Banderille n°356 : Mélenchon, à l’emporte-PS

Publié le 22 novembre 2010 par Toreador

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Par Toréador | novembre 22, 2010

Il est le buzz, par jupiter !

Lui a tonné : "Je suis le bruit et la fureur, le tumulte et le fracas". Jupiter ? Non Mélenchon. Il cite Faulkner (1929) et mime Churchill (1940 – "Je ne vous promets que du sang, de la sueur, et des larmes"), touillant dans le même pot lyrique une certaine fantasmagorie de la résistance anglaise à l'impérialisme nazi, et les mânes du Front populaire. Fureur, fracas… Ses opposants s'accordent surtout à penser qu'il a tout d'un tout petit führer surfant sur un bruit médiatique. C'est une vieille antienne de la Gauche : dès qu'un leader en appelle au peuple hors du Parti Socialiste sur l'air des bals populistes, la nomenklatura ressort son vieil épouvantail éprouvé du Jean-Marie-Le-Pen-en-devenir. Sauf que cette fois-ci, l'anathème est lancé contre un ancien camarade, et ça ne lui plait pas du tout, du tout, du tout.

Les loups se mangent entr'eux.

Pourtant, Mélenchon ne fait que puiser dans le fonds de commerce traditionnel des petits partis qui veulent exister. Le "Qu'ils s'en aillent tous" a été mis en musique par Poujade, chanté par Bayrou, recyclé par Dupont-Aignant, qu'il s'agisse du "renvoi dos à dos", du "bonnet blanc et blanc bonnet" ou du "tous coupables". Mélenchon, si j'en crois Libération,  a préféré abandonner ces références pour ne pas trop mécontenter ses alliés communistes et a préféré au Mans, se montrer tonitruant pour mieux invoquer les tribuns de la plèbe. La plèbe, le prolétariat, deux concepts qui ne peuvent que plaire aux anciens communistes.

C'est oublier que ces tribuns n'avaient aucun pouvoir positif sous la République romaine. Ils ne pouvaient que censurer les actes des deux consuls élus grâce à un pouvoir de véto. Mais cela permet aussi de renforcer Mélenchon - et il cite expressément ce terme – dans sa lutte contre les "oligarchies" des patriciens de la République. Et tant pis s'il puise involontairement dans le même répertoire que ses adversaires idéologiques sociaux-démocrates : les Gracques étaient eux-aussi des tribuns de la plèbe !

Après la tempête : l'écume des maux

Mélenchon – qui personnellement m'inspire la plus grande sympathie – n'est pas plus démago qu'un autre, et il est moins blâmable pour moi pour son style que pour ses idées. Derrière le bruit, que trouve-t-on ?

Il promet de titulariser 842 000 non-titulaires de la Fonction publique, et donc implicitement de réduire à néant tous les efforts de compression entrepris depuis Raffarin.

Il ose interpeller le PS – c'est surréaliste – avec cette adresse : "Dites-nous, chers camarades socialistes, pourquoi il n’est pas possible d’avoir une retraite à soixante ans à taux plein ?". T'as vu la gueule de la démographie, bonhomme ? Jean-Luc Mélenchon imagine des légions de cotisants qu'il bouge impérieusement sur la carte abstraite de sa bataille des retraites. Je n'ose ajouter "Tout seul dans son bunker", car il n'est pas tout seul, et puis ce type de comparaisons va m'attirer des problèmes.

Il parle de quitter la Vème république, mais se pose d'entrée en candidat à son élection Reine. Derrière les Gracques, César ?

Non, ce qui est dommage chez Mélenchon, ce sont ses propositions tellement irréalisables qu'elles en asphyxient le NPA de Besancenot. La clé de voûte qui permet de rendre toute sa logique au programme, c'est de "taxer le capital/les riches/les oligarques et les nantis". C'est tellement facile comme solution, et surtout tellement contradictoire avec tous ces discours qui reprochent à Sarkozy de dresser les Français les uns contre les autres. Comment La Gauche peut fustiger l'inéquité de la réforme des retraites (qui ne repose que sur les épaules des travailleurs effectuant des métiers pénibles) et proposer, au nom de la Justice, une révolution qui ne chercherait ses solutions que dans l'escalavagisation d'une partie de la population ?

Réflexion hémiplégique, France tétraplégique.

Tags: "je suis le bruit, 2012? La Gauche, discours du Mans, la fureur, le tumulte et le fracas", le-Pen, Mélenchon, populisme

Sujets: Banderille, Toréador critique la Gauche | 1 Comment »

Une réponse “Banderille n°356 : Mélenchon, à l’emporte-PS”

  1. h16 Says:
    novembre 22nd, 2010 at 17:56

    "l'escalavagisation" ouch.
    Mais j'aime bien le reste du billet Et notamment le titre.

Commentaires