérêt général.
Alors, Madame la Présidente du groupe « J’aurais tellement aimé que les Picards aient envie de nous en mars dernier», face à ce budget que nous vous proposerons en décembre, je vous mets au défi de nous opposer le vôtre, un vrai contre budget comme le Président Gewerc l’avait fait quand il était dans l’opposition.
Alors nous pourrons débattre projet contre projet, budget contre budget
Si vous et ceux, au sein de votre groupe, qui rêvent de prendre votre place, n’êtes pas en capacité de le faire, vous apporterez alors la preuve aux Picardes et aux Picards que vous n’êtes plus dans la posture mais dans l’imposture.
La preuve qu’il est des contes de fées à dormir debout qui donnent de l’insomnie : les vôtres et ceux du gouvernement.
La preuve qu’il est des comptes à rendre, qui nous font vivre debout et qui donnent de l’énergie : les nôtres.
Entre conte de fées et compte à rendre, entre ces deux homophones, je ne doute pas, que dans dix-huit mois, les électeurs trancheront comme ils l’ont déjà fait ce printemps.
Je vous remercie de votre attention