De temps ŕ autre, l’actualité nous réserve d’étonnantes surprises. Ainsi, Boeing déploie actuellement de grands efforts pour vanter les mérites du court-courrier 717 (106 places), avion mi-régional, mi-demi-frčre du 737, dont la production a été arrętée il y a quatre ans et demi aprčs livraison du 156e exemplaire. Suite ŕ la récente faillite de Mexicana, l’avionneur de Seattle est en passe de récupérer une bonne vingtaine de ces avions qui étaient exploités en location-bail. Il s’agit donc de leur trouver une nouvelle terre d’accueil.
On imagine le casse-tęte : affirmer urbi et orbi que le 717 est un appareil tout simplement formidable mais qu’il n’a pas malheureusement pas connu le succčs mérité parce que le monde aérien est ingrat. Il s’agit ŕ présent de tenter de convaincre l’une ou l’autre compagnie peuplée de fans vieillissants de Douglas qu’il y a lŕ une occasion unique ŕ ne pas manquer. Pourtant, le 717 avait tout l’air d’un cadeau empoisonné lorsqu’il se retrouvé dans la corbeille du mariage Boeing/McDonnell Douglas. Il risquait en effet de faire du tort au plus petit des 737, dans le cadre d’une dualité plutôt gęnante. La cohabitation n’a finalement pas duré trčs longtemps et ne fit pas de dégâts notables. Reste, aujourd’hui, ŕ ressortir d’anciens dossiers pour vanter les mérites d’une machine inclassable : un faux Boeing, propulsé par des Rolls-Royce BR 715, moteurs anglo-allemands qui n’ont pas laissé un souvenir impérissable encore que tout ŕ fait convenables en matičre de fiabilité.
Et ce n’est probablement qu’un avant-goűt du nouveau petit problčme de Boeing. En effet, AirTran, qui vient d’ętre rachetée par Southwest Airlines, reine des low cost, dispose de 86 exemplaires de ce męme 717. On imagine difficilement qu’ils survivent ŕ la fusion, Southwest tirant une part non négligeable de sa productivité exemplaire de l’exploitation d’un seul et unique type d’avion. D’oů la possibilité, si l’on compte bien, que plus de la moitié des 717 produits envahissent soudainement le marché de l’occasion.
Ce 717 est un peu moins inclassable qu’il n’y paraît ŕ premičre vue ŕ condition de se souvenir qu’il est né MD-95. C’était donc un Douglas, un vrai Douglas, un éničme dérivé du quasiment immortel DC-9. La gestion patrimoniale de la famille Douglas avait conduit l’avionneur de Long Beach ŕ limiter les investissements en matičre d’appareils civils au strict minimum, une lourde erreur. Le MD-11 fut tout au plus un DC-10 remis au goűt du jour et le MD-80, décliné en diverses versions, trčs fiable, ne fut qu’un DC-9 amélioré. Face ŕ la force de frappe de Boeing et aux grandes ambitions d’Airbus, la défaite commerciale était inéluctable.
Pour rafraîchir les mémoires défaillantes, ajoutons que le DC-9 fut annoncé en 1962 et que chacun remarqua avant tout qu’il reprenait la formule novatrice de la Caravelle, le report ŕ l’arričre des moteurs libérant la voilure de toute interférence aérodynamique. Le prototype effectua son premier vol en février 1965, propulsé par des Pratt & Whitney JT9D, autre futur immortel. En d’autres termes, en se permettant un raccourci brutal, le DC-9/717 a grosso modo 45 ans et sa carričre est loin d’ętre terminée.
Reste le fait qu’un 100 places moderne ne peut plus ętre une Ťintrapolationť (néologisme qu’affectionnent les ingénieurs de bureau d’études) d’un appareil de capacité supérieure. Bombardier, Embraer ont pris le relais avec brio, rejoints récemment par un groupe de nouveaux entrants venus de Russie, Chine et Japon. Les mânes de Donald W. Douglas Jr n’en reviennent certainement pas.
Pierre Sparaco - AeroMorning
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