Les formidables aventures du grand Khan : L’Afrique.

Publié le 23 novembre 2010 par Herbertlegrandkhan

Avant mon départ pour l’Angleterre sous les auspices de l’éducation nationale, j’ai été convié à Paris avec mes condisciples pour écouter les paroles du ministre : « Vous êtes les ambassadeurs de la France. Par vos actions, vous incarnez notre peuple et nos valeurs. » Ces mots sont sont restés gravés dans mon esprit. Moi, le grand Khan, je suis l’ambassadeur du peuple français !! Depuis ce jour, j’ai passé un temps énorme à écumer les pubs et les réduits les plus obscurs pour diffuser la culture française, c’est à dire raconter des conneries en buvant de la bière…  

 Avec le temps, je me suis fait une solide réputation d’aventurier auprès de la faune interlope qui fréquente les tripots. Les Anglais écoutent avec émerveillement le récit des aventures qui ont façonné ma vie : Ma rencontre avec Cédric, le Dalaï Lama, le Yeti. Aujourd’hui, ils me voient comme une sorte d’Indiana Jones… ou plus précisément un mélange d’Indiana Jones, de Lady Gaga et de Jean-Claude VanDamme pour le charisme. Chaque semaine, je reçois des invitations pour narrer mes exploits dans des salons mondains en compagnie de marquises hongroises et de terroristes libanais. Alors, chaque soir, je raconte ma vie d’enfant soldat en Afrique, la Corée et la fac de Clermont-Ferrand devant une foule médusée. Je rajoute de petits détails à chaque récit comme le faisait Homer pour captiver son auditoire et ils m’écoutent comme de jeunes sodomites athéniens en train de manger de la fêta.

Je sais qu’il y a parmi vous de nombreux lecteurs passionnés d’aventures et de contes philosophiques (et aussi d’amateurs de fêta, mais ce n’est pas le sujet). C’est pourquoi j’ai décidé de vous narrer aujourd’hui un des passages les plus fascinants et authentique de mon existence : Ma vie d’enfant soldat en Afrique.

Nous étions en 1954, l’été de mes 14 ans. Comme tous les jeunes auvergnats, je passais mon temps à grimper dans les arbres pour cueillir des noix de coco et chasser les petits singes dont je me nourrissais. Je vivais dans l’inscouciance; je buvais l’eau des rivières et je courais dans les bois à moitié nu avec mon slip léopard. Hélas, par un jour sinistre de juillet, je tombais dans les filets d’un marchand d’esclave… L’Auvergne était souvent victime de ces traficants d’êtres humains qui venaient chercher ici de jeunes hommes robustes. En raison de mon incroyable musculature et de la lueur sauvage qui brillait dans mon regard, je fus rapidement emmené en Afrique pour y être vendu comme enfant soldat. Je fus acheté par un chef de guerre des environs de Tombouctou dénommé Fousseïni, ou plus couramment « Fouss le jaguar de la savane ». C’était un homme charismatique et d’une grande érudition qui fascinait à la fois les femmes et les animaux, un peu comme moi aujourd’hui. Le lion se couchait devant lui. L’éléphant barrissait en signe de respect et le lémurien lui montrait les fesses en signe de soumission. Fouss appréciait ma force brutale et mon absence totale de morale. Comme tous les Auvergnats, je suis païen. Cela faisait de moi le parfait garde du corps. Je pouvais terrasser un Rhinocéros ou un perroquet d’un seul coup de poing et quand il était trop las, je pouvais m’occuper de son harem. Quand la guerre éclata avec les seigneurs de guerre voisins, ce fut le début de ma fin… Peu familiarisé avec les outils, je n’ai jamais réussi à me servir d’un fusil… ce qui est un gros handicap dans la guerre moderne. En avril 1956, lors du siège de Bamako, je subissais ma première humiliation. J’étais chargé d’éliminer un char d’assaut qui gardait l’entrée de la ville afin de permettre le passage des troupes. Tout le jour durant, je me battais contre le monstre en martelant la cuirasse de puissants coups de poings, tel un dieu affrontant les géants dans un tournoiement de poussière. Hélas, à la tombée du jour, mes forces m’abandonnèrent et nous dûmes battre en retraite. Ce fut le début de me disgrâce. Quand la paix s’installa après les soubressauts de l’indépendance, Fouss me chassa comme un vulgaire gitan : « Retou’ne donc dans ton pays en ‘oumanie. » Alors, la larme à l’œil, seul et déséspéré, je m’approchais du fleuve Niger gagner à la nage de nouvelles contrées.

Après quelques kilomètres épuisants, je fus recueilli par un chalutier marocain qui pêchait la morue dans le fleuve. Quelques jours plus tard nous étions en route pour le Viêtnam…